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HYPNOLOGICA

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La femme s’appartient-elle ?

par Jacques Halbronn

    Notre approche de la femme n’est pas fondée sur quelque raisonnement analogique, qui dériverait notamment du fait qu’elle porte les enfants avant leur naissance. Notre travail s’appuie sur une étude du comportement féminin, sans a priori sinon celui, éventuellement, de faire ressortir une différence entre psychisme masculin et psychisme féminin et ce n’est que dans un deuxième temps que nous pourrons éventuellement raccorder nos observations avec des réflexions plus générales.

   Quand nous demandons : “La femme s’appartient-elle ? ”, nous exprimons là une certaine perplexité qui tient à un certain nombre d’entretiens, d’entrevues, de dialogues avec des femmes. Expliquons-nous.

   Ainsi, par exemple, les femmes que nous connaissons ont cette même tendance à se servir de ce qu’on leur dit pour s’exprimer comme s’il leur était plus facile de s’appuyer sur le propos de l’autre plutôt que de formuler directement le leur. D’où effectivement, de leur part, une certaine écoute mais qui tend à se servir de ce que l’autre exprime, pour parfois lui faire dire ce qu’il n’a pas “dit” ou pas voulu dire. Tout se passe comme si ces femmes cherchaient à “piéger” leur interlocuteur à ses propres propos.

   Or, une telle attitude part d’une conception quelque peu schizophrénique du moi, comme si le moi ne s’appartenait pas ou comme s’il dépendait d’une autre instance, que l’on pourrait appeler le mental, et qui serait tout aussi indépendante que, disons, le corps physique. Il nous semble, en revanche, que les hommes ne se comportent pas de la sorte, qu’ils n’ont pas de compte à rendre à une instance mentale, surmoïque, qui serait porteuse d’une certaine vérité et qui s’imposerait à eux et que l’on pourrait appeler conscience : ne parle-t-on pas de la voix de la conscience ?

   Les femmes auraient donc une conscience, ce qui ne signifie nullement qu’elles aient conscience de ce qu’elles sont. Les anglais distingue conscience (au sens de bonne ou de mauvaise conscience) et consciousness (au sens de conscient / inconscient / subconscient). Cette conscience serait détentrice d’une certaine vérité qui jaillirait en quelque sorte malgré nous, qui nous dépasserait. On comprend mieux dès lors ce que veut dire une femme quand elle nous renvoie à ce que nous avons dit. Or, pour les hommes, ce qu’ils disent leur appartient, ils n’ont pas à se situer par rapport à leurs propos et ils en font ce qu’ils veulent : l’idée donc de les confronter à ce qu’ils ont dit ne fait pas sens.

   Quand nous demandons : “la femme s’appartient-elle ? ”, c’est que nous avons parfois le sentiment qu’il y a chez elle comme une sorte de point aveugle sinon de vacance du moi au profit de cette conscience qui serait porteuse d’une vérité à l’écoute de laquelle la femme se placerait. Autrement dit, pour la femme, il faudrait s’écouter, c’est-à-dire entendre une voix, à la façon de Jeanne d’Arc.

   C’est dire que le moi féminin est divers, est complexe et que chaque instance a voix à la parole. Il en est ainsi quand la femme déclare qu’elle n’en a pas envie. Où se perche une telle envie qui a son mot à dire et qui peut mettre son veto ? Qui est ce je qui n’a pas envie de ceci ou de cela et auquel il faudrait se plier ?

   Oui, la femme s’appartient-elle quand elle déclare “c’était plus fort que moi”, “je n’ai pas pu m’en empêcher”, “c’était au dessus de mes forces” et ainsi de suite ? Quand on écoute de telles formules, on est amené à penser que celui qui parle ainsi n’est pas tout seul, qu’il est en prise avec des conflits intérieurs.

   Autrement dit, à qui a-t-on affaire quand on s’adresse à une femme ? Qui nous répond et finalement est-ce qu’elle s’appartient ? Est-ce que ce qu’elle dit à un moment donné ne sera pas rejeté à un autre, parce que ce n’est plus le même interlocuteur que l’on a en face de soi, en tout cas pas la même instance ? Il semble bien que la structure du psychisme que Freud a décrite corresponde mieux à la femme qu’à l’homme, ce qui se concevrait si les patients de Freud étaient en grande partie des femmes avec le surmoi / conscience et le ça / envie.

   Les femmes se veulent volontiers franches, directes mais en fait qui parle alors, qui dit / dicte la vérité, tel un oracle inspiré voire possédé ? Les femmes, à certains moments, laissent cette voix intérieure s’exprimer quasi médiumniquement et lui accordent une autorité certaine, s’évertuent à décoder son message. Elles s’imaginent à tort qu’il en est de même pour les hommes, lesquels, en réalité, ne laissent pas cette voix s’exprimer, ne lui laissent pas “voix au chapitre”.

   Le malaise que l’on éprouve avec une femme tient précisément à un certain pluralisme qui pour le moins déconcerte : à qui a-t-on affaire ? Cela fait penser à ces administrations qui varient dans leurs positions, comme si tout dépendait de sur qui on tombe. Il faut savoir prendre les femmes par le bon bout mais on a quand même l’impression que la femme doit consulter ses instances alors que l’homme est plus à même de s’engager pleinement, qu’il n’a pas de compte à rendre. On serait tenté d’opposer, au sens nietzschéen morale de maître et morale d’esclave.

   Cette femme qui ne s’appartient pas, on ne s’étonnera pas qu’elle soit Pythie, qu’elle soit diseuse de bonne aventure, voyante, médium, c’est-à-dire intermédiaire. Qui parle à ces moments là ? Il semble qu’une même bouche serve à plusieurs voix.

   C’est peu dire que le moi de la femme est plus lourd, plus encombrant que celui de l’homme et bien des femmes reconnaissent cette qualité de légèreté aux hommes. Le moi de la femme, avec toutes ses composantes, est un peu, disons-le, caractériel, c’est-à-dire difficile à contrôler, à gérer, pour elle-même: il est fait de contradictions auxquelles la femme n’a pu que se résigner comme elle l’a fait pour ce corps qui a lui aussi ses contraintes, ses servitudes, ses exigences. Quelque part, la femme est comme enchaînée et quand elle se croit libre de toutes ces entraves, ce n’est qu’une illusion passagère. Oui, vraiment, la femme s’appartient-elle ?

   La femme a tellement de problème avec elle-même que le monde extérieur lui semble parfois assez virtuel et d’ailleurs comment pourrait-elle communiquer en oubliant son monde intérieur, qu’elle contemple introspectivement, avec une certaine fascination, avec parfois le regard d’un observateur extérieur ? Comment dans ce cas la femme se sentirait-elle seule quand tant de choses bougent en elle, qui est préparée à accepter jusqu’à la présence de l’enfant en elle ? Au fond, la femme n’a pas un comportement de rejet et ce n’est d’ailleurs pas ce qu’on lui demande, à l’inverse de l’homme qui rejette ce qui le gène, ce qui l’encombre.

   Dès lors, à quoi bon prétendre que l’homme et la femme, c’est pareil, que cela exige une parité ? La lourdeur du moi féminin a ses vertus, certes, son utilité mais la femme n’appartient pas, stricto sensu, à la communauté des hommes libres, affranchis de ces tâches dont la femme reste chargée, hypnologiquement, qui sont d’enregistrement comme pour une plaque sensible car la femme est aussi celle qui mémorise, qui charge sa mémoire, à des fins de répétition. Autrement dit, la femme a recueilli ce dont l’homme n’a plus voulu, dont il s’est délesté, et en ce sens, elle correspond à un état archaïque de l’humanité. Faut-il préciser ce paradoxe que la technologie appartient à cette archaïté de l’Humanité et nullement à son avenir ?

   Les techniques orientales de méditation, de yoga, nous semblent précisément contribuer à libérer les hommes de cette présence intérieure par trop bruyante, sinon assourdissante, elles nous apprennent à faire le vide en nous. Celui qui maîtrise son mental parvient à évacuer le féminin en lui-même. A l’inverse, l’homosexuel homme reste terriblement attaché à ses voix et à ses envies.

   Non point, certes, que les hommes ne soient inspirés mais cela relèverait plutôt de ce que l’on appelle, en Inde, le Soi, une source à laquelle on n'accède précisément que lorsque l’on a atteint un certain silence intérieur.

   La femme, au contraire, n’est pas là pour refouler ces voix, ces exigences, ces présences mais pour les préserver, sinon pour les protéger face à la volonté masculine de faire disparaître toute entrave à son bon vouloir. La femme est dans le rappel de ce qui avait été oublié, mis au secret - d’où le terme de secrétaire qui lui est souvent imparti. Parfois, ces rappels sont inopportuns, voire discourtois, insolents, ne tiennent pas compte de la qualité de ceux à qui ils s’adressent -dignitaires ou larbins - et en ce sens la femme est réductrice, elle met, de façon surmoïque, tout le monde sur un même pied et remet les gens à leur place, c’est-à-dire les fait rentrer dans le rang, ce qui n’est pas sans présenter un côté castrateur qui la fait parfois redouter car ce faisant elle fait preuve de courage, parfois d’inconscience des enjeux. En fait, on vous aime un peu irrespectueuse, voire impertinente, ne vous laissant pas impressionner, c’est votre privilége et cela permet de rompre la glace.

   Et l’homme, lui, s’appartient-il ? On pourrait également répondre par la négative mais ce serait pour de toutes autres raisons. L’homme est un animal politique (en grec zoon politicon), c’est-à-dire qu’il ne pose pas son moi face au groupe et il est conscient de ce qui l’intrique puissamment à celui-ci. Mais c’est aux instances extérieures, les enjeux présents, que l’homme doit rendre compte (le champ hypno +) alors que chez la femme ce sont les instances intérieures, subconscientes (le champ hypno -) qui ont le dernier mot.1 Face à la femme plurielle, en tant qu’individu, il y a l’Humanité plurielle, en tant que société. L’espace féminin n’est pas l’espace masculin. Si l’homme sait refouler et juguler ses forces intérieures parasitaires2, la femme, quant à elle, sait se fermer aux forces extérieures, à la pression du milieu, et ne pas se laisser contraindre par elles, parfois en les ignorant purement et simplement - surtout quand de surcroit elle est étrangère - pour ne plus laisser libre cours qu’à son complexe ressenti personnel, ce qui la place en porte à faux, désirant souvent le beurre et l’argent du beurre.

   C’est donc sur ces bases là que le dialogue entre l’homme et la femme doit s’instaurer -- alors qu’ils sont souvent imprévisibles l’un pour l’autre - il faut apprendre à vivre l’un avec l’autre, en respectant la spécificité de chacun; il est de toute façon temps, de renoncer à un mimétisme de mauvaise aloi, à un syncrétisme à bon marché du type “nous sommes tous des êtres humains et avons donc les mêmes droits et les mêmes devoirs”.

   La femme est probablement l’expression des tourments et des pesanteurs dont l’homme a su s’émanciper, et en ce sens, c’est l’homme qui serait issu de la femme ; la femme n’est nullement l’avenir de l’homme, elle est son passé mais un passé qui lui est nécessaire et qu’il ne peut que tenir à distance, ce qui est quelque part la leçon des spiritualités et notamment de la catholique. Mais cette mise à distance ne signifie pas cependant que l’homme doive fuir la femme ; c’est une mise à distance quotidienne et jamais accomplie, c’est un combat permanent et toujours recommencé, qui se joue, notamment, dans le couple, dans l’acte sexuel, dans la communication entre les époux, avec chacun sa problématique, son éthique, son appartenance.

   La communication au féminin peut se résumer par un mot : rappel. La femme rappelle - "je te rappelle", mais aussi se rappelle, ça lui rappelle, "ce que vous me dites me rappelle". Une chose en amène une autre, de fil en aiguille. Un propos en déclenche un autre, par association d'idée, c'est d'ailleurs ainsi que fonctionne le rêve, générant ainsi des réminiscences.

   C'est un processus qui n'en finit pas, on passe du coq à l'âne, ce qui est important étant de meubler la conversation, d'avoir quelque chose à dire. Quelque part, les femmes sont des machines à parler ou des machines qui parlent; soit elles racontent, soit elles interrogent à partir de ce qui a été dit, il ne faut pas que le flot de parole s'arrête, on doit constamment en relancer le débit, poursuivre un bavardage intarissable. Ce qui est important, ce n'est pas tant ici la qualité que la quantité, et donc la durée d'un entretien ou d'une prestation qui part dans tous les sens et on écoute l'autre juste assez pour saisir l'occasion de faire rebondir inlassablement l'échange, avec plus ou moins le sens de la répartie.

   Quelque part, un tel déballage est compulsif, il semble relever en fait d'une sorte d'obligation d'entretenir la flamme de la parole, d'une sorte de ping pong verbal. La lecture à haute voix à moins qu'on ne récite de mémoire, par coeur, est aussi une formule très prisée qui peut pallier par exemple la surdité et justifier le monologue. L'observation de ce qui se passe autour de soi n'a en fait d'autre finalité que de permettre de faire des remarques, des réflexions à autrui qui se voit ainsi instrumentaliser. Il y a chez la femme un devoir de parole qui, semble-t-il, la dépasse et qu'elle contrôle difficilement, une fois la mécanique lancée.

Jacques Halbronn
Paris, le 15 juillet 2003

Notes

1 Cf. notre étude sur ces notions, in Encyclopaedia Hermetica, rubrique Astrologica, Site Ramkat.free.fr. Retour

2 Cf. la formule dans le Cinna de Corneille, “je suis maître de moi comme de l’univers”. Retour



 

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