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ANTISEMITICA

7

L’élaboration de mythes pseudo-théologiques,
à partir du Talmud et du Choul’han Aroukh

par Robert Benazra

   La présente étude fait suite à la publication par nos soins de la deuxième partie de la thèse universitaire de Jacques Halbronn. L’ouvrage de l’historien de l’Esotérisme est ainsi consacré au Sionisme et ses avatars au tournant du XXe siècle, et comporte essentiellement deux études approfondies, une sur le Judenstaat de Théodore Herzl et l’autre sur le Prologue qui introduisit les Protocoles des Sages de Sion (PSS). Une des thèses principales de notre auteur, c’est que les Protocoles, pour forger le mythe d’une “conspiration juive mondiale”, se sont fortement inspirés des Actes des premiers congrès sionistes, vers la fin du XIXe siècle - qu’on appelait d’ailleurs “protocoles” - associés à un antitalmudisme primaire, hérité du Moyen-Age. Pour conforter cet antijudaïsme, les auteurs anonymes du pamphlet ont apporté un certain nombre de citations - diffusées notamment par des Juifs convertis, plus ou moins lettrés, vers le milieu du XIXe siècle - dans lesquelles notamment, “les Juifs traitent les Gentils comme des animaux”, etc.

   Il n’est pas dans notre intention de faire ici une étude complète sur la manière dont les non-Juifs (ou GOYIM1) sont “traités” dans les ouvrages législatifs des RABBANIM (ou rabbins érudits), qu’il s’agisse notamment du TALMUD, ouvrage le plus attaqué par les détracteurs du peuple juif, lesquels sont généralement dépourvus d’un quelconque bagage sur la connaissance des doctrines talmudiques, ou du CHOULKHAN AROUKH, ouvrage de prédilection, résumé beaucoup plus accessible pour la plupart des lettrés chrétiens qui se sont intéressés au Judaïsme, ou plus exactement qui ont recherché dans les doctrines juives de quoi alimenter une haine dont les causes réelles se perdent dans la nuit des temps. La Théologie fait partie de ces sciences humaines dont on ne peut parler et discuter sérieusement qu’entre initiés, un peu comme certaines branches ardues des Mathématiques, telle la Théorie des groupes par exemple, et qui ne sont pas accessibles au commun des mortels sans initiation préalable. Et “se mettre dans le contexte de l’époque” ne suffit pas toujours pour comprendre un état d’esprit dont la “cartographie” du langage même semble totalement désuète relativement au schéma linguistique utilisé par l’individu d’aujourd’hui.

   Dans le texte russe, qui a servi de préface à la 1ère édition des Protocoles des Sages de Sion, on trouve plusieurs références chiffrées du Talmud et du Choul’han Aroukh (Even Ha’Ezer, transcrit Eben-Gaezar et Orakh ’Haïm transcrit Khopaïm, etc.). Jacques Halbronn a retrouvé la quasi-totalité des sources du Talmud et du Choul’han Aroukh contenues dans les nombreuses versions protocoliennes du faux antisémite, dans un ouvrage allemand de 1884, une sorte de Critique du Judenspiegel de Justus Briman, par un certain Dr. Jacob Ecker.

   La recherche de Jacques Halbronn s’arrête ici, mais en tant qu’éditeur de ces textes “sensibles”, il m’a semblé utile de donner au lecteur, dans cette brève étude, quelques éléments de compréhension, notamment sur l’usage des citations talmudiques pour d’une part, compléter la thèse d’Halbronn, et d’autre part, apporter quelque lumière au lecteur néophyte, qui prendrait au pied de la lettre les dites citations. J’ai auparavant vérifié que ces citations (reproduites ci-après dans le texte original) étaient bien celles contenues dans les éditions courantes du Talmud et du Choul’han Aroukh.2 Avant de situer toutes ces citations, à partir des textes originaux tirés de la littérature talmudique, de les traduire et d’en expliquer le sens, tel que la tradition talmudique l’entend, nous voulons analyser brièvement les causes de l’antisémitisme, dont la résurgence inquiète certaines composantes de la communauté juive occidentale.

   Il y a plusieurs causes à l’explosion antisémite à la fin du XIXe siècle en Europe. Mais le facteur essentiel, à mon sens, et qu’on doit nécessairement prendre en considération pour tenter une explication raisonnable du phénomène de judéophobie, est lié à la pure calomnie et à l’invention d’un mythe spécifiquement chrétien à la base, devenu un archétype qui hante les consciences universelles.

   C’est la naissance du nationalisme qui a exacerbé à un très haut degré la xénophobie populaire, et bien évidemment, les Juifs - bouc émissaire idéal - en furent les premières victimes. L’essor formidable du Socialisme, qui allait de pair avec une nouvelle vision économique du monde, reportait sa haine indescriptible sur les banquiers juifs, en particulier sur l’un d’entre eux, Rothschild. Le Juif était un étranger pour le xénophobe européen, mais il était aussi un “parent” de Rothschild pour le prolétaire !

   Au tournant du XXe siècle, le Juif, doublement honni, va être caricaturer jusqu’au grotesque. Et les antisémites les plus cultivés vont rechercher dans les textes législatifs des Juifs, des passages, qui une fois sortis de leur contexte, vont perdre leur signification ontologique. La vulgarisation de textes mal interprétés, dans la hâte de nuire, va conduire à l’élaboration du mythe de la “conspiration juive”, prenant le pas sur le reproche de déicide de l’antisémitisme chrétien d’origine. On va s’efforcer de démontrer que les Juifs jouissent d’une immense influence sur les rouages du monde. Dans cette quête, la raison semble des plus absente au profit d’un ésotérisme de façade. Dès 1869, l’expression “judéo-maçonnique” de Gougenot des Mousseaux, sera popularisé, une quarantaine d’années plus tard, par Mgr. Jouin.

   Les antisémites vont désormais s’appuyer sur une explication quasi manichéenne de l’histoire, en invoquant, à l’appui de leur doctrine des documents historiques, notamment les fameux Protocoles des sages de Sion - vulgarisés quelques décennies plus tard par le Mein Kampf d’Adolf Hitler3 - ou même des notions hébraïques comme par exemple le Kahal, détourné de son sens par le Juif converti Jacob Brafman au début de la IIIe République, un terme propagé officiellement par le gouvernement russe, vers la fin du XIXe siècle, ou encore le terme goy qui par le même processus d’appropriation aura un succès médiatique plus prononcé et durable.

   Le rejet du peuple juif, qu’un Edouard Drumont, auteur de la France juive, appellera le “peuple de Satan”, est un dogme pseudo-théologique et une constante de l’antijudaïsme chrétien. Il nous faut ainsi remonter à l’historien Flavius Josèphe qui notait, à propos des Egyptiens, que “notre piété diffère de celle qui est en usage chez eux, autant que l’être divin est éloigné des animaux privés de raison”.4 Josèphe reproche à Apion d’avoir inventé ce que nous retrouverons dans les PSS : “Il forge aussi un serment par lequel, prétend-il, en invoquant Dieu (…) nous jurons de ne montrer aucune bienveillance envers l’étranger…”5 Le mythe était en route et se forgera inlassablement au cours des siècles.

   Les antisémites n’ont donc pas hésité à exploiter les passages littéralement rendus par le Talmud, notamment, pour accentuer ce reproche séculaire au peuple juif de sa haine du genre humain, à la dureté de sa loi - de la loi de ce peuple qui donna pourtant naissance au Jésus des Chrétiens, “un peuple qui demeure à part et qui ne peut être pensé parmi les nations”.6 Ainsi, l’antisémite présuppose une hostilité naturelle du Juif envers le non-Juif. Mais l’histoire de l’humanité ne montre-t-elle pas que c’est le peuple juif qui a été persécuté ?

   Le peuple juif est un peuple rebelle, voilà sa vraie nature : une rébellion contre ceux pour qui l’instinct de survie serait le but essentiel de la vie, une rébellion contre la non-soumission au Créateur de l’Univers, une recherche permanente des “règles” de fonctionnement du monde tant matériel que spirituel, une quête permanente de l'indicible raison d'être.

   Nous voulons ici rappeler le caractère particulier des recueils de textes rabbiniques qu’on a rassemblé sous le nom de Talmud. Il ne s’agit point d’une école de haine envers les non-Juifs, comme l’a répété pendant des siècles un virulent antitalmudisme, l’équivalent intellectuel de l’antijudaïque, devenu par la suite un pure produit démagogique avec l’antisémitisme, dont on observe aujourd’hui un surprenant renouveau associé à un antisionisme médiatique, qui se confond parfois avec un antimondialisme, voire un antiaméricanisme de circonstance : il s’agit toujours et encore de trouver un responsable aux malheurs de la planète, sans faire l’effort de comprendre, et surtout en exonérant habilement ceux vers qui devrait être tourné la réprobation générale : l’ignorance n’est-elle pas sœur du malheur des peuples ?

   Tous les passages relatifs aux non-Juifs, et rapportés avec un malin plaisir, parfois par des Juifs renégats, ne devraient pas être ressortis de leur contexte, sans une “prise de conscience”, car il s’agissait pour les Rabbanim de se conformer aux prescriptions halakhiques7, c’est-à-dire à l’orthodoxie religieuse, notamment vis-à-vis des mariages mixtes et également de résister aux tentations syncrétistes issues de la fréquentation avec les non-Juifs.

   L’athéisme, c’est-à-dire la négation - quelque part dogmatique - de l’existence d’une divinité, de la croyance en un Dieu unique, est certainement la source de toutes ces réflexions rabbiniques, que d’aucuns ont pu considérer comme blessantes ou insultantes à leur égard. Celui qui conteste l’existence d’un Créateur, ou plus exactement, celui qui refuse de croire qu’un esprit supérieur, même s’il existait, se soit intéressé à l’existence matérielle de ses créatures8, est nommé dans le Talmud, APIKOROS (ou “Epicurien”, par transfert linguistique), celui dont seule la perspective matérialiste, dans la recherche exclusive des plaisirs matériels lui procure une certaine satisfaction. L’exemple moderne de cet épicurisme a donné au philosophe juif Karl Marx de quoi alimenter ses thèses matérialistes. L’Epicurien nie donc le principe même de la religion, ce que les Rabbanim - dont rappelons-le, le “rabbi” Jésus de Nazareth (selon les Evangiles eux-mêmes) - ne pouvaient évidemment point admettre.9

   En ce qui concerne toutes les interdictions contenues dans la Thorah, les Rabbanim enseignent : si on dit à un Juif : “Transgresse ces lois, et tu auras la vie sauve”, le Talmud (Sanhédrin 74 a) nous dit qu’il peut y consentir pour éviter la mort, à la condition expresse de ne commettre aucun des trois “péchés capitaux” suivants : AVODA ZARA (littéralement “culte des idoles”), c’est-à-dire l’idolâtrie, GUILOUILLE ARAYOTH (littéralement “révélation de la nudité”), c’est-à-dire les relations sexuelles illicites et CHEFIKHOUT DAMIM (littéralement “effusion de sang”), c’est-à-dire le meurtre, pour lesquels un Juif devra préférer la mort plutôt que la transgression de ces interdits.

   Parmi les 613 Commandements qui incombe au Juif, le seul qui concerne directement notre relation avec un non-Juif est justement celui du devoir d’aimer l’étranger. La Thorah ordonne aux Juifs, en effet, de ne pas faire souffrir l’étranger de quelque manière que ce soit, et au contraire d’être toujours bienveillant envers la personne qui le représente, indépendamment de ses idées. Dans la Thorah, on appelle GUER toute personne originaire du peuple non-juif, et venu se joindre au Rassemblement d’Israël (QAHAL). C’est en parlant de lui que le texte dit : “Vous aimerez l’étranger”.10

   Le non-Juif n’est pas tenu d’observer les lois alimentaires (KACHEROUT) que la Thorah stipule. C’est pourquoi, le Juif de la Thorah (généralement, mais pas toujours, celui qu’on nomme aujourd’hui “juif religieux”) ne fait pas participer le Goy au repas de PESSA’H (Pâque), par exemple. Nous lisons dans un verset de l’Exode (XII, 43) : “nul étranger n’en mangera”. Selon les Rabbanim, il s’agit de toute personne dont les actions sont comme étrangères à l’égard du Dieu de la Thorah. L’interdiction des Rabbanim, à la participation de Goyim au repas de Pessa’h, est inspirée par l’idée que le sacrifice de l’agneau pascal doit rappeler aux Hébreux et à leurs descendants leur libération, suivie de leur entrée dans l’Alliance du Sinaï, et donc, seuls ceux qui font partie de cette Alliance11, et qui l’ont accepté, pourront y participer, nous enseigne le traité talmudique de Shabbath (96 b).

   Après ces préliminaires, nous allons fournir pour chacune des références rabbiniques citées - le texte hébreu contenu dans la Critique du Judenspiegel par Jacob Ecker dont Jacques Halbronn a montré qu’il s’agissait de la source même des citations dont se sont nourries les versions primitives des Protocoles des Sages de Sion - la référence tirée des éditions courantes du Talmud et du Choul’han Aroukh. La traduction des passages talmudiques est relativement délicate, en ce sens qu’une traduction mot à mot donnerait des textes quasi incompréhensibles. Pour nous aider dans cette tâche, nous avons fait appel aux connaissances talmudiques de M. Yaniv PEREZ.

   Dans les ouvrages rabbiniques, on désigne parfois l’idolâtre par l’abréviation (AKOUM), c’est-à-dire, littéralement en hébreu : “Celui qui se prosterne devant les étoiles et les constellations“ : c’est donc le “païen”, proprement dit, qui est visé, et par extension, le “non-Juif”.

   Les propos rabbiniques concernant l’AKOUM vise donc tout simplement l’idolâtre. Cela apparaît déjà dans le 1er Commandement divin : “Tu n’auras point d’autre Dieu”. L’Eternel est un Dieu “jaloux”, nous rappelle-t-on, d’où ces multiples allusions négatives à l’égard de ceux qui vénèrent les étoiles, et par extension, toutes formes d’idoles et leur “fan club”. Les Rabbanim font cependant une nette distinction avec ceux qui étudient les étoiles.

   Nous avons dit précédemment que dans la Thorah il y a 613 MITSVOTH (ou Commandements), soit 248 commandements dits positifs (Tu feras) et 365 Commandements dits négatifs (Tu ne feras pas). Les 30 premiers Commandements négatifs concernent l’idolâtrie et les cultes païens, et les 29 suivants, la sorcellerie et les relations avec l’idolâtre12, c’est dire l’importance pour le Juif des prescriptions divines de la Thorah, l’Ancien Testament des Chrétiens.

   Le Samaritain (KOUTI) est un Juif qui ne se réfère, en substance, qu’à la loi écrite, essentiellement la Thorah et le Livre de Josué. Les KOUTIM (pluriel de KOUTI) ont leurs propres prophètes qui ne sont évidemment pas reconnus par les Juifs “de la première heure”. A l’origine, on considérait les KOUTIM comme des Juifs, quoi qu’on s’en méfait certainement. On peut donner cet exemple, repris du Talmud : on ne pouvait répondre “Amen” à une bénédiction prononcé par un KOUTI que seulement si on entendait la totalité de la bénédiction, car on craignait, parfois à juste titre - et l’histoire allait donner raison à ses détracteurs - que cette bénédiction ne soit dédiée à une divinité étrangère. Et en effet, cela a duré jusqu’au jour où l’on a découvert que les Samaritains adoraient en secret une divinité en forme de colombe. A partir de ce jour, les KOUTIM ont été considérés comme des non-Juifs à part entière.13

   Le Talmud distingue le KOUTI du Juif orthodoxe ou rabbinique, et les quelques réflexions désobligeantes qu’on peut trouver dans les nombreux traités talmudiques s’adressent d’ailleurs autant aux Samaritains qu’aux non-Juifs.14

I - Le Choul'han Aroukh

1ère référence

Even Ha 'Ezer (16,1)

Judenspiegel / Even Ha 'Ezer 16,1
Version du Judenspiegel

Choul'han Aroukh / Even Ha 'Ezer 16,1
Version du Choul'han Aroukh

   Traduction et interprétation :

   “Le Juif qui contracte un mariage avec une Samaritaine, ou bien une Juive qui épouse un Samaritain15, ne sont pas reconnus du point de vue de la Thorah, ainsi qu’il est écrit : Tu ne contracteras point de mariage avec eux”.16

   On notera que l’auteur de la critique du Judenspiegel, utilise indifféremment, dans sa transcription des textes, le mot AKOUM à la place de celui de KOTI. On part ainsi, dans les textes authentiques, d’une expression particulière (le Samaritain, d’origine juive, rappelons-le) pour aboutir dans un texte à usage propagandiste, à une forme aussi généraliste que celle de AKOUM !17

2ème référence

Even Ha 'Ezer (44,8)

Judenspiegel / Even Ha 'Ezer 44,8
Version du Judenspiegel

Choul'han Aroukh / Even Ha 'Ezer 44,8
Version du Choul'han Aroukh

   Traduction et interprétation :

   “Le mariage rituel [d’un Juif avec] une Samaritaine ou une esclave [non juive] n’est pas valable. De même, le mariage rituel d’un Samaritain ou d’un esclave avec une Juive n’est pas admis.”18

   Ainsi, pour un Juif qui contracte une alliance (charnelle ou autre) avec une KOUTITE ou une esclave (non-juive), le mariage ne sera pas pris en considération, car les partenaires ne sont pas aptes à recevoir les KIDDOUCHIN. Quant bien même les KIDDOUCHIN seraient établis, le mariage ne serait pas valable du point de vue de la Thorah. Et il en est de même avec un KOUTI ou un esclave qui a contracté un mariage avec une Juive.

3ème référence

Orakh 'Haïm (14,1)

Judenspiegel / Orakh 'Haïm 14,1
Version du Judenspiegel

Choul'han Aroukh / Orakh 'Haïm 14,1
Version du Choul'han Aroukh

   Traduction et interprétation :

   “Règles concernant les Tsitsith (franges rituelles) faits par un AKOUM ou par une femme :
Les Tsitsith fait par un idolâtre (AKOUM) ne sont point valables, comme le confirme l’Ecriture : Parles aux Enfants d’Israël…19 à l’exclusion des idolâtres…”.20

II - Le Talmud (dit de Babylone)

4ème référence

Yevamoth (61 a)

Judenspiegel / Yevamoth 61 a
Version du Judenspiegel

Talmud / Yevamoth 61 a
Version du Talmud

   Traduction et interprétation :

   “La tombe de l’AKOUM21 ne rend pas impur22 avec OHEL23, parce qu’il est dit : Quant à vous, vous êtes mon troupeau, le troupeau que je fais paître, vous êtes des hommes.24 On en déduit : vous, vous êtes appelé ADAM25, mais l’AKOUM n’est pas appelé ADAM.”

   Ainsi, cette loi, qui provient directement des textes de la Thorah, nous dit que seul celui qui est appelé ADAM rend impur avec OHEL.

5ème référence

Yevamoth (98 a)

Judenspiegel / Yevamoth 98 a
Version du Judenspiegel

Talmud / Yevamoth 98 a
Version du Talmud

   Traduction et interprétation :

   “Thorah a rendu HEFQER (non valable)26 le sperme de l’idolâtre parce qu’il est écrit : dont la chair est celle des ânes et le sperme celui des chevaux”.27

   Le problème de la Guemara, pour résumer le plus schématiquement possible, c’est de savoir si pour deux frères qui ne sont pas juifs et qui se sont pas convertis, on peut leur appliquer la loi de IBOUM et HALITSA.28 Même si ce sont des frères jumeaux (et donc le problème de la fraternité ne se pose pas), la loi de IBOUM et HALITSA n’est pas applicable sur eux. Alors le Talmud déduit de là la non-validité du sperme d’un idolâtre.

6ème référence

Qiddouchin (68 a)

Judenspiegel / Qiddouchin 68 a
Version du Judenspiegel

Talmud / Qiddouchin 68 a
Version du Talmud

   Traduction et interprétation :

   “Rabbi Hona dit : D'où sait-on [que lorsqu'on contracte une alliance avec une non-Juive, le mariage n'a aucune valeur juridique] ? Il est écrit dans la Thorah : Restez là avec (IM) l'âne29, un peuple (AM) qui ressemble à l'âne.30 On en déduit que les KIDOUCHIN ne sont pas valables avec une esclave non-juive.”

7ème référence

Sanhédrin (105 a)

Talmud / Sanhédrin 105 a
Version du Talmud

   Rappelons que cette citation du traité Sanhédrin figure notamment dans l’ouvrage Acten und Gutachter (Vienne, 1890).

   Traduction et interprétation :

   “Rabbi Eliézer a dit : Les mécréants (RECHAIM) d’Israël [Juifs] et tous les GOYIM qui oublient Dieu retourneront en Enfer. Mais Rabbi Yéochoua n’est pas de cet avis car pour lui, les RECHAIM sont les GOYIM qui oublient Dieu, c’est-à-dire qu’un GOY mécréant ne peut pas accéder au monde futur.”

   Nous avons par ailleurs ces deux enseignements des Rabbanim :

      - Si on dit à propos du prophète païen BILAAM qu’il n’a pas de part au monde futur, on sous-entend qu’un autre non-Juif pourrait avoir une part au monde futur.
      - Tout Juif a une part au monde futur.

8ème référence

Tossaphoth Sanhédrin (74 b)

Judenspiegel / Tossaphoth Sanhédrin 74 b
Version du Judenspiegel

Talmud / Tossaphoth Sanhédrin 74 b
Version du Talmud

   Traduction et interprétation :

   On peut noter deux interprétations de ce passage :

   1 - “Aussi, il est enseigné dans la MEGUILAH (ou Rouleau) d’Esther (page 15) : Si je dois périr (de la maison de mon père), que je périsse31

   2 - “De la même manière que j’ai été perdue de la maison de mon père, ainsi j’ai été perdue de toi.”32

   Et le texte poursuit :

   “De la même manière, au sujet de son mari, on ne peut pas penser que la cohabitation avec un idolâtre est comme la couche d’un animal.33 Avec ce type de relations sexuelles (celles d’un non-Juif), une Juive ne peut pas se marier avec un Prêtre (COHEN), quant bien même que dans les relations sexuelles avec un animal, elle peut toujours l’être de par le fait qu’il n’existe pas de concept de ZENOUT (adultère, ou plus exactement relation interdite) avec les animaux, comme il est expliqué dans le chapitre du Traité Yevamoth (page 59) : La semence de l’idolâtre est comme celle de l’APICOROS. Lorsque la Thorah a rendu HEFQER la semence d’un non-Juif, c’est à propos de la vie spirituelle, mais quant à la relation sexuelle elle-même, la Thorah ne l’a pas rendue HEFQER, et donc cette relation sexuelle existe bien et on ne peut pas en faire abstraction, et puisqu’elle a été interdite au mari, elle aussi interdite à celui qui a eu avec elle des relations sexuelles.”

   La suite du texte reprend le sujet principal et sort du cadre de la présente étude.

9ème référence

Tossaphoth Ketouvoth (3 b)

Judenspiegel / Tossaphoth Ketouvoth 3 b
Version du Judenspiegel

Talmud / Tossaphoth Ketouvoth 3 b
Version du Talmud

   On remarquera que c’est quasiment le même texte que précédemment.

   Traduction et interprétation :

   “Aussi, dans la Meguillah il est enseigné : de la même manière que j’ai été perdue de la maison de mon père, ainsi j’ai été perdue de toi. On voit donc que vis-à-vis de son mari, les relations sexuelles d’un Egyptien34 ne sont pas considérées comme celles d’une animal et il en est de même pour celui avec lequel elle a eu des relations sexuelles, même si le concept de ZENOUT n’existe pas à propos des animaux et que les relations sexuelles avec une animal n’interdisent pas, dans l'absolu, de se marier avec un Cohen, comme il est dit dans le Traité Yevamoth : les relations sexuelles d’un Egyptien sont considérées comme de véritables relations sexuelles, et lorsque la Thorah a rendu HEFQER son sperme, c’était à propos de la vie “spirituelle”, et c'est la raison pour laquelle son sperme est considéré comme celui d’une animal.”

   Voilà résumé brièvement les quelques citations qui ont servi à alimenter l'antisémitisme au tournant du XXe siècle, reposant sur une incompréhension volontaire de textes inaccessibles. Ainsi, des documents rabbiniques tel le Talmud - lequel fut pourtant imprimé au vu et au su de tout un chacun dès le début du XVIe siècle - devenaient “occultes” par la force des choses et finirent par être le substrat d'un mythe qui donna naissance à l'idée machiavélique d'une “conspiration juive mondiale”.

Robert Benazra
Nissan 5763

Notes

1 Le GOY représente pour les Juifs celui qui n’est pas juif, qu’il soit chrétien, musulman ou bouddhiste, mais un Juif “athée” reste juif, de même qu’un Juif converti au christianisme (Monseigneur Lustiger, par exemple) demeure toujours juif. En fait, le terme GOY, au sens général de la Thorah, désigne une nation, un peuple ou une organisation politique. Retour

2 Nous verrons que parfois Ecker utilise le mot KOTI (samaritain) à la place de AKOUM (idolâtre), peut-être pas innocemment d’ailleurs. Retour

3 Cf. l’étude de Jacques Halbronn dans cette même rubrique Retour

4 Cf. Contre Apion, I, § 224. Retour

5 Cf. Contre Apion, II, § 121. Retour

6 Cf. Nombres (XXIII, 9). Retour

7 La HALAKHA (littéralement, chemin à suivre), une des manifestations créatrices de la pensée rabbinique, concerne toutes les questions juridiques. Retour

8 Nous ne sommes pas très éloignés des conceptions du philosophe juif hollandais Baruch de Spinoza. Retour

9 Pour résumer, nous dirons que le terme APIKOROS dans le Talmud désigne soit celui qui nie l’existence de Dieu, soit celui qui croit en plusieurs dieux ou même un Juif qui s’éloigne des prescriptions de la Thorah. Retour

10 Cf. Deutéronome VIII, 19. Retour

11 Le symbole de cette Alliance est la circoncision. Ainsi, le Goy ne pourrait participer au sacrifice de l’Agneau que s’il est circoncit. Retour

12 Selon la nomenclature du Rambam (Maïmonide). Retour

13 M. Yaniv PEREZ nous précise cependant que la compilation de la Michna est postérieure à ce décret des Rabbanim, même si parfois on trouve dans ce recueil certaines lois concernant les KOUTIM datant d’avant le décret. Retour

14 Parfois, dans certains passages spécifiques du Talmud ou du Choulhan Aroukh, c’était généralement pour éviter les tensions et les persécutions permanentes avec l’Eglise florissante, que les Sages hébreux utilisaient les termes KOUTI et AKOUM à la place du terme GOY. Il est un fait que, sortis de leur contexte et point du tout replacés dans l’atmosphère des temps passés, certains passages du Talmud ont fait l’objet d’une polémique millénaire et ont alimenté pour des générations l’antisémitisme des Chrétiens, notamment. L’isolement religieux des Juifs se retrouve d’ailleurs dans la quasi totalité des écrits des Pères de l’Eglise. Retour

15 Il s’agit là d’une union par le biais des relations sexuelles, qui est une des trois façons de se marier, selon la Thorah, les deux autres étant la signature d'un contrat (KETOUBAH) et la dot remise directement à l'intéressé(e). Retour

16 Dans le Deutéronome (VIII, 3), Dieu ordonne aux Enfants d’Israël quelle devra être leur attitude vis-à-vis des sept nations qui occupent la Terre promise : Hittites, Guirgachites, Amorrhéens, Cananéens, Perizzites, Hiwwites et Jabouséens : “Tu ne contracteras point de mariage avec ces nations”. Retour

17 Cependant, nous précise Yaniv PEREZ, Rabbi Yossef Karo, l’auteur du Choulkan Aroukh, a cependant voulu inclure tous les non-Juifs dans cette loi, à la suite des persécutions permanentes de l’Eglise. Retour

18 L’expression consacrée pour le mariage rituel juive est “recevoir les KIDDOUCHIN”, c’est-à-dire, “sanctifié” l’union charnelle, ou plus exactement “réserver” une personne pour soi-même. En d'autres termes, avec les KIDDOUCHIN, l’homme s’engage à être fidèle et entier pour sa femme, et il en est de même pour la femme. Ainsi, les Rabbanim considèrent que cette “réception des KIDDOUCHIN” (ou sanctification) est un préalable obligatoire au mariage, sans lequel le mariage sera déclaré nul et non avenu, mais il n'est pas suffisant car même si les KIDDOUCHIN sont établis selon la forme, les conditions ne seront pas remplies avec un partenaire KOUTI notamment. Retour

19 Dans les Nombres (XV. 37 à 38), on décrit l’habit rituel que les Enfants d’Israël devront porter. Le texte débute ainsi : “Dieu dit à Moïse : Parles aux Enfants d’Israël; tu leur demanderas de confectionner une frange (ou une houppe, TSITSITH) aux pans de leurs habits, dans toutes les générations”. Retour

20 Le Talmud en déduit logiquement que ce Commandement sur les TSITSITH ne concerne donc que les Juifs. Par contre, une femme non-juive pourrait parfaitement fabriquer de tels habits ! Retour

21 Rappelons que l'AKOUM pour le Talmud est un idolâtre (non-juif), au sens le plus large du terme. Retour

22 Si quelqu’un ou quelque chose se trouve avec la tombe dans un même espace et que cet espace est couvert. Retour

23 Le terme OHEL désigne une tente, et au sens de la Halakha, c’est tout espace couvert d’au moins dix téphakhim, le téphah étant l’équivalent de la hauteur d’un poing fermé. Retour

24 Cf. Ezéchiel (XXXIV, 31). Le verset ajoute : “… et moi, je suis votre Dieu …” Retour

25 Dans la littérature talmudique, ADAM désigne l’homme au sens restreint du terme, celui qui a accepté le joug de la Thorah. Retour

26 Dans la littérature talmudique, on nomme HEFQER quelque chose qui n’appartient à personne et qui n’a pas d’existence spirituelle. Par extension, c’est un objet dont personne ne veut devenir le propriétaire. Retour

27 Cf. Ezéchiel (XXIII, 20). Retour

28 La loi hébraïque appelle IBOUM le fait qu’un homme se doit d’épouser la femme de son frère mort sans descendance (lévirat) et HALITSA (littéralement “retirer la chaussure”), c’est l’exception, lorsque l’homme ne veut pas épouser sa belle-sœur ou lorsque ce n’est pas possible, du fait qu’il soit un Prêtre (COHEN) par exemple. Retour

29 Ce verset est dans l'histoire de AQUEDAT ITSKHAQ (Sacrifice d'Isaac), lorsqu'Abraham est parti pour sacrifier Isaac sur le Mont Moriah. Il a dit à ses serviteurs (non-juifs) qui l'accompagnaient, de rester sur place avec l'âne qu'Abraham a amené et de l'attendre jusqu'à son retour. Cf. Genèse (XXII, 5). Retour

30 Il y a là un jeu de mot avec les termes hébraïques IM et AM qui comportent les mêmes lettres : “avec l'âne” (IM HAKHAMOR) et un “peuple qui ressemble à l'âne” (AM HAKHAMOR) ! Retour

31 Dans la Méguilah (IV, 16), Mardochée demande à Esther d’intervenir auprès du roi Assuérus en faveur des Juifs, menacés d’extermination par le vice-ministre Aman. Réticente au début, Esther fit cette réponse à Mardochée : “Demande au peuple juif de jeûner trois jours consécutifs. Je jeûnerai également et je demanderai audience au roi (sans attendre d’être convoqué, comme cela se pratique habituellement), si je dois périr, que je périsse.” Ce dernier propos, repris par le commentateur, KAACHER AVADTI AVADTI, a la même tonalité que celui prononcé par Jacob (Genèse XLIII, 14), lorsqu’il laisse partir son fils Benjamin pour l’Egypte : “Pour moi, si je dois être privé de mes enfants, que j’en sois privé” (VAANI, KAACHER CHAKHALTI CHAKHALTI). Cette résignation de Jacob, et ici, de la reine Esther, est simplement le résultat d’une confiance absolue en l’Eternel. Retour

32 C’est Esther qui parle à Mardochée, son mari, d’après cette interprétation, car le terme “perdue” est ici employé du fait qu’Esther, ayant eu des relations sexuelles avec Assuérus, ne pouvait plus être la femme de Mardochée. Retour

33 En d’autres termes, on constate donc que vis-à-vis de son mari, les relations sexuelles d’un non-Juif (Assuérus) ne sont pas considérées comme celle des animaux. Retour

34 Ici le terme Egyptien est synonyme de non-Juif au sens général. Retour



 

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