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ASTROLOGICA

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L’astrologie et l'écosystème de l’Humanité

par Jacques Halbronn

    On n’insistera jamais assez sur le fait que comprendre l’astrologie implique d’appréhender un phénomène plus global qui concerne l'écosystème de l’Humanité. Mais on ne saurait oublier un autre point capital, c’est le vivant qui a forgé un tel écosystème lequel ne s’est nullement imposé à lui.

   Selon notre représentation, l’individu n’est pas une unité viable, il ne fonctionne qu’au sein d’un ensemble solidaire qui le complète et le prolonge. Nous sommes en ce sens aux antipodes de la psychologie du XXe siècle (Freud, Jung) qui a cherché au contraire à montrer la richesse de notre monde intérieur et des astrologues qui leur ont emboîté le pas1 ; en fait, nous serions plutôt en faveur d’une approche psychosociologique du comportement humain.2

   Comment une culture qui est centrée sur l’individu, qui refoule la plupart des clivages, y compris le clivage masculin-féminin avec cette tarte à la crème selon laquelle nous avons tous en nous et du masculin et du féminin, pourrait accepter l’astrologie dès lors que celle-ci présuppose un lien avec quelque chose d’extérieur au sacro-saint individu ?

   Certes, l’astrologie a cherché à se mouler dans une telle représentation, en affirmant la complexité du sujet, au travers du thème astral mais ce faisant elle a scié la branche sur laquelle elle reposait.

   En effet, le thème astral nous apparaît, paradoxalement; comme en contradiction avec la philosophie de l’astrologie que nous défendons3 en ce qu’il véhicule l’idée d’une complexité interne aux dépens d’une complexité externe; en cela, le thème natal trahirait la cause qu’il est censé défendre. Au niveau prévisionnel, on en arrive à des pronostics tellement individualisés que l’on est toujours décalé par rapport au voisin comme s’il n’y avait pas de vécu et de drame commun.

   Au fond, la question clef serait la suivante : quelles sont les composantes constitutives de l'écosystème de l’Humanité et l’astrologie est-elle l’une d’entre elles ? Ce qui est certain, en tout état de cause, c’est qu’elle n’est pas la seule. Et là encore, il nous faut combattre ceux qui ne jurent que par l’astrologie stricto sensu et considèrent que les astres ont le monopole de l’environnement de l’individu. Nous ironisions plus haut sur l’animus et l’anima de Jung, description qui a certainement contribué à embrouiller encore plus la réflexion sur la différence Homme / femme. Que de scènes de ménage en perspective dans notre tête dans laquelle fourmillerait tout un monde! Nous ne pensons pas davantage que nous ayons un Surmoi dans un coin de notre psychisme, comme le voudrait Freud. Au fond de telles visions des choses nous isolent les uns des autres en nous rendant sinon autonomes du moins schizophrènes !

   C’est pourquoi, l’astrologue du XXIe siècle doit opter pour une conception de l’Homme qui soit compatible avec son approche spécifique, ce qui implique de réfléchir sur l’origine et l’émergence du lien entre hommes et astres et en quoi une telle alliance fut-elle un progrès pour l’Humanité. Car, le branchement des hommes sur les cycles célestes constitue bel et bien une avancée, une percée considérable au niveau de l’évolution des espèces et qui annonce, anticipe, en fait, sur notre monde technologique contemporain.

   Imaginons en effet que si les hommes avaient tout intériorisé comme cela est dit par les uns et les autres, il n’y aurait pas de machines car c’est l’homme qui serait machine et qui se chargerait - à quel prix ? - de tout. On nous demandera: en quoi le lien anthropocosmique constitue-t-il un progrès? Dans la mesure où les astres ont une cyclicité, l’homme profite ainsi de leur dynamique en se raccordant à eux, en fait il découvre le temps qui n’est palpable que dans la conscience d’une périodicité. Mais précisons-le: l’homme n’a pas pris conscience de son rapport aux astres, il l’a constitué et codifié.

   Car, si l’on se contentait de soutenir que les astres se sont imposé à lui, en tant qu’environnement, nos propos n’auraient pas la même portée et l’Homme n’en aurait pas le mérite si bien que dans la foulée il n’aurait pas été capable de continuer à instrumentaliser ce qui pouvait lui servir et le relayer, ce qui est bien le propre de la machine, voire du simple outil, si l’on fait une distinction d’ailleurs assez discutable entre les deux.

   Deux phénomènes annoncent précisément l’aptitude de l’Humanité à se décharger sur la machine ou la machinerie(dans le cas du Ciel), ce sont la sexuation, c’est-à-dire la division entre hommes et femmes, mâles et femelles, et la sensibilisation aux configurations célestes.

   Si l’on se place au niveau de ce que l’on pourrait appeler une technologie de l’éthique ou une techno-éthique, il convient de s’interroger sur ces instances que sont le Surmoi et la Conscience, dont on voudrait nous faire croire qu’elles sont situées à demeure et de façon inaliénable en chacun de nous, ce qui nous évite de risquer de les perdre de vue. Vision en vérité bien simpliste et bien optimiste et surtout encore une fois fort égocentrique !

   Les astres ont littéralement à voir avec le Surmoi, étant au dessus de nous; ils constituent une horloge, un calendrier auxquels nous avons pris l’habitude de nous soumettre, étant entendu que nous y associons les actes qui nous conviennent, comme nous le pratiquons pour un agenda qui ne donne que la trame des jours en laissant en blanc le contenu.

   Quant à la Conscience, elle n’est pas davantage, quelque chose d’inhérent à l’Humanité, considérée en chacun de ses membres, c’est un “plus” qui repose sur une certaine division du travail4 qui implique certains clivages, volontiers présentés sur un mode religieux, encore bien mal reconnus. Sans entrer dans les détails de notre description de l'écosystème de l’Humanité, insistons sur le fait que c’est notre environnement humain qui nous équilibre et qui nous complète, nous sert de garde-fou et nous empêche de nous scléroser.

   Au vrai, l’astrologie ne dit pas autre chose quand elle affirme que nous ne sommes pas tous marqués par les mêmes astres ni par les mêmes signes mais quand elle met en place le thème astral elle perd alors tout le bénéfice de cette présentation incitant à la tolérance et à la complémentarité. Il y a en l’astrologie un Dr Jekyll et un Mister Hyde, d’où des sentiments mitigés à son égard !

   La leçon de l’astrologie, c’est de nous enseigner que ce qui ne se fait pas aujourd’hui se fera demain, que ce que l’un ne fait pas, un autre le fera, ce qui s’appelle une répartition des efforts et des tâches.

   Les hommes et les femmes d’aujourd’hui revendiquent l’égalité entre tous, ce qui est la négation de toute organisation sociale. Ils ne comprennent pas que l’organisation ne se fait pas au jour le jour mais qu’elle ne fait sens que sur la longue durée. L’astrologie, de son côté, ne peut davantage se transformer au gré des nouvelles découvertes astronomiques; elle est le résultat de plusieurs millénaires de relations anthropocosmiques. Comme l’écrit le Dr Frank Nguyen5, qui par ailleurs nous fait l’amabilité de citer des passages d’un de nos textes6, “l’astrologie a été non pas découverte (comme on pourrait découvrir une loi scientifique, par exemple celle de la gravitation) mais élaborée progressivement au cours des temps, les apports d’une époque se mêlant à ceux de la suivante (…) Dans le grand silence de la nuit, l’homme a un jour levé les yeux vers le ciel étoilé. Il a depuis des temps immémoriaux observé et accordé une signification aux cycles du Soleil, de la Lune, des étoiles et des planètes. Et il n’est pas aberrant de faire alors l’hypothèse que les croyances dont l’homme a été porteur aient pu s’inscrire dans le psychisme humain, au fil des siècles. Comme un héritage inconscient transmis de génération en génération”. La thèse d’une influence des astres s’exerçant à l’insu des hommes n’est en effet plus de mise. Certes, de nos jours, cette influence n’est pas reconnue des milieux scientifiques mais pour exister il a bien fallu qu’à un moment donné le rapport hommes astres ait fait l’objet d’un très large consensus social sans lequel celui-ci n’aurait pu devenir le patrimoine de l’Humanité toute entière jusqu’à nos jours. Là où ne suivrons pas le Dr Nguyen, de Lyon, c’est quand il laisse entendre que ce processus puisse justifier la pratique du thème astral ou quand il accepte, sans état d’âme, que l’astrologie puisse s’ “enrichir” de corps astraux inconnus ou / et invisibles dans l’Antiquité. Il reste que cette nouvelle école dont nous sommes, pensons-nous, l’artisan, fait échec notamment à la doctrine de l’astrologie conditionnaliste, fondée, dans les années soixante, par J. P. Nicola et qui voudrait que les astres constituent déjà en soi un système de significations qui se serait imprimé dans le psychisme humain. Or, c’est précisément, une telle représentation des choses, encore largement dominante dans les milieux astrologiques, qui a rendu l’astrologie inacceptable tant philosophiquement qu’épistémologiquement.

   Même le Français Michel Gauquelin n’a pas su présenter son travail statistique selon une théorie acceptable quant à l’origine des rapports hommes-astres. Cet auteur mondialement connu (1929 - 1991) avait cependant insisté à de nombreuses reprises, dans ses ouvrages7 sur le fait que de nombreux animaux avaient adopté des cycles célestes et notamment le cycle lunaire. Or, il ne s’agissait pas là, pensons-nous, d’une soumission inconsciente à un environnement céleste mais d’une prise en compte, d’une instrumentalisation de celui-ci, ce qui montre bien que l’astrologie n’est pas née avec l’Homme, qu’elle témoigne d’une sorte de biotechnologie bien avant que l’homme devienne homme à moins qu’elle n’en ait été la condition pour qu’il le devînt. Et il en est évidemment de même pour l’apparition de la sexuation qui, elle non plus, n’a pas attendu l’Homme mais aura probablement conduit à lui.

   Certes, l’astrologie, ainsi reformulée, refondée; n’est-elle pas à l’abri des critiques mais encore est-il préférable que celles-ci portent sur ses véritables articulations et non sur des problématiques parasites et des hypothèses inutiles à son existence, et soient donc constructives non seulement pour l’astrologie mais pour le progrès de la connaissance, autrement dit, il ne faut plus que l’astrologie s’enferme dans une idiosyncrasie décalée mais qu’elle interpelle efficacement le chercheur en sciences de l’Homme dans le domaine de l’auto-programmation, de la transmission des automatismes à l’échelle de l’espèce, donc au niveau génétique, qui constituent des moyens déterminants pour qu’une espèce sorte du rang. S’il n’en avait pas été ainsi, l’Humanité ne serait pas devenue ce qu’elle est et ne serait d’ailleurs pas Humanité. Il est pour le moins paradoxal que l’intelligentsia académique actuelle rejette, avec une telle désinvolture, un questionnement majeur, prétendant pouvoir en faire l’économie, et il est probable que par un tel aveuglement, commettant un tel contresens, elle se déconsidère ainsi à jamais aux yeux des générations qui suivront. Espérons qu’une formulation nouvelle de la question, éloignée des abstractions chères aux philosophes grecs qui voyaient l’univers comme un grand livre à décoder et non pas à écrire, mettra fin à certains partis pris et débloquera la situation. C’est précisément lorsque le Ciel fut désacralisé / défloré par les découvertes astronomiques, que l’astrologie entama son déclin et il aura fallu bien des siècles avant que l’astrologie ne parvienne à expliquer que peu importait ce qu’était le ciel en soi, que seul comptait ce que les hommes en avaient pensé et comment ils avaient cru bon de s’en servir.

   Au vrai, la question qui restera un jour à résoudre est bien la suivante: pourquoi aura-t-il fallu autant de temps pour prendre conscience des véritables fondements de l’astrologie, qui sont dans la capacité du vivant à déterminer ce que les choses sont et ainsi à se déterminer - c’est ce que Bachelard (1884 - 1962) appelait l’obstacle épistémologique. On est loin de ce qu’on appelait au début du XXe siècle le “déterminisme astral” lequel serait parfaitement in-signifiant si les hommes ne l’avaient pas canalisé à leur guise. Notre explication est la suivante: lorsque s’opéra (aux XVe-XVIIIe siècles, de Copernic à E. Halley) la révolution astronomique qui balaya certaines représentations, les sciences de l’Homme n’étaient pas en mesure de montrer le poids des dites représentations, vraies ou fausses peu importait, sur le psychisme humain; les notions d’arbitraire (du signe) et d’erreur8 n’avaient pas encore gagné leurs lettres de noblesse.

Jacques Halbronn
Paris, le 21 avril 2003

Notes

1 Cf. André Barbault, De la psychanalyse à l’astrologie, Paris, Seuil, 1961. Retour

2 Cf. “L’astrologue, gardien du Surmoi”, Lettre des Astrologues, décembre 2001. Retour

3 Cf. notre article, “Faire le deuil du thème astral”, Etoile & Planète, site http://www.astrofred.com/mouvement/article.html. Retour

4 Cf. notre étude sur “les juifs et la conscience”, Site Ramkat.free.fr. Retour

5 Cf. L’astro-homéopathie. Comment trouver vos remèdes homéopathiques par l’astrologie, Grenoble, Le Mercure Dauphinois, 2003, pp. 15 - 25. Retour

6 Voir “La pensée astrologique”, Histoire de l’Astrologie, Paris, Artefact, 1986. Retour

7 Cf. notre bibliographie dans ses Personnalités planétaires, Paris, Trédaniel, 1992. Retour

8 Cf. notre texte “Créativité de l’erreur : pour une errologie”, in collectif Eloges de la souffrance, de l’erreur et du péché, Paris, Le Lierre et le Coudrier, 1990. Retour



 

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