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HYPNOLOGICA

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La femme étrangère comme mise en évidence
de l’instance surmoïque

par Jacques Halbronn

    Dès lors que nous définissons le signifié féminin comme correspondant à l’instance surmoïque, comment une femme étrangère pourrait-elle correctement assumer un tel rôle ?

   Il nous semble en effet que la femme qui vit à l’étranger, hors de son milieu d’origine se met en situation d’inefficience surmoïque et tend en quelque sorte à se masculiniser du moins par ses manques. En tout état de cause, elle risque fort de ne pas jouer le rôle qui lui est, anthropologiquement et ontologiqument, imparti.

   Rappelons1 que la tâche qui incombe à la femme, en tant que signifié social, concerne le Surmoi. C’est elle qui rappelle à l’ordre, qui permet à la société de se conformer, dans son ensemble, aux mêmes normes comportementales, qui en est, en quelque sorte, la gardienne, pour le compte de l’homme certes, mais à l’homme de se plier à celles-ci, précisément pour pouvoir penser à autre chose et jouir d’une certaine liberté sans pratiquer une autocensure schizoïdique.

   Or, la femme étrangère est incapable d’assumer une telle responsabilité, du fait qu’elle a perdu certains automatismes, qu’elle n’incarne que laborieusement la loi, la norme, ce qui signifie qu’on ne peut pas compter sur elle pour savoir ce qui se fait et ne se fait pas. Certes, cette carence peut sur le moment paraître reposante mais cela signifie que l’on ne peut se reposer sur elle, cette femme étrangère : dilemme.

   En fait, la femme étrangère est l’exemple même d’un signifiant social ne renvoyant pas de façon satisfaisante au signifié social correspondant. Elle a les apparences d’une femme mais son comportement est décalé, sauf bien entendu au niveau anatomique et physiologique mais précisément le signifié social de la femme ne se réduit nullement à ce niveau, contrairement à l’idéologie actuellement dominante qui nie la spécificité du psychisme féminin ou qui ne veut en faire que la conséquence du dit niveau anatomique et physiologique.

   D’une façon générale, l’étranger a des problèmes avec le Surmoi de la culture dans laquelle il est accueilli. Pour un homme, ce n’est pas trop grave car la dimension surmoïque ne lui incombe pas, ce qui signifie qu’il sera “dressé” assez vite par l’environnement féminin et rappelé à l’ordre, autant de fois qu’il le faudra. Au contraire, les femmes prendront plaisir à le prendre en main et à lui faire la leçon.

   Pour la femme étrangère, en revanche, la situation est sensiblement plus délicate et son déracinement plus coûteux à la fois pour elle-même et pour ceux auxquels elle aura affaire dans le pays d’accueil car d’entrée de jeu on attendra d’elle certains services qu’elle est bien incapable de rendre du moins spontanément. Elle n’a pas cette assurance, cette certitude surmoïque, avec ce qu’elle a d’évidence et d’automatique, qui sont requises de sa part. Et cela fait problème notamment au niveau du couple mais pas seulement.

   Est-ce à dire que ses carences seront contrebalancées par d’autres services ? On peut en douter et de toute façon, ce n’est pas ce qu’on attend d’elle, du fait de son appartenance à un certain signifiant social. Nous avons insisté par ailleurs sur le fait que d’un point de vue anthropologique, on ne peut gérer les cas individuels, que l’individu doit s’inscrire, pour être prévisible, dans un cadre collectif précis. Sinon, le dit individu ne peut être que déroutant.

   Le problème de la femme étrangère, c’est bel et bien l’affaiblissement de la fonction Inconscient, le manque d’automatismes. Il faut lui dire ce qu’il faut faire alors que ce serait à elle de le savoir en tout premier. Mais comment le pourrait-elle, puisqu’elle est étrangère au monde dans lequel elle est supposé, de par son signifiant social, se manifester dans un tel registre ?

   Certes, nous avons pu regretter que les femmes, en général, soient tributaires d’une idéologie qui ne les aide pas à prendre conscience de leur rôle (signifié) social. Mais les dégâts ne sont que relatifs. Car, bon an mal an, bon gré mal gré, les femmes non étrangères assurent bel et bien une telle fonction surmoïque et ce faisant remplissent peu ou prou leur contrat, en dehors des autres activités dont elles se chargent à plus ou moins bon escient.

   Face à la femme étrangère, en revanche, l’homme se voit comme contraint d’assumer une certaine féminité surmoïque qui n’est pas a priori dans ses cordes, ce qui est susceptible de conduire à une sorte de renversement des rôles. En effet, l’homme non étranger est au fait du Surmoi local, même s’il n’en est pas le porteur, il a pour le moins un certain bagage et il est habitué à certaines réactions en telle ou telle circonstance où il n’a pas manqué de se faire corrigé, à l’occasion. Inversement, la femme étrangère tend à se comporter d’une façon masculine, par le fait même de sa situation existentielle, ne serait-ce qu’au niveau de la maîtrise de la langue, ce n’est pas elle qui va préciser ce qui se dit ou ne se dit pas, elle n’en a pas vraiment l’autorité et si elle s’essayait, elle risquerait fort de se ridiculiser par des remarques qui ne feraient que souligner son étrangeté et sa connaissance superficielle et limitée de la culture d’accueil, loin des automatismes qu’elle est supposée incarner et (faire) appliquer.

   La notion même de femme étrangère mérite d’être précisée, au niveau de la psychogénéalogie. Quand est-on une femme étrangère, quand cesse-t-on de l’être ? Bien entendu, cette question est liée au phénomène de l’immigration / émigration.2 Suffit-il de naître dans un pays pour ne pas lui être étranger dès lors que l’on grandit dans une famille marquée par l’immigration ? Sur le plan linguistique, les automatismes sont bien là et peuvent faire illusion. En revanche, sur d’autres plans surmoiques plus subtils, on peut en douter, pour des raisons que l’on peut aisément concevoir et qui sont liées à une certaine culture familiale, porteuse de certains stigmates mimétiques conduisant à passer entre certains interstices et à contourner voire à détourner le système.

   Autrement dit, la femme est tributaire plus que tout autre acteur social d’un certain enracinement au sein d’un “inconscient” donné et toute tribulation risque fort de se retourner contre elle et notamment d’affaiblir sérieusement la compétence qu’on pourrait être amené à espérer à son sujet, au niveau individuel, c’est-à-dire en fait en tant que membre d’un groupe identifiable ou en tant que membre identifiable d’un groupe.

   Alors que l’homme semble plus à même de circuler d’un espace à un autre, du fait précisément de la fonction féminine dont il (s’)est déchargé, et que son statut d’étranger peut à la limite se révéler positif d’un point de vue heuristique, en revanche, de tels avatars sont handicapants pour la femme. La pratique des mariages étrangers a parfois conduit des épouses étrangères, parfois vouées à exercer une régence, de par la mort de leur royal époux, quand il laissait un dauphin, à des positions politiques redoutables, notamment avec Catherine et Marie de Médicis voire avec Anne d’Autriche et Marie Antoinette, l’ “autrichienne”, mariée au futur Louis XVI, dans la France des XVIe-XVIIIe siècles. Mais en réalité, en dehors de tels calculs diplomatiques souvent périlleux, les aventures étrangères, les voyages au long cours, les missions, ont le plus souvent été le fait d’hommes.

   On attend, en effet, de la part de la femme, qu’elle soit comme une sorte de baromètre social, qu’elle dise ce qui se fait et ne se fait pas, qu’elle décide si une situation est ou non acceptable. Elle doit se charger d’une telle tâche, dotée d’un fort bagage, d’une expérience bien rodée. Certes, on ne suivra pas nécessairement ses avis mais on attend néanmoins qu’elle les formule, en toute circonstance et sans trop réfléchir aux conséquences : les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Il faut que la femme manifeste une certaine résistance, quitte à être quelque peu rabat-joie, rôle parfois ingrat mais auquel elle est condamnée, faute de quoi son altérité - c’est-à-dire sa présence comme signifiant social spécifique - ferait problème et serait en question.

   Si l’on observe les femmes étrangères en France, on constate qu’elles sont considérablement diminuées par rapport à leurs congénères locales, dont elles ne sauraient avoir la vivacité, le culot, l’autorité, la confiance en elles -mêmes. Elles peuvent certes participer aux “jeux” masculins mais sans être, pour autant, “équipées” en conséquence, ce qui les conduit à certains simulacres dont on risque assez vite de se lasser et de percer. Elles se voient dès lors réduites à la fonction sexuelle et d’enfantement. En fait, on remarque qu’à la première occasion, elles cherchent à se replonger dans leur culture d’origine, soit sur place, quand il existe des communautés, soit en retournant fréquemment à leur point de départ.

   Dans le cas d’un couple dont un élément est étranger, il est préférable que si c’est l’homme qui est étranger, il aille vivre dans le pays de la femme étrangère à l’inverse. Il pourra y trouver assez facilement un nouvel équilibre, du fait que les sociétés, d’une façon générale, tolèrent mieux l’étranger que l’étrangère, ce qui nous fait toucher du doigt l’importance des signifiés sociaux et la logique de leur existence. L’homme, en effet, n’est pas supposé veiller sur la norme comme c’est le cas pour la femme. On attend de lui plutôt qu’il sache affronter l’inconnu et l’imprévu. La France a su conférer une place éminente à l’italien Mazarin ou au corse Bonaparte. Au demeurant, les liens que l’homme entretient avec un milieu donné sont relatifs; il est capable d’en nouer d’autres au sein de nouvelles communautés, l’élément féminin local étant là pour tout réguler.

   En conclusion, on observera que la question de la femme étrangère nous permet de mieux comprendre le rôle de la femme qui est précisément de libérer l’homme de son appartenance à une culture donnée, dans la mesure même où la fixité est le fait de la femme et qu’il lui revient de veiller à une certaine uniformisation de la société dans laquelle celle-ci officie. A contrario, si l’homme était porteur du Surmoi, il ne pourrait avoir une telle mobilité ou celle-ci aurait des effets autrement perturbateurs. La femme est un élément social de fixité et de perpétuation des normes, elle est par excellence l’éducatrice tandis que l’homme est un élément de mobilité, de brassage voire de transgression. Cette dualité du fixe et du mobile nous apparaît comme une loi anthropologique fondamentale dont nous avons par ailleurs souligné l’importance dans la représentation cosmologique, avec la dialectique de l’étoile fixe et de la planète qui tourne en quelque sorte autour d’elle. Or, dans nos travaux sur l’astrologie, comme pathologie de l’épistémé3, nous avons montré que la dite astrologie avait perdu le sens de cette dualité Etoile / planète. La femme étrangère, pour sa part, relève de ce que nous appelons une pathologie de l’altérité, dès lors précisément que la fixité dont elle est supposée être porteuse est hypothéquée par la condition que le sort lui a impartie.

Jacques Halbronn
Paris, le 19 mai 2003

Notes

1 Cf. entre autres notre texte “science, conscience, inconscience”, sur les Sites ramkat.free.fr et faculte-anthropologie.fr. Retour

2 Cf. notre texte sur la notion de Zar, sur le Site Ramkat.free.fr et “psychanalyse de l’étranger”, sur le Site faculte-anthropologie.fr. Retour

3 Cf. la rubrique sur le Site Faculte-anthtropologie.fr. Retour



 

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