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ASTROLOGICA

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L’astrologie, une renaissance en suspens

par Jacques Halbronn

    A la fin du XVIe siècle, de nombreux auteurs - citons pour la France, Loys Le Roy, Jean Bodin, Claude Duret - se sont interrogé sur les changements et mutations subis par les Etats et sur leurs causes et ils ont envisagé que certaines de ces causes pouvaient être à chercher du côté du cosmos. Car les hommes de tout temps se sont demandé si les révolutions politiques qui survenaient périodiquement étaient sinon prévisibles, du moins explicables, après coup et notamment de considérer le rôle des comètes, comme le fera à cette même époque un Kepler, à propos des comètes de la première décennie du XVIIe siècle. En fait, à cette époque, l’astrologie était en quête de son axe et c’est cette quête, inspirée par le progrès de l’astronomie nouvelle, qui correspondit à une Renaissance de l’astrologie, contemporaine de la Renaissance tout court. On espéra qu’une plus grande précision dans les calculs astronomiques, le recours à des facteurs ignorés de l’Antiquité, permettrait de refonder l’astrologie. L’erreur de ces chercheurs - mais aussi de leurs adversaires - fut de ne pas diagnostiquer une certaine pathologie de l’épistémé astrologique (cf infra). Pourtant, l’époque se prêtait du fait des bouleversements historiques permettant une certaine visibilité événementielle.1 Malgré cette double conjoncture favorable - tant sur le plan astronomique qu’historique - l’astrologie ne fut pas remise sur pied et figura bientôt parmi les savoirs ratés.

   Or, ce ratage ne fut pas seulement celui de l’astrologie mais celui de l’Histoire réduite à une médiocre phénoménologie, sans envergure, incapable de découvrir dans l’immensité du firmament le profil de l’horloge sonnant les grandes heures de l’Humanité. Si la géographie de la Renaissance progressait avec les Grandes Découvertes, liées au progrès de la navigation, lié en partie avec un meilleur repérage stellaire, l’Histoire de la Renaissance, en revanche, allait stagner. On notera qu’un Pierre d’Ailly (1350 - 1420) contribua tant aux recherches historiques que géographiques et qu’un Christophe Colomb, amateur au demeurant d’un recueil de prophéties2, s’intéressa aux deux plans de son oeuvre, ce qui l’aida à explorer le Nouveau Monde.

   C’est donc dans ces époques quelque peu surprenantes que les esprits sont les plus ouverts à l’idée astrologique mais aussi à la conscience que l’astrologie n’est pas encore au point, parce qu’elle n’a pas prévu, en temps utile, ce qui s’est passé. Il est probable que ce que nous avons vécu ces derniers temps, dans le monde, soit une invitation, de plus, dans ce sens et d’ailleurs la Seconde Guerre Mondiale n’a-t-elle pas suscité chez les astrologues quelques nouveaux modèles dont les applications sur le long terme ne furent pas nécessairement convaincantes ? L’après-guerre sera marquée, cependant, par un rejet du zodiaque en astrologie mondiale, chez un André Barbault3, sans pour autant un retour aux étoiles fixes, l’accent allait être mis, cette fois, sur les nouvelles planètes découvertes depuis la fin du XVIIIe siècle avec comme repère historique l’idée de guerre mondiale, comme si cela pouvait être une donnée pertinente de l’Histoire de l’Humanité.

   On ne demande pourtant pas grand chose aux astrologues, rien de bien compliqué, ni de très sophistiqué. Au fond, s’ils pouvaient nous donner quelques critères astronomiques à peu près fiables avec des significations politiques pas trop élastiques, avec une certaine probabilité tendancielle, cela ne serait déjà pas si mal. On ne leur demande pas le Pérou : même pas de nous dire quel pays sera touché, mais au moins lesquels seront menacés, ébranlés, cette fois, sachant fort bien que chaque fois qu’une configuration se reforme, ce sont peu ou prou les mêmes tropismes mais pas forcément aux mêmes endroits. Et puis, que les astrologues fournissent ces données basiques et les politologues, sur le terrain, se chargeront d’entrer dans le détail et d’envisager les différents cas de figure possibles, pour la période considérée. Mais on n’en est (même) pas là !

   C’est pourquoi, sans relâche, nous essayons, depuis quelques années, d’une étude sur l’autre, d’affiner notre modèle, nos catégories sociopolitiques. Cette fois, c’est à la notion d’alliance que nous souhaiterions accorder toute notre attention car il nous semble qu’il s’agit là d’un concept clef de la vie des Etats. La plupart des auteurs cités plus haut n’ont pas vraiment pris la peine de sérier les changements, ils se sont contenté de constater qu’il y avait ou non changement à la suite d’une certaine configuration cosmique (conjonction, éclipse, comète et bien d’autres, l’auteur le plus complet sur cette question étant, à notre connaissance Duret, déjà cité mais il faudrait citer avant lui un Pierre d’Ailly, cardinal de son état, dont les ouvrages rédigés au début du XVe siècle, sur les rapports entre Histoire et Astronomie suscitèrent un certain rejet, notamment de la part de l’italien Pic de la Mirandole (1463 - 1494). De nos jours, il faut l’avouer, le débat sur le rapport entre les astres et l'Histoire n’intéresse plus que les astrologues et laissent de marbre les historiens, ce qui est probablement une erreur de la part de ces derniers4 pour ne pas parler des astronomes qui ne savent que se gausser de telles spéculations. Mais qui vivra verra.

   Qu’est-ce donc qu’une alliance ? C’est un rapprochement entre des entités distinctes et qui tentent de s’unir en dépit de leurs différences de tous ordres. On ne parle en effet point d’alliance entre des entités en tout point identiques, encore que même là où l’on croit qu’il y a homogénéité, cela peut souvent n’être à terme qu’une apparence. Au fond, on ne peut jamais préjuger de la nature d’une situation, tout étant relatif. Si on laissait indéfiniment les alliances se défaire, que resterait-il encore debout et c’est d’ailleurs pour cette raison que les phases de crise sont limitées dans leur durée, faute de quoi on assisterait à un émiettement catastrophique du tissu socio-politique.

   Il y aurait donc un temps pour tenter des alliances entre entités distinctes, entre signifiants, si l’on préfère, que l’on aurait tendance à ne pas confondre et que l’on voudrait désormais associer, tentant ainsi ce qu’il faut bien appeler une expérience de cohabitation que cela se fasse par la diplomatie ou / et par la guerre de conquête, le mot conquérir signifiant rassembler (latin conquirere) ce qui n’est donc pas au départ commun car alors le travail serait déjà accompli et il n’y aurait point d’enjeu, de défi.

   Par conséquent, à l’approche d’une telle période d’alliance, telle que l’astrologie axiale peut la prévoir, du fait de la quadrature de Saturne à l’axe stellaire, et qui se produit tous les quinze ans, il convient de se demander quelles nouvelles combinaisons, plus ou moins audacieuses, vont bien pouvoir être tentées par les uns et / ou par les autres, ici et là. Et parmi ces tentatives, il faut faire la part de celles qui aboutiront et de celles qui ne seront qu’esquissées ou avorteront, ce qui peut, à la longue, sur sept ans, toucher pas mal de monde sur la planète. Bien entendu, ce sont les rapprochements les plus inattendus et survenant dans le cadre des phases adéquates, qui seront les plus concluants pour le crédit de l’astrologie axiale.

   Il faudrait au demeurant dresser l’inventaire des plus étonnants et paradoxaux rapprochements survenus au cours des siècles puis de voir s’ils se répartissent majoritairement dans les phases de quadrature axiale. Nous ne sommes pas certains qu’un tel recensement ait déjà été effectué et il serait bon que des historiens extérieurs à notre domaine, s’en chargeassent pour que l’on ne nous reproche pas d’avoir choisi les cas retenus, dans le sens qui nous arrangerait.

   La phase inverse est certes a priori aussi intéressante, celle qui viserait à défaire les “alliances”, lors de la conjonction axiale. C’est précisément la période que nous traversons présentement, qui est de défaire le tissu, le réseau des alliances en en montrant le caractère factice ou dépassé, en faisant observer qu’elles ont fait leur temps, ce qui devrait conduire à terme à conclure d’autres alliances, sur de nouvelles bases. Il faut détruire pour reconstruire et vice versa. Là encore, il reviendrait aux politologues de dresser l’inventaire des alliances les plus compromises, les moins solides, celles les plus menacées par une épée de Damoclés, celles dont les composantes souhaitent le plus ardemment secouer leur joug, après avoir patienté souvent fort / trop longtemps. A l’approche de chaque changement de phase, il conviendrait de publier de tels inventaires en soupesant les chances des différentes alliances (telles que les institutions internationales, les blocs supranationaux etc.) de succomber ou de passer le cap sans trop de dégâts. En tout état de cause, mieux vaut prévenir que guérir.

   Toutefois, ces processus ne doivent pas être nécessairement perçus comme négatifs et devant être évités, il se pourrait, bien au contraire, qu’ils ont une fonction sélective et permettent d’éliminer les alliances les plus douteuses ou celles qui ne se justifient plus. De la même façon, un Etat incapable de nouer des alliances selon une nouvelle grille ne ferait-il pas la preuve de son apathie, se faisant ainsi distancer par d’autres Etats plus entreprenants ? Ce fut le cas de l’Allemagne nazie à la veille de la Seconde Guerre Mondiale qui sut s’arranger avec l’Union Soviétique au nez et à la barbe de la France et sur le dos de la Pologne, alors que l’alliance franco-russe avait été un des axes de la diplomatie française au XIXe siècle.5

   La question des alliances, au fond, c’est un peu le jeu des chaises musicales, il faut trouver un partenaire - la chaise - sinon on reste le bec dans l’eau. L’image des chaises musicales est d’ailleurs emblématique de l’astrologie axiale : la chaise, c’est l’étoile fixe et les joueurs sont les planètes. Or, l’astrologie actuelle n’a plus comme fixité que des “chaises” virtuelles permis par le découpage en douze signes ou en douze constellations, ayant renoncé aussi bien au découpage permis par les rencontres soli-lunaires que par les rencontres stellaro-planétaires et ce, probablement parce que parmi toutes les étoiles fixes, l’astrologie moderne n’a pas su repérer un axe central et a donc préféré s’articuler sur le point vernal déterminant, le signe du bélier ou sur une étoile de la constellation du bélier, selon qu’on est astrologue tropicaliste ou sidéraliste, ce qui est, pour l’astrologie axiale, blanc bonnet et bonnet blanc. On pourrait parler d’une ariésisation de l’astrologie (aries, en latin, signifiant bélier, mouton).

   L’ariésisation est liée à une erreur d’analyse: les astrologues de l’Antiquité ont cru que l’étoile Aldébaran n’avait été choisie que parce qu’elle avait correspondu dans un lointain passé au point vernal. Or, ayant découvert la précession des équinoxes, avec notamment le grec Hipparque (IIIe siècle avant notre ère), mais certainement bien avant, ils en conclurent qu’il fallait changer d’étoile-repère. L’axe Aldébaran-Antarès fut ainsi abandonné au profit d’un axe équinoxial (Printemps / automne) qui n’était plus lié avec des étoiles précises et déterminées une fois pour toutes.

   Mais l’ariesisation est porteuse d’autres stigmates, l’idée que le fait astrologique, c’est-à-dire le lien cosmique existant entre les hommes et les astres, puisse évoluer avec l’astronomie et ce jusqu’aux représentations les plus contemporaines. Que ce lien cosmique se soit établi sur des bases arbitraires voire fausses ne concerne guère une anthropocosmologie, laquelle ne doit s’assurer que d’une chose, c’est de la viabilité et de la vraisemblance du système ainsi mis en place, en une société et en un temps donné, ce que nous appelons un ethno-savoir.6 Il est assez évident qu’un tel lien cosmique (LC) avait besoin pour s’établir de signes faciles à décoder et que l’on ne pouvait imaginer que l’humanité passât vers des signes plus abstraits, ne correspondant plus à des corps célestes mais à des découpages purement mathématiques sans aucune visibilité. C’est ainsi que le fait même de proposer une astrologie zodiacalisée et déstellarisée revenait à la déconnecter de toute réalité anthropologique sans pour autant bien entendu que le lien cosmique fondateur ait pour autant disparu mais désormais il échapperait, pour longtemps, au méta-discours de l’astrologie dominante.

   Il convenait donc de restituer une ontologie du lien cosmique résistant aux ajustements des modernités successives dont certains croient, au nom d’une certaine phénoménologie, que l’astrologie est la résultante. Il existerait selon nous un lien cosmique établi une fois pour toutes et ce n’est d’ailleurs que selon une telle hypothèse que l’astrologie peut épistémologiquement être admise tant il est vrai que les sciences de l’Homme s’appuient sur ce qui est figé et non sur ce qui est mouvant, ce qui implique en l'occurrence de montrer que sous le mouvant de surface subsiste une strate fossilisée sur laquelle on peut s’appuyer. L’astrologie ne saurait exister sans l’existence d’un lien cosmique cristallisé.

Jacques Halbronn
Paris, le 8 mai 2003

Notes

1 Cf. notre étude sur l’astrologie et les révolutions du XVIIe siècle, site Cura.free.fr. Retour

2 Cf. Livre des prophéties, Intr. Michel Lequenne, Grenoble, Ed. Jérôme Millon, 1992. Retour

3 Cf. “Heurs et malheurs de l’astrologie mondiale”, Site Cura.free.fr. Retour

4 Cf. “De l’astrologie à l’astro-histoire”, Site Cura.free.fr. Retour

5 Cf. notre ouvrage, Le sionisme et ses avatars au tournant du XXe siècle, Feyzin, Ed. Ramkat, 2002. Retour

6 Cf. notre étude sur le Site Ramkat.free.fr. Retour



 

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