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ASTROLOGICA

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L’astrologie comme hypno-savoir :
en réponse aux travaux de Geoffrey Dean

par Jacques Halbronn

    Quand on rencontre quelqu’un, pour la première fois, procède-t-on par induction ou par déduction ? A priori, nous dirons que ce serait plutôt par déduction, dès lors que nous relions la personne ainsi rencontrée avec un certain nombre d’appartenance qui paraissent lui convenir. D’ailleurs, dans l’absolu, le fait d’assigner à quelqu’un telle qualité ou tel défaut relève d’un raisonnement par déduction, fondé sur certaines apparences. Le fait d’être grand ou noir va donner naissance analogiquement à certaines représentations; la femme sera définie par le fait qu’elle porte les enfants et ainsi de suite. La pensée déductive est souvent marquée par un processus analogique voire symbolique. La graphologie ou la morpho-psychologie sont plus des savoirs déductifs qu’inductifs mais qui cherchent à se faire passer pour inductifs.

   Dans le cas de la littérature zodiacale, nous avons pu observer, ayant participé à plusieurs entreprises rédactionnelles (notamment chez Solar, en 1982) que le raisonnement est avant tout déductif, fondé sur ce que le signe évoque par association d’idée. Ainsi, savoir que quelqu’un est né sous tel signe peut autoriser certains à procéder à certaines déductions sur la personne en question dont on ne sait pas grand chose par ailleurs. Déduire signifie aussi soustraire - frais déduits - et en fait extraire. L’approche déductive est fonction de ce que nous appelons un certain nombre de signifiants sociaux que nous assignons d’emblée aux gens dont nous sommes amenés à faire la connaissance.

   Quel rapport, a contrario, l’astrologie aurait-elle avec l’induction dont le Larousse nous dit qu’il s’agit d’une “généralisation d’une observation ou d’un raisonnement établis à partir de cas singuliers” ? Un cas d’induction consiste à se faire une idée des femmes, en général, à partir de quelques exemples qui nous sont connus de femmes. Mais dans ce cas, une telle représentation des femmes n’alimentera-t-elle pas un raisonnement déductif, une fois notre idée sur celles-ci établie ? La déduction semble donc fonction de l’induction et vice versa, comme on l’a vu, nous ne connaissons les gens qu’au moyen de quelques généralités, quelques rapprochements avec des cas connus.

   Pour en revenir à l’astrologie, si je me fais une certaine idée des gens du Sagittaire à partir des personnes que j’ai connues qui sont nées sous ce signe, je procéderai par induction. Si, en revanche, je pars d’une théorie donnée concernant ce signe1 pour cerner la personnalité de quelqu’un, je recourrai cette fois à la déduction. Les deux approches semblent (co)exister dans le public : il y a ceux qui nous cite les gens de ce signe, dans leur entourage, et en tirent telle ou telle conclusion sans se préoccuper de ce qu’en dit la littérature sur le sujet et ceux qui utilisent cette littérature pour savoir à qui ils ont affaire, et là on serait dans une approche déductive, fondée au demeurant sur des prémisses assez douteuses épistémologiquement, à savoir la typologie zodiacale, mais dont on sait qu’elle peut avoir une certaine prégnance dans les esprits, comme l’a notamment montré le chercheur australien Geoffrey Dean (cf. infra).

   Maintenant, si l’on considère le thème astral, il semble que l’on cherche à nous empêcher de raisonner par déduction, quand on insiste sur la spécificité de celui-ci, sur les combinaisons multiples qui se croisent. Tout se passe comme si toute généralisation était ainsi entravée. Est-on pour autant dans une approche inductive ? Non, dans la mesure où précisément le thème ne serait pas généralisable. Oui, si à partir du thème, on s’engage dans des prévisions, dans des projections, dans des extrapolations, passant ainsi, tout de même, du connu vers l’inconnu.

   Le problème de l’astrologie reste néanmoins son excès déductif et son déficit inductif. En effet, l’astrologie, en raisonnant souvent par analogie, se situe dans une optique déductive mais c’est là une déduction qui n’est guère nourrie par l’induction.

   L’information astrologique se nourrit inductivement de raisonnements à partir du langage, du nom d’un astre, d’un signe, dont on tirera des “enseignements” symboliques alimentant un processus déductif assez artificiel.

   Dans le cas des travaux statistiques de Michel Gauquelin, il semble qu’il en soit autrement : c’est en partant de groupes homogènes, sur le plan professionnel, qu’il a pu constater certaines corrélations avec des positions planétaires non zodiacales mais liées au lieu et à l’heure de naissance et il en induit que cela constituait une preuve de la sensibilité de l’humanité à certaines configurations. Il n’est pas parti des signifiants planétaires, telles que représentés par la mythologie ou l’astrologie traditionnelle , mais des signifiés astronomiques.

   Entrons dans la polémique déclenchée par les travaux de l’australien de Perth, Geoffrey Dean, notamment avec Suitbert Ertel, de l’Institut de Psychologie de Göttingen, dans la célèbre revue Skeptical Inquirer (janvier-février 2003), dans un article intitulé “The Mars Effect cannot be pinned on Cheating Parents” (pp. 57 et seq), suivi d’une “Response to Ertel”, dans le même numéro, par Dean.

   La thèse de Dean est la suivante : les résultats statistiques obtenus par le Laboratoire Gauquelin tiendraient à une “purely social explanation of planetary effects”. La thèse d’une explication sociale de l’astrologie, liée aux mentalités de certaines populations fait écho à nos propres thèses, constituées d’ailleurs en tant que commentaire des travaux de Gauquelin2 qui ont été reprises par Arno Müller3, probablement à la suite d’un compte-rendu de notre travail par P. Curry, dans Correlation.

   En effet, les thèses en question se rejoignent autour de l’idée selon laquelle les astres n’agissent que parce que nous voulons bien qu’ils le fassent, ce qui implique que nous conformions nos comportements, y compris la fixation de la date d’accouchement4 à partir de certaines configurations célestes. Autrement dit, si les astres agissent sur nous, c’est que nous le voulons bien, que nous l’avons bien voulu.

   Ce qui nous distingue cependant des positions de Dean est ce que nous appelons désormais la notion d’hypno-savoir, en anglais nous proposerons hypno-cognition5 et la polémique actuelle Ertel-Dean sera l’occasion de préciser notre démarche.

   Par hypno-savoir, nous entendons la mise en oeuvre subconsciente d’un savoir initialement conscient et lié à une activité sociale propre à un nombre important d’acteurs. Autrement dit, même si consciemment et culturellement, nous ignorons comment évolue le ciel, à un niveau hypnologisé, c’est-à-dire passé au stade d’automatismes, ce savoir n’en joue pas moins un certain rôle.

   En conséquence, les travaux de Dean nous intéressent car celui-ci soutient que ces informations sont accessibles par le biais d’une certaine littérature astrologique populaire, de type almanach. Ertel, lui, exprime ses doutes sur cette explication et considère qu’avant la parution des travaux de Gauquelin, à partir de 1955, les configurations célestes mises en évidence par celui-ci ne pouvaient évidemment, avoir joué de rôle. Or, une grande partie des résultats Gauquelin sont liées à des naissances antérieures à cette date.

   Or, quand on accepte la thèse de l’hypno-savoir, déjà sous-jacente dans nos travaux et ceux de Müller, on dispose d’un nouveau modèle / paradigme explicatif. Notre position ne sera donc ni celle de Ertel, ni celle de Dean mais d’une certaine façon elle les conciliera l’une et l’autre.

   Nous pensons que les résultats de Gauquelin pourraient s’expliquer si l’on admet qu’il fut un temps, extrêmement éloigné, où les gens se comportaient de la façon que décrit Geoffrey Dean, tenant compte de certaines configurations célestes pour accoucher, selon un processus qui pouvait comporter une dimension socio-politico-religieuse voire être prescrit par la Loi. Il est possible aussi que ces opérations aient été alors supervisés par une caste de prêtres - astronomes, ayant le bagage nécessaire mais le dit bagage étant somme toute assez réduit, cela devait être à la portée des structures familiales. Le problème du calendrier, de façon plus générale, semble s’inscrire dans une même organisation du temps social.

   Au bout d’un certain temps, il est possible qu’on assista à un double phénomène: la culture astrologique s’estompa, on finit par se désintéresser du ciel en tant que référentiel social mais, par ailleurs, le processus se prolongea sur un plan subconscient, ce qui permit une continuité de fait dans les rapports avec le dit ciel. Cette théorie projective ne signifie nullement qu’il n’existe pas de liens entre les hommes et les astres mais que celle-ci n’existe, hormis le cas du soleil et de la lune, parce que les hommes l’ont souhaité; elle permet en outre d’expliquer que la connaissance consciente de l’astronomie n’est plus une condition nécessaire pour que les hommes agissent en tenant compte de certaines positions célestes.

   Nous sommes plutôt de l’avis de Michel Gauquelin, à savoir que si l’on empêche la naissance de se dérouler normalement - notamment avec les accouchements provoqués artificiellement - on entrave le processus, si bien qu’à ce moment là, la position des astres à la naissance n’est plus significative. Nous ne pensons pas que les astres agissent à la naissance mais que la mère porteuse se conforme hypnologiquement à une certaine lecture du ciel pour faire naître son enfant à un moment signifiant. De même, au niveau prévisionnel, nous ne supposons nullement une mémoire des positions astrales à la naissance qui serait réactivée par les transits, nous pensons que les êtres humains s’orientent en permanence par rapport à un certain parcours stellaro-planétaire. La naissance est un acte déterminé par les astres, en tant qu’événement mais les astres n’agissent pas sur le caractère de l’enfant qui naît, parce que la naissance reste un phénomène individuel, ce qui n’empêche pas qu’à un niveau collectif, la tendance globale des enfants - au regard du calcul des probabilités - à naître sous certaines configurations en rapport avec leur spécificité professionnelle virtuelle reste marquée. Mais la naissance n’est pas, selon nous, le seul événement fonction de certaines configurations astrales; autant la naissance est-elle un phénomène ponctuel qui peut éventuellement connaître des dysfonctionnements quant à la relation homme / astre, autant les phases de la vie, déterminées par la formation de certaines configurations s’accomplissent sur une longue période - on n’est plus alors dans une logique ponctuelle - et par conséquent sont infiniment moins dépendantes de certains aléas.

   Cette théorie rapproche, d’une certaine façon astrologues et anti-astrologues et offre une alternative à la représentation d’une humanité conditionnée inconsciemment par le ciel et découvrant progressivement cette influence, selon des méthodes plus ou moins empiriques. Pour notre théorie, l’état inconscient fait suite à un état conscient, c’est précisément ce basculement qui caractérise l’approche hypnologique. Il ne s’agit nullement ici de défendre la thèse encore la plus répandue parmi les astrologues et même parmi les chercheurs et les historiens de l’astrologie, selon laquelle les astres constitueraient un environnement qui s’imposerait à nous, à notre insu, sans qu’à aucun moment l’humanité n’ait joué un rôle actif, instrumentalisant, en ce sens. Le rapport des hommes aux astres est, selon nous, passé par une phase créatrice, de choix arbitraire de certaines données célestes alors disponibles - et certainement pas de toutes (!). D’où l’absence de Mercure, d’Uranus ou de Neptune, ces deux derniers astres n’ayant été découverts que relativement récemment (1781, 1846), pour ne pas parler de Pluton, dans les résultats Gauquelin. Les hommes ont pris au ciel ce dont ils avaient besoin, ni plus, ni moins.6

   Il importe donc peu que cette néo-astrologie gauquelinienne ne corresponde point avec l’astrologie traditionnelle, comme le souligne justement Ertel.. Cette néo-astrologie est en réalité une archéo-astrologie, expression d’un certain écosystème ayant existé, alors que l’astrologie traditionnelle est en décalage par rapport au dit écosystème et a surajouté divers éléments qui n’appartiennent pas à l’hypno-savoir céleste qui nous est transmis par des voies qui restent à préciser.

   Nous suivons certes Dean quand il s’efforce de montrer que la connaissance par une partie du public de certaines données astronomiques aurait permis aux statistiques de Gauquelin d’être signifiantes et nous pensons que ses explications sont utiles pour comprendre ce que fut le comportement de certaines sociétés dans une antiquité fort reculée. En revanche, la théorie de l’hypno-savoir contribue à renforcer la validité des travaux de notre compatriote, théorie que Gauquelin lui-même ne semble pas avoir envisagé.7

   On soulignera, pour finir, l’absence du zodiaque, dans les résultats positifs obtenus par Gauquelin, avec l’aide de son épouse, Françoise Schneider-Gauquelin. Nous pensons, en effet, qu’il s’agit d’une structure qui aura parasité l’astrologie pendant toute une partie de son Histoire et qu’il serait bon d’évacuer. Les travaux en astrologie mondiale conduits par André Barbault et par nous-même, ne viennent nullement réhabiliter ce fameux zodiaque, dont on a dit plus haut qu’il jouait un rôle majeur au niveau du raisonnement astrologique déductif.

   Force est de constater le gap entre l’astrologie traditionnelle et les recherches les plus rigoureuses en ce domaine. Un tel écart confirme à quel point la culture astrologique ambiante contemporaine ne saurait avoir d’effet sur la mise en évidence de certains résultats, lesquels relèvent d’une archéo-astrologie bien différente, ce qui explique, d’ailleurs, le décalage et le malentendu existant aujourd’hui, entre chercheurs en astrologie et astrologues. Si les travaux de Gauquelin ou les nôtres ont quelque valeur, c’est parce qu’ils sont la mémoire de très anciens comportements sociaux devenus inconscients et constituant un hypno-savoir nous conduisant à tenir compte de la formation de certaines configurations - non zodiacales - mais liées aux axes horizon-méridien à la naissance ou aux rapports planètes - étoiles fixes sur le plan des découpages temporels et des rythmes sociaux.

Jacques Halbronn
Paris, le 7 juillet 2003

Notes

1 Cf. notamment, notre ouvrage, Le Grand Livre du Sagittaire, avec S. Dessagne, Paris, Sand-Tchou, 1982. Retour

2 Cf “La pensée astrologique”, Histoire de l’astrologie, Paris, Artefact, 1986. Retour

3 Cf. S. Fuzeau-Braesch, L’astrologie, la preuve par deux, Paris, Laffont, 1992, pp.160 - 162, in “Planetary influences on Human behavior, too absurd for a scientific explanation”, Journal for Scientific Exploration, 4, pp; 85 - 104, 1990. Retour

4 Cf. notre étude, in Encyclopaedia Hermetica, Site Ramkat.free.fr, sur “les femmes et l’influence des astres”. Retour

5 Cf. la rubrique Hypnologica, in E. H.. Retour

6 Cf. nos travaux sur l’astrologie axiale, Encyclopaedia Hermetica. Retour

7 Cf nos études parues à la suite des Personnalités Planétaires, ouvrage de M. Gauquelin (1929 - 1991), paru, à notre initiative, après a mort, en 1992, aux Editions Trédaniel, Paris. Retour



 

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