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KABBALAH

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La philosophie mystique du ARIZAL

   Dans tout son Enseignement, Rabbi Isaac Louria, plus connu sous l’appellation du ARIZAL, et disciple de Rabbi Moshé Cordovéro, a tenté d’expliquer le passage de l’Incréé au Créé, et donc la véritable origine physique de l’Univers. Le Visionnaire (au sens noble du terme) de Safed a proposé à la sagacité et à la perplexité des hommes de son siècle et du nôtre, de bien curieuses théories, audacieuses s’il en est, et il n’est pas impossible que l’Astronomie de demain puise de nouvelles interprétations du Drame cosmologique dans les intuitions géniales de notre kabbalistes du XVIe siècle.

Le Tsimtsoum

   Selon la théorie cosmologique originale du Arizal, la Divinité se retire en un Lieu (Maqom) afin de laisser une Place libre pour le Monde. Cet Espace primordial ainsi créé (ou libéré) deviendra, lors d’un développement ultérieur, notre espace tridimensionnel auquel sera ajouté la dimension temporelle. Ce fut en quelque sorte le Premier Geste de Dieu que le Maître de Safed définit comme un Exil de la Divinité au plus profond d’Elle-même.

   Les kabbalistes du XIIIe siècle avaient interprété les premiers mots du Sépher Yetsirah (ou Livre de la Formation) en introduisant la subtile notion de Tsimtsoum, c’est-à-dire une Réduction de la Lumière divine. Pour le Arizal, le Tsimtsoum n’est plus une Concentration de Dieu en un Lieu, mais son Retrait hors d’un Lieu, ou encore en “Sa Solitude”, pour utiliser l’expression fine du Zohar.1

   Le Arizal défini donc la notion complexe de Tsimtsoum comme une sorte de Retrait de la Divinité dans Sa propre Intériorité. En d’autres termes, Dieu s’est replié sur Lui-même pour faire jaillir le Fini (notre Monde) de l’Infini (Ein-Soph) ; en utilisant une autre image, également imparfaite puisque notre vocabulaire est impropre à décrire ce type d’événement, Dieu s’est en quelque sorte exilé volontairement pour faire subsister le Monde fini.

   Dieu fit ainsi une Place pour le Monde, en abandonnant une Région à l’intérieur de Lui-même, une sorte d’Espace mystique duquel Il se retira pour y retourner cependant, dans l’Acte de la Création. Pour utiliser le langage de l’électronicien qui analyse le fonctionnement interne des jonctions semi-conductrices, on dira qu’Il crée un Trou. A partir de cette Absence, Dieu créa le Monde2 : les Ténèbres ont précédés la Lumière3, comme la Nuit précède la Journée dans le Calendrier hébraïque. Le Arizal donne ainsi, si nous l’avons bien compris, une explication cohérente de la création dite ex-nihilo, Beriah Yesh MeAyin, une Création de la Réalité à partir du Néant.

   Après le Retrait originel, un Résidu de Lumière divine, que l’on appelle Reshimou, reste à l’intérieur de l’Espace primordial produit par le Tsimtsoum, même après le Retrait de l’Essence de l’Ein-Soph.

   Le processus cosmique comprend ainsi deux phases essentielles : une lumière qui jaillit de l’Essence divine et une lumière qui revient en Dieu, telle une vibration électromagnétique ou un mouvement perpétuel oscillatoire, pour utiliser à nouveau une image moderne. Chaque manifestation divine est précédé par un Acte de Concentration ou de Rétraction (Histhalqouth), avant une phase de Dilatation ou Extension (Hithpashtouth). De même que l’Etre humain ne peut vivre que par le double processus d’inspiration et d’expiration, le Mouvement divin dans l’Acte de création constitue un processus analogue d’Inspiration et d’Expiration divines, pour nous qui sommes à l’ “image” de Dieu : l’expansion de l’Ein-Soph dans l’Espace libéré par le Tsimtsoum n’a-t-il pas donné aux Astronomes modernes l’idée de leur théorie de l’expansion de l’Univers ?

La Shevirath HaKelim

   A partir du Tsimtsoum, la Lumière divine a jaillit dans l’Espace primordial et a donné naissance à l’Univers.

   Le Arizal chercha une explication à l’état de souffrance physique et morale de l’Exil (Galouth). Il rechercha l’Origine du Mal et la trouva dans la conception mystique de la Shevirath HaKelim (ou Eclatement des Vases).

   Après avoir produit le Tsimtsoum, dans le but de créer l’Univers, la Lumière divine, nécessaire et suffisante à l’existence du Monde, fut confiée à des Kelim (Vases) émanés de la Divinité, et qui sont les Sephiroth que Dieu plaça dans le Maqom qu’Il avait libéré par son Retrait.

   Les Kelim qui correspondent aux Trois premières Sephiroth, les plus rapprochées de la Source de l’Ein-Soph, accueillirent la Lumière dont Ils furent imprégnés. Cependant, les Kelim des Six autres Sephiroth, trop éloignés de la Source et par conséquent de nature moins spirituelle, ne purent résister à la Lumière qui jaillit en un seul flux. Le choc fut d’une violence telle que les Kelim se brisèrent aussitôt.

   Les Débris de ces Vases se répandirent dans la Totalité du Néant. Ils emportèrent avec eux autant de Particules de Lumière primordiale : les Netsoutsoth ou Etincelles.4

   Ces Fragments des Vases brisés et les Etincelles de la Lumière divine pénétrèrent dans l’Obscurité de la Réalité matérielle, et ces dernières se sont trouvées revêtues comme d’une sorte d’Ecorce ou Klipa. Tous les Mondes, dont le nôtre, furent affectés par ce Désordre Cosmologique.

Le Tikkoun

   Avec la nécessité de la Shevirath HaKelim, le pouvoir du Mal se sépare du Bien et de son Existence réelle. Les éléments maléfiques ou Klipoth furent mêlées aux Lumières des Sephiroth, ainsi qu’au Rehimou, le Résidu de l’Ein-Soph dans l’Espace primordial.

   Cependant, l’Homme a la capacité, par son Action (’Avodah), de réunir les Etincelles dispersées et de restaurer les Mondes ébranlés.

   Pour que l’Homme accomplisse le Bien, il faut qu’il soit en mesure de l’opposer au Mal. Il ne peut donc apprécier le Bien (Lumière) qu’en le distinguant du Mal (Ténèbres), ainsi que nous le rappelle le 4ème verset du 1er chapitre de la Genèse.

   De même, il est écrit : “Dieu forma (va-iitser) l’Homme”.5 Le mot va-iitser, précise le Talmud6, contient deux fois la lettre Yod. Les Rabbanim expliquent que Dieu a créé deux penchants dans l’Homme : l’un pour le Bien, l’autre pour le Mal. Sans la tentation du Pêché, sans la tension (ou les passions) qu’il éprouve à l’intérieur de lui-même, l’homme ne saurait accéder à la Paix véritable.7

   Dieu a voulu la Shevirath HaKelim et l’ébranlement des Mondes, car Il avait créé auparavant la Techouvah, élément dominant du Yom Kippour, le Retour spirituelle vers Dieu.

   La Chute des Mondes et la Chute de l’Homme ont entraîné la Dispersion, l’Exil (Galout) de nombreuses Etincelles de Lumière divine. Elles errent de par le Monde, telle la Shekhinah, Divinité présente ici-bas, et qui maintient le Monde matériel sur ses Fondations.

   C’est en respectant la Thorah, c’est-à-dire en réalisant le Bien, que l’Homme obtiendra la Réunion des Etincelles divines. La Restauration (spirituelle) de l’Homme va consister essentiellement à libérer les Etincelles captives.

   Après avoir exposé sa théorie sur l’Eclatement des Vases, la racine du Mal, le Arizal suggèrera la Réparation des fautes ou Tikkoun, dont l’objet sera de redresser l’Oeuvre de la Création. Le But de l’Univers créé réside ainsi dans la Restitution (ou Tikkoun) de l’Etat primitif originel à l’avènement messianique. La venue du Messie (Mashia’h) est en effet liée à cette ultime étape.

Robert Benazra
Tichri 5761

Notes

1 Cf. Zohar (I, 15 a). Retour

2 D’après le verset d’Isaïe (XLV.7), qui évoque la création des Ténèbres et du Mal, on peut déduire que le mal se manifeste sous la forme d’une absence de bien. Et c’est la raison pour laquelle, la Création cosmique est une création “à partir du néant”. Retour

3 Cf. Genèse (I, 2&3). Retour

4 Dans son ouvrage Ets ’hayim (XVIII.1), Haïm Vital, le disciple du Arizal, a précisé que la Lumière s’est diffusée en 288 Etincelles. Retour

5 Cf. Genèse (II.7). Retour

6 Cf. Bérakhoth (61 a). Retour

7 Cf. Zohar (I.23 b, 138 a, III.61 a). Retour



 

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