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ASTROLOGICA

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L’astronomie et l’avenir de la socio-histoire

par Jacques Halbronn

    A la différence de la plupart des chercheurs en astrologie, notre approche, depuis un certain temps, se veut transdisciplinaire et ne focalise pas exclusivement sur ce domaine.

   L’approche socio-historique nous semble être la mieux à même d’appréhender de comprendre le phénomène astrologique1, alors que l’approche psycho-philosophique, plus fréquemment empruntée, nous semble par trop se polariser sur le ressenti individuel, terrain qui, a priori, fait problème dès lors que l’on se situe, peu ou prou dans le registre prévisionnel, qui est d’ailleurs le seul à faire sens épistémologiquement.2

   Selon nous, en effet, il n’y a pas de science du particulier mais seulement du général, ou du moins d’un certain général, quantitativement significatif, au delà d’un certain seuil, d’une certaine masse critique. Autrement dit à quoi bon aller étudier le mouvement des astres pour connaître le destin d’un individu ? Il y a là, en quelque sorte, une contradiction dans les termes.

   Bien plus, nos recherches extra-astrologiques nous ont conduit à la conviction que pour parler d’un individu, pour se faire une idée de son comportement, pour l’anticiper éventuellement, il importait de le situer au sein d’un certain ensemble auquel il était censé appartenir. Un individu, dont on ignore tout des attaches est quelqu’un au sujet duquel on ne peut rien dire et c’est pourquoi même le devin se hâtera de relier, sans trop de risques de se tromper, son client avec tel ou tel groupe auquel cette personne paraîtrait pouvoir être associée sur le diagnostic et le pronostic qui en découle, y compris bien entendu son appartenance à un ou plusieurs signes zodiacaux ou autre catégorie astrologique plus ou moins pertinente C‘est à ce prix que l’on peut déterminer comment la personne étudiée est susceptible de se comporter.

   On voit donc quel peut être l’apport de l’interdisciplinarité au niveau de ce que l’on pourrait appeler la prévisibilité sociale, dont l’astrologie ne serait, selon nous, qu’un aspect singulier, qu’il s’agisse de la consultation individuelle ou de l’astrologie mondiale, avec cette différence que dans le premier cas, le rôle des astres, dans le processus prévisionnel efficace, est à peu près nul.3

   Non seulement, toute approche de l’individu passe par des signifiants sociaux plus ou moins interprétables et fiables, mais il faut aussi faire la part des mimétismes, qui constituent une tentative de la part de l’individu d’appartenir, avec plus ou moins de bonheur, à un groupe qui n’est pas, initialement, le sien. Cela aussi peut peser lourdement sur son identité individuelle, laquelle expression est quelque peu antinomique.

   C’est dire que l’astrologie, selon nous, ne relève pas d’une approche qui partirait de l’essentialité de l’individu pour aller par cercles concentriques vers sa dimension sociale mais bien l’inverse - et elle n’est nullement unique en son genre - partirait du général pour atteindre le particulier et, bien entendu, plus elle se rapprocherait du particulier et plus elle s’éloignerait de son champ de prévisibilité, devant progressivement, à mesure que l’on se concentre sur un cas pour tenter de l’isoler, renoncer à travailler sur les grands nombres et les probabilités qui en découlent.

   Conséquemment, si les structures sociales deviennent moins aisées à décoder, si les mutations politiques laissent perplexes, il y a crise des représentations donc des prévisions. Il semble bien que s’explique ainsi, de façon assez limpide, le déclin de l’astrologie à partir du XVIIe siècle.4 Tant que le monde était prévisible, l’astrologue pouvait prétendre prévoir, à peu de frais. Mais quand les mutations politiques et sociales devinrent trop importantes - notamment avec l'exécution du roi d’Angleterre, en 1649 - l’astrologue fut débordé et atteignit son seuil d’incompétence (selon le principe de Peter). Autrement dit, l’astrologie avait longtemps bénéficié du caractère relativement figé des structures socio-politiques, en un temps où il était aisé de prévoir - tout étant à peu près réglé immuablement - et lorsque celles-ci s’effritèrent, elle fut désarçonnée. Pour résister, il eut fallu qu’elle accomplît une révolution épistémologique, en redéfinissant et en repensant le concept d’événement de façon à montrer que le monde continuait, en dépit des apparences, à obéir à des lois bien précises, il eut fallu qu’elle accomplît le travail qui sera celui de l’Ecole des Annales, de la Nouvelle Histoire, à partir des années Trente du XXe siècle. Mieux vaut tard que jamais.

   Certes, l’astrologie individuelle fait-elle de nos jours plus recette que l’astrologie collective, sauf en ce qui concerne toutefois les horoscopes de presse, lesquels maintiennent le flambeau d’une astrologie pouvant prévoir à partir des appartenances des individus à tel ou tel signe. Deux stratégies bien différentes, on en conviendra et qui souvent se combinent syncrétiquement.

   Nous sommes en fait en face de trois formes d’astrologie qui n’ont en fait jamais cessé de cohabiter, tout en poursuivant des histoires différentes :

      1 - une astrologie du thème natal, propre à la consultation
      2 - une astrologie des douze signes, qui alimente les horoscopes de presse
      3 - une astrologie mondiale qui s’efforce d’annoncer l’avenir du monde.

   Les formes 2 et 3 relèvent d’une astrologie collective au sein de laquelle l’individu peut s’inscrire sans pour autant que les modèles utilisés ne prétendent l’appréhender dans son unicité, ce qui semble être l’ambition de la forme 1.

   Les formes 1 et 2 comprennent une part importante d’éléments astronomiques fictifs tandis que la forme 3 recourt pour l'essentiel directement à des corps célestes.

   Seule la forme 3 correspond réellement à une hypno-science, c’est à dire a pour objet d’étudier la réaction des sociétés à certaines configurations astrales (planétaires, stellaires). Toutefois, elle aussi parfois comporte des éléments astronomiques fictifs qu’il serait bon qu’elle évacuât résolument. Il reste que la forme 3 est la plus saine, la plus prometteuse et à terme la plus acceptable par la communauté scientifique.

   La forme 2 a pour elle de rappeler que l’astrologie a une dimension sociale, l’argument selon lequel il est inconcevable que des millions de gens, nés sous le même signe, devraient avoir le même destin, est spécieux. Il est clair que des millions de gens partagent grosso modo le même sort et d’ailleurs cet argument a justement été utilisé contre l’astrologie individuelle qui ne sait pas gérer le destin collectif. D’une certaine façon, le fait d’être conscient d’être né sous tel ou tel signe peut avoir une influence sur le psychisme des individus concernés et faire partie de leur image identitaire.

   La forme 1 est finalement la plus problématique: elle introduit une fausse représentation de l’astrologie, de sa vocation, elle inverse l’ordre des choses, partant de l’individu pour aller vers le collectif et non l’inverse. Elle est aussi la plus vilipendée par les astronomes et les anti-astrologues / astrologie, en raison du caractère hétéroclite du thème astral. Les travaux statistiques de Gauquelin s’inscrivent peu ou prou dans cette forme 2 mais selon une typologie planétaire et non plus zodiacale. A ce propos, les statistiques ne sont pas parvenu à valider la division en 12 signes alors qu’une division planétaire, fondée sur l’heure et le lieu de naissance semble plus prometteuse.

   Certes, la forme 3, publique, s’expose-t-elle à des échecs prévisionnels retentissants ou à des succès sans lendemain, ce qui n’est pas le cas de la forme 1, qui reste à un niveau privé. Il importe de repenser l’astrologie mondiale et de la concevoir dans une approche statistique, axée non sur une date mais sur une phase d’une certaine durée. La forme 3 puise ses informations dans les archives, dans la presse et peut remonter sur des siècles. La forme 1 repose sur ce que le client connaît de lui-même, ce dont il veut bien se souvenir, et permet peu de recoupements objectifs et sur la longue durée.

   L’avenir de l’astrologie, notamment sous sa forme 3 - du troisième type, si l’on veut - passe certainement par le progrès de diverses disciplines; l’astrologie n’est qu’une partie du puzzle. C’est précisément en raison de cette interdépendance avec d’autres domaines que l’avenir de l’astrologie est à peu près assuré, mais pas de n’importe quelle astrologie et certainement pas de la forme 1, prétendument la plus savante, la plus sophistiquée. C’est donc le retard pris par certaines investigations d’ordre socio-historique qui ne permet ni de vérifier l’astrologie ni de l’infirmer par manque de références. C’est pourquoi il est à souhaiter que les chercheurs en astrologie contribuent, au sein de structures interdisciplinaires, à la mise en place d’une science de l’organisation qui comprendrait les différents clivages et leurs fonctions qui agissent de façon hypnologique, ce que l’on pourrait appeler l’hypno-organisation.

   Car, que l’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas dans l’état actuel du savoir socio-historique que les prévisions astrologiques peuvent être testées - et encore moins le point de vue journalistique à chaud- tout comme d’ailleurs le client de l’astrologue est bien en peine de décider si ce qu’on lui dit est vrai ou faux, dans la mesure où il existe plusieurs strates de vérité fortement intriquées.

   Il est temps que chacun s’y mette : que les historiens, notamment, recourent à certaines grilles, relevant de la forme 3 et associant astronomie et série d’événements du même ordre. Ces grilles doivent être le plus dépouillées possible sur le plan astronomique - rien à voir avec la pléthore combinatoire de la forme 1.

   Mais dans l’immédiat, on ne peut qu’inviter les historiens et les sociologues à relever les grandes tendances et leurs durées, à cerner l’enjeu des alternances et des alternatives, notamment sur une base binaire, puis de les confronter avec des paramètres astronomiques récurrents et clairement définis.

Jacques Halbronn
Paris, le 2 juillet 2003

Notes

1 Cf. “Le problème de la cyclicité en sociologie”, Hommes & Faits, Faculte-anthropologie.fr. Retour

2 Cf. nos “Réflexions sur le Manifeste de P. Guinard” et “Du prévisible à l’imprévisible: l’astrologie comme méta-physique” in E. H., Ramkat.free.fr. Retour

3 Cf. notre brochure, L’astrologue face à son client, Paris, La Grande Conjonction, 1995. Retour

4 Cf. notre étude sur “l’astrologie et les Révolutions au XVIIe siècle”, sur le Site Cura.free.fr. Retour



 

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