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HYPNOLOGICA

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Vie & Mort ou la dialectique masculin / féminin

par Jacques Halbronn

    Ce n’est probablement qu’à force de décrire la différence entre comportements masculin et féminin que l’on parviendra à montrer l’inanité des velléités égalitaires entre ces deux “genres” (en anglais genders), expression supposée souligner, selon les féministes, le caractère purement social et donc provisoire du distinguo entre hommes et femmes. En fait, nous espérons que suffisamment de femmes se reconnaîtront dans nos descriptions et admettront aussi qu’il n’y a aucune raison pour que cela change en ce que cela correspond à une vraie fonctionnalité.

   Disons d’emblée que l’ergonomie de la femme implique une certaine économie d’efforts, ce qui explique peut-être qu’elle vit, généralement, plus vieille que l’homme. Elle s’userait moins, à un certain niveau où l’homme, quant à lui, tend à s’épuiser, voire à se gaspiller.

   Expliquons-nous : dire que la femme se fatigue - familièrement se foule - moins. Là où l’homme va parfois s’échiner à tout recommencer, la femme, elle, se contente souvent, machinalement, de recycler quelque chose qui existe déjà et qui fera bien l'affaire. De l’art d’utiliser les restes. C’est souvent du pilotage automatique, parfois c'est un peu bâclé, côté inspiration mais ça passe.

   Pourtant, d’un certain point de vue, la femme s’activerait plus, quantitativement - elle peut abattre beaucoup de travail dans une journée - que l’homme, mais elle serait moins affectée par ce qu’elle fait, c’est-à-dire que son temps d’adaptation pour passer d’une tâche à une autre serait plus faible. Ce qui lui permettrait de se démultiplier sans trop de peine, c’est d’ailleurs ce qu’on lui demande, ce que l’on attend d’elle, ce pour quoi elle a été, en quelque sorte, programmée, conçue.1

   Cette ergonomie féminine est celle qui intervient en cas de mimétisme, de reproduction et qui jouera un rôle de plus en plus important sur le plan technologique. On sait de mieux en mieux imiter la vie et nous préférerons employer le mot “exister” pour englober toute manifestation qu’elle soit de l’ordre de la vie ou de la mort. Celui qui est “mort”, c’est-à-dire incapable de penser en commun, cherchera à donner le change en singeant la vie, ce sera sa façon d’exister quand même, il recherchera des simulacres de vie sociale comme dans ces repas où personne ne s’écoute et où rien de ce qui se dit n’a véritablement d’importance - car personne n’est disposé à faire un travail de réflexion ensemble - et où chacun mange comme un automate. On pense à une scène du film About Schmidt (Mr Schimdt) avec Jack Nicholson.

   Nous pensons que pour mieux cerner la spécificité du féminin, il importe non seulement d’étudier ce qui se situe en aval, à savoir la machine mais aussi les comportements imitatifs, tels que ceux que nous avons analysés dans nos travaux consacrés aux pseudo-Centuries de Nostradamus2 et aux méthodes des faussaires.

   On l’a déjà dit, ailleurs, le féminin aurait un rapport avec la mort (Thanatos, en grec) tandis que le masculin a un rapport avec la vie mais aussi avec l’Eros, pour reprendre une dialectique freudienne.

   Bien entendu, cette “mort” dont nous parlons ressemble singulièrement à la vie, dont elle est le reflet et le prolongement. La mort est un état et pas seulement un moment. Dire que la femme se situe dans le registre de la mort ne signifie nullement qu’elle ne puisse être active voire même, dans le processus d’enfantement, “donner la vie”, selon une expression qui peut prêter à confusion. Il y a bien là de quoi se leurrer. Il convient, en fait, de revaloriser la mort dans son rapport à la vie et de lui assigner une nouvelle image, bref de réintégrer la mort dans notre vie.

   Grâce à la gestion de ce qui est mort, notamment par la conservation des données dans les bibliothèques mais plus simplement du fait de la mémorisation, de la commémoration, l’humanité économise considérablement une certaine forme d’énergie.

   L’Historien des textes que nous sommes est bien placé pour souligner le rôle du plagiat, sous ses divers aspects, ce qui fait que bien des écrits sont inspirés par d’autres. D’ailleurs, le langage lui-même n’appartient-il pas à ce registre de la mort, et ne nous fournit-il pas de nombreux stéréotypes et formules toutes faites, au point que c’est pour nous une gène d’entendre dans une langue des expressions inusitées, c’est-à-dire “vivantes” ? Ne dit-on pas, par exemple : “cela ne se dit pas en français”, ce qui signifie que cela pourrait se dire mais que ce n’est pas le cas ? Il reste que pour la femme, les mots sont bien définis et que l’acte de comprendre est avant tout celui consistant à connaître le sens de chaque mot employé. Or, la vie consiste à redéfinir les mots, du fait d’un nouveau consensus qui s’instaure au sein d’un groupe. Il y aurait entre l’homme et la femme un rapport différent au langage, la femme étant plus dans le constat individuel mais objectif - et qui n’exige pas le consentement de l’autre pour exister - et l’homme dans le projet collectif mais subjectif.

   L’Histoire, d’ailleurs, n’est-elle pas liée à la Mort ?3 Et l’idée de balayer le passé et son legs, notamment au niveau des clivages majeurs qui structurent le monde synchroniquement et diachroniquement, ne relève-t-elle pas d’un refus de la Mort ? Car le passé est lié à la mort et le futur à la vie mais peut-on se permettre de ne pas s’appuyer sur les forces de mort, lesquelles, en l'occurrence, sont liées à ce féminin que l’on veut par ailleurs, étrange paradoxe, promouvoir ?

   En fait, la mort n’existerait pas sans la vie; c’est la vie qui génère de la mort tout comme ce qui est présent devient presque aussitôt passé. En ce sens, on pourrait dire que la mort est l’ombre de la vie, ce qui donnerait un sens fort à l’expression de “royaume des ombres”.

   Dire que la mort est le prolongement de la vie nous paraît faire sens : certes, la mort fait-elle, comme chacun sait, à la vie mais elle ne constitue pas pour autant un monde à part, inaccessible: la mort est parmi nous, elle est partie intégrante de notre vie. On connaît l’expression: le monde est fait de plus de morts que de vivants. Nous sommes des héritiers.

   Selon nous, la mort accompagne la vie : est-ce qu’une machine n’est pas un être mort ? Est-ce que les livres ne sont pas “morts” ? Est-ce que ce que nous mangeons, quand nous ne sommes pas végétariens, n’est pas également “mort” ? Bien des gens qui se disent / croient “vivants” sont en réalité “morts”, ils n’ont de vivant que l’apparence. Au vrai, savons-nous distinguer la vie et la mort ? On peut en douter.

   Ce que l’on appelle habituellement la mort, c’est à dire la décomposition du corps ne serait-il pas qu’un épiphénomène ? Car la mort n’est nullement synonyme de décomposition mais plutôt d’une forme de cristallisation, sinon de sclérose. En ce sens, nous ne suivrons pas Albert Camus quand il fait de la mort la cause même d’un certain sentiment d’absurde. Au contraire, l’humanité a appris, depuis bien longtemps, à gérer la mort et à l’intégrer, si l’on peut dire, dans son modus vivendi.

   En fait, on meurt plus tôt qu’on ne l’imagine mais comme on l’a dit on ne sait pas bien distinguer le vital du mortel pas plus qu’on ne sait distinguer le masculin du féminin. On sait distinguer un homme d’une femme, un corps animé d’un cadavre, mais cela ne saurait suffire. On sait discerner les noms mais pas les adjectifs. D’ailleurs ne dit-on pas de certaines personnes que ce sont des “immortels” pour signifier qu’ils rayonnent toujours ? Mais la mort qui est reflet peut préserver une part de la dynamique du vivant, et comme on a dit, passer pour de la vie. Parler d’immortalité, c’est en fait refuser de distinguer entre vie et mort.

   Nous dirons que n’est vivant que ce qui est radicalement original et originel; au delà de cet état, nous pénétrons dans un clair-obscur, dans un monde crépusculaire4 et en quelque sorte résiduel.

   La machine n’a affaire à l’Humanité que par le biais de la mort ; elle ne peut s’assimiler que cette dimension figée.

   La mort est une nécessité en ce qu’elle soulage la vie, elle lui permet d’évacuer une surcharge, tout comme on conserve des produits en les séchant, en les fumant, en les surgelant, sans pour autant qu’ils ne se décomposent devenant alors immangeables, non consommables. En fait, ce qui se décompose, se désincarne, ne relève pas de la mort, c’est en quelque sorte la mort de la mort car la mort implique une corporéité, une matérialité, elle doit pouvoir servir de signe, donc être visible, perceptible. On préférera parler de désincarnation pour parler de disparition alors que la chose, l’être morts restent très présents parmi nous, assument une fonctionnalité.

   Il convenait donc de repenser les concepts de machine et de mort pour approcher autrement, à nouveaux frais, la Femme. Certaines césures faussaient l’analyse que l’on pouvait en faire. La mort est plus vivante qu’on ne l’imagine et la vie n’est souvent qu’un simulacre.

   En réalité, la mort menace l’Homme en permanence et il la côtoie sans cesse, sans que sa “vie ” soit nécessairement en jeu. Et quelque part, on peut se demander si la mort n’est pas dia-bolique, si elle ne constitue pas la tentation par excellence. Et la Femme est bien évidemment de cet ordre là; comme on a dit, le paradoxe est que l’homme pour transmettre la vie doit passer par elle, qui est Mort. Le couple Homme / femme est celui de la Vie et de la Mort, et se placer face à la mort n’est-il pas le meilleur moyen de ne pas franchir les limites de la Vie, ne faut-il pas apprendre à se reposer, à s’appuyer, sur la Mort ?

   Chaque fois que nous préférons (nous) raconter, (nous) répéter, nous imiter nous-mêmes, plutôt que de penser et repenser, inventer et réinventer, nous nous rapprochons de l’état de mort qui n’est pas sans offrir certains avantages, non sans quelque forme de bonheur, du fait d’une certaine routine, d’automatismes qui permettent de passer, sans états d’âme, à l’acte alors que la Vie fait souvent songer à un monde éprouvant, incertain, qui ne connaît pas de repos.

   La mort est en effet de l’ordre du re-pos (ce que l’on dépose) - on parle du repos du guerrier - la mort est un Requiem.

   Il y a d’ailleurs en nous5 cette coexistence du vivant et du mort.

   La machine qui se meut n’en est pas moins morte. Le critère de la mort n’est pas le mouvement, c’est la cyclicité et nous avons besoin d’elle. Ponctuellement, la mort peut se faire passer pour la vie. Quand nous rencontrons quelqu’un pour la première fois, nous pouvons certes observer si son propos est ou non original, mais ce n’est qu’en le fréquentant que nous pourrons vérifier qu’il ne reproduit pas le propos d’un autre ou qu’il ne cesse de se répéter lui-même, à la moindre occasion.

   Il importe que la femme s’unisse à un Homme qui soit vraiment vivant, ce n’est qu’alors qu’elle peut assumer sa complémentarité. Nombre de femmes créatrices ont été les compagnes d’hommes singulièrement doués :de Marie Curie à Agnès Varda, l’épouse du cinéaste Jacques Demy.

   A chacun, cependant, de rester dans son registre, dans sa différence : un homme qui s’exprimerait comme une femme, recourant à des termes par trop univoques, réveillerait ce que nous avons appelé sa prétextualité6 ; il vaut mieux qu’il parle un langage plus abstrait, plus vague voire plus ambigu qui finalement la rassure parce qu’il ne la déclenche pas. On peut d’ailleurs se demander si la femme n’est pas particulièrement apte à détecter le vivant, si elle n’est pas fascinée par lui, si elle n’y trouve pas au fond son alter ego, c’est-à-dire une véritable altérité et finalement une certaine sérénité que d’autres femmes ne lui apportent pas, du fait d’une présence par trop pesante, trop signifiante au premier degré.

Jacques Halbronn
Paris, le 8 mars 2003

Notes

1 Cf. nos précédentes études sur le Site Ramkat.free.fr. Retour

2 Cf. sur le site interdisciplinaire Ramkat.free.fr. Retour

3 Cf. notre étude sur la crise de l’Histoire, sur le Site Ramkat.free.fr. Retour

4 Cf. notre étude sur le Tselem, sur le Site Ramkat. Retour

5 Cf. ce que nous avons écrit sur animus / anima. Retour

6 Cf. notre étude, à la rubrique “clivages”, sur le Site faculte-anthropologie.fr. Retour



 

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