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L’astrologie comme pseudo-science analogico-déductive |
Comment caractériser une fausse science, où commence la pseudo-science ? Il nous semble qu’il y a pseudo-science quand il n’y a pas eu préalablement à la déduction un travail inductif.
Prenons le cas de la graphologie, quelle y est la part de l’induction ? Elle nous semble bien faible. Entendons par là que la graphologie, fort utilisée pour le recrutement, nous semble fondée sur un processus analogique qui court-circuite le stade inductif. Si, par exemple, je dis que Mars est la planète de la guerre parce que c’est un astre rouge, là encore la dimension inductive est très médiocre. Entendons par là que pour dire cela, il n’a pas fallu de longues études concernant les effets de cet astre mais que l’on s’est contenté d’appliquer un principe, selon lequel Mars était liée à la guerre pour en tirer des conclusions. Bien plus, le nom de l’astre, à savoir ici Mars, peut lui aussi alimenter une démarche déductive.
En fait, quand le raisonnement est trop simpliste, il devient suspect car on pressent qu’il se nourrit de certaines apparences. Nous dirons donc que l’approche analogique aboutit à suppléer la carence inductive. L’analogie implique une forme d’extrapolation : on part de quelque chose d’incontestable mais d’un intérêt relatif, pour en tirer des conclusions exorbitantes. C’est ainsi que voulant traiter du psychisme féminin, on s’appuiera sur le fait que les femmes font des enfants et tout ce qu’on en dira devra découler de cet élément ainsi mis en exergue. On associera un animal noir avec l’idée de deuil, de mort, de mauvais augure et ainsi de suite.
Cette démarche analogique se substitue, par conséquent, à une démarche inductive, impliquant une expérience, une fréquentation et surtout l’observation suivie d’un phénomène donné.
Mais on peut trouver aussi un trait analogique dans le fait de traiter de la même façon, tous ceux qui font la même chose, sans tenir compte des autres éléments. L’analogie envahit l’objet étudié et en quelque sorte l’occulte, en le réduisant à un certain signe.
Un vigile chargé de ne laisser entrer que les hommes portant cravate fonctionne sur un mode analogique, dans la mesure où il se focalise sur le seul fait de porter une cravate, rien d’autre lui important.
La démarche analogique permet ainsi de réduire une réalité complexe à un facteur bien défini, ce qui permet de ne pas se perdre dans des cas particuliers, de ne pas suspendre indéfiniment son jugement, sa réaction. L’analogie facilite le monde. On peut dire qu’un outil a une perception analogique des choses.
Le langage se prête à l’analogie: tout ce qui peut être désigné par le même mot serait, selon une logique analogique, à mettre dans le même sac et à traiter pareillement.
On voit donc que l’analogie se paie de mots et plus généralement de signes. Le langage entretient un flux inépuisable d’analogies aussi réductrices les unes que les autres.
On peut certes décrire une population juive, selon les particularités d’un certain signifiant social mais cela ne signifie pas pour autant que l’on accède au signifié social correspondant. Le signifiant juif nous renseigne-t-il d’ailleurs sur le signifié juif ?
L’approche inductive est, selon nous, à caractère ontologique, elle vise l’essence des choses, ce qu’elles sont en soi, et non pas les apparences ou ce que nous voulons en faire.
Autant la démarche déductive ou analogique est simple, puisqu’elle assimile un élément inconnu à un ensemble connu, ce qui le rend prévisible, autant la démarche inductive qui conditionne la démarche déductive, implique-t-elle de partir de quelques cas dûment étudiés pour parvenir à une loi générale, à partir de laquelle on opérera des déductions. Celui qui passe au stade de la déduction suppose que le stade inductif est résolu.
Si on prend le cas de l’astrologie, on entend souvent des astrologues affirmer que l’astrologie s’est constituée sur des observations répétées, donc sur une démarche inductive alors que le plus souvent elle relève d’une approche analogique. Il y a là un tour de passe passe.
Cependant, dans le cas d’une instrumentalisation, on a affaire à une approche analogique qui épuise la chose visée laquelle va devoir se conformer à ce nouvel état, aux dépens de ses autres aspects. C’est aussi le cas de l’astrologie, lorsque tel astre est utilisé pour telle fonction, compte non tenu de son essence et sur la base d’une projection pouvant se nourrir d’une approche analogique.
L’instrumentalisation par conséquent réhabiliterait l’approche analogique en créant une réalité arbitraire mais qui, en devenant hypno-consciente, n’en constitue pas moins un certain niveau de réalité.
Il en est de même de l’instrumentation qui implique de ne percevoir les choses qu’au travers d’un certain prisme. Une fourchette peut servir à se saisir des substances les plus diverses, cela lui importe peu. Un signal d’alarme sonnera quel que soit l’intrus. Un gendarme sifflera toute voiture dépassant une certaine vitesse, sans s’interroger sur les circonstances atténuantes, ce qui sera le propre de la justice qui, elle, procédera davantage de façon inductive alors que la police procède de façon déductive.
En interrogeant la personne inculpée, les juges ne se contenteront pas de généralités, d’apparences, ils voudront savoir à qui ils ont affaire et ce que l’acte incriminé signifie pour cette personne. Ils auront donc une approche inductive de cette personne et finiront par s’en faire une certaine idée qui leur permettra de mesurer leur verdict. Nous dirons que les hommes sont plus près de la justice et les femmes de la police, ce qui correspond à l’opposition entre contextualité et prétextualité.1
A un autre niveau, on peut par exemple, se contenter d’observer que tel et tel appareil ne fonctionnent plus:on les mettra dans la catégorie hors d’usage. En réalité, les dysfonctionnements peuvent être très divers et rarement de la même gravité. Celui qui ne s’y connaît pas en électronique ou en mécanique, en sera réduit à dire cela ne marche pas ou cela marche tandis que celui qui s’y connaît saura pourquoi : parfois ce qui ne marche pas peut très vite se réparer et ce qui marche peut très facilement tomber en panne, en raison de l’usure notamment.
Nous avons tous besoin de fonctionner dans la déduction de façon à pouvoir prévoir. Si nous en sommes incapables ou si les lois que nous croyons pouvoir accepter sont douteuses, les choses ne se passeront pas comme prévu. La démarche analogique peut générer de telles surprises puisqu’elle prétend réduire une chose à un aspect plus ou moins secondaire, bien que réel et constitue ainsi une population en réalité fort hétérogène au sein d’un même ensemble. Du genre, tous les juifs sont comme ceci ou comme cela. Non pas qu’il soit interdit de discourir sur les juifs en général, mais cela ne signifie pas que tout ce qu’on dit sur les Juifs soit juste et donc applicable.
Face à des éléments inconnus, on est tenté de se fonder sur des analogies pour aller du connu vers l’inconnu, ce qui est le propre de la déduction. A l’inverse, l’induction partirait de l’inconnu pour s’acheminer peu à peu vers un certain état de connaissance, faisant en quelque sorte table rase, au sens cartésien du Discours de la Méthode.
Cette aptitude à procéder sans a priori, sans analogie facile, par la seule observation du phénomène considéré n’est pas à la portée de tout le monde à la différence de la démarche déductive qui part d’un certain bagage d’idées générales permettant de se faire une idée d’à peu près n’importe quoi, qu’elle soit vraie ou fausse important assez peu.
La consciencialité pourrait avoir à faire avec cette aptitude à voir les choses comme elles sont et non comme on voudrait qu’elles fussent. Il ne s’agit nullement de laisser entendre que chacun sait nécessairement ce qu’il est, étant donné que l’on peut très bien se percevoir au prisme d’un miroir déformant.
Il est préférable de dessiner d’autres tracés que d’adopter les tracés déjà existants. Celui qui ne retrouve dans une démarche prétendument inductive que ce qui correspond à une approche déductive est suspect, il tourne en rond. Il y a là un simulacre d’induction.
L’induction en effet doit être révolutionnaire, c’est-à-dire fait apparaître de nouvelles lignes de force insoupçonnées, sinon elle ne serait finalement que du mimétisme.
Mais pour parvenir à sortir des sentiers battus, la pensée inductive doit prendre son envol et surtout trouver en elle-même une rigueur qu’elle ne peut attendre d’en dehors d’elle-même. C’est là le cogito ergo sum cartésien.
C’est dire que certaines populations n’ont pas vraiment accès à la démarche inductive, qu’elle ne peuvent aller que du connu vers l’inconnu et non de l’inconnu vers le connu. Quand nous disons de l’inconnu vers le connu, le connu n’est pas ici ce que chacun savait déjà, il s’agit de ce qui est connu au regard de la conscience du chercheur et qu’il pourra poser comme loi, susceptible de servir, au bout du compte, de référence à la démarche déductive.
Il est au vrai évident que le monde ne peut fonctionner exclusivement en registre inductif, et qu’il s’appuie fortement sur des réflexes déductifs, qui assurent une certaine prévisibilité. En termes de vie et de mort, l’induction se situe du côté de la vie, de ce qui est en progrès, et la déduction du côté de la mort, de ce qui est acquis.
Répétons-le, la difficulté même de la démarche inductive encourage le recours à la pensée analogique, laquelle se présente comme une sorte de raccourci, cher à l’ésotérisme. Il y a là une tentation à laquelle il est parfois difficile de résister et ce d’autant plus que l’humanité s’est aussi construite sur certaines analogies et qu’elle en a fait des réalités à part entière.2
Il n’en reste pas moins, pour évoquer la question de l’astrologie, que la connaissance inductive des rapports entre hommes et astres passe par une certaine étude des rouages de l’Histoire et de la Société et non par des présupposés sur le fait que le système solaire tout entier serait pertinent au regard de l’hypno-savoir astrologique, et aurait vocation intrinsèquement à être en phase avec les hommes, ce qui relève d’une approche analogico-déductive dont nous avons dénoncé les effets.3
On peut parler de pseudo-science, à propos de l’astrologie, dès lors que son arsenal déductif ne comporte guère d’éléments inductifs, l’astrologie n’étant plus, de nos jours, que l’ombre portée de l’astronomie par rapport à laquelle elle se constitue sur un mode analogique. Or, face à cette astrologie analogico-déductive dominante, nous pensons qu’il existe une astrologie hypnologico-inductive.
Rien n’a plus déconsidéré l’astrologie, dans l’esprit des hommes de la fin du XVIIe siècle - on pense notamment au prologue de la Logique de Port Royal, que le fait que le public puisse s’imaginer que celui qui naît sous un certain signe puisse avoir les caractères de l’animal correspondant, alors qu’il est à peu près évident que les noms des signes ont été attribués arbitrairement. Or, l’envahissement de l’astrologie savante, au XXe siècle, par cette astrologie populaire - alors qu’auparavant ces deux astrologies avaient cohabité sans se mêler - n’a certainement pas contribué à améliorer l’image de l’astrologie dite sérieuse. De même, l’importance accordée par les astrologues à la mythologie est-elle un phénomène assez nouveau - alors que l’astrologie médiévale n’en avait cure - qui a mis en évidence le caractère excessivement analogique de la pratique astrologique moderne. C’est peut -être le résultat d’une pédagogie astrologique mal venue qui cherche à fonder la tradition astrologique sur des raisonnements simples, de type météorologique ou symbolique au lieu de se lancer dans une véritable recherche inductive, à la façon d’un Gauquelin.4 Déduire avant d’avoir induit, c’est mettre la charrue avant / devant les boeufs. Les astrologues se contentent d’affirmer que le travail d’induction fut certainement réalisé autrefois - peut -être par les bergers chaldéens, n’est-ce pas ? - et qu’ils se satisfont de recueillir le fruit de leurs observations. Dans ce cas, la question de l’induction astrologique serait renvoyée à la nuit des temps, à quelque époque antédiluvienne, sinon aux calendes grecques. Cela dit, il est vrai que les fondements de l’astrologie remontent effectivement à une époque fort ancienne, qui n’est nullement celle où l’astrologie telle que nous la connaissons s’est élaborée en tant que littérature.
Jacques Halbronn
Paris, le 12 juillet 2003
Notes
1 Cf. nos études sur Hommes & Faits, Site Faculte-anthropologie.fr. Retour
2 Cf. récemment notre débat avec Geoffrey Dean, autour de l’hypno-savoir, dans l’Encyclopaedia Hermetica, rubrique Astrologica, Pour une archéologie des savoirs astrologiques. Retour
3 Cf. nos études sur le Manifeste de P. Guinard, Encyclopaedia Hermetica. Retour
4 Cf. cependant nos réserves sur Encyclopaedia Hermetica concernant son recours à des classifications populaires. Retour
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