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HYPNOLOGICA

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Instrumentalisation et Inconscient

par Jacques Halbronn

    Un concept comme celui d’instrumentalisation ne se manie pas à la légère. Il s’agit en fait d’un modèle qui fonctionne d’une certaine manière et qui peut s’appliquer à une grande variété de cas.

   Un des malentendus à signaler, d’entrée de jeu, concerne les rapports de l’instrumentalisation avec le conscient et l’inconscient. En effet, le concept en question pourrait être qualifié d’androgynal et d’hypnologique, ce qui implique une dualité et une problématique de basculement d’un état vers un autre.1 En ce sens, l’instrumentalisation offre une dimension diachronique et ne se réduit pas à une simple mise en relation de type synchronique. Il n’y a pas en effet de phénomène d’instrumentalisation sans une inscription dans la longue durée.

   Ce qui nous intéresse dans l’instrumentalisation est d’ailleurs double: à la fois sur un plan disons philosophique le processus en son commencement arbitraire et volontaire et sur un plan disons anthropologique le processus une fois lancé et en quelque sorte devenu, au delà d’un certain seuil, irréversible. C’est cette contradiction qui est parfois difficile à bien appréhender.

   Le concept d’instrumentalisation permet précisément de gérer un certain nombre de contradictions, en conciliant libre-arbitre et déterminisme. Nous voudrions insister sur le fait que l’on ne pénètre pas aisément au sein d’une structure d’instrumentalisation élaborée par autrui. Ce qui est une façon de souligner les limites de tout projet mimétique.

   L’instrumentalisation met en place un rapport émetteur-récepteur mais dans lequel le récepteur est responsable au départ du lien et non pas l’émetteur. On pourrait presque dire que la situation est d’abord inversée: c’est l’émetteur qui est passif et le récepteur qui est actif puis, dans un deuxième temps, l’on évolue vers une “normalisaton” du rapport émetteur / récepteur. En effet, l’instrumentalisation débute par l’assignation à un objet d’une fonction et d’une signification qui ne sont pas intrinsèquement siennes. En ce sens, cet objet est en quelque sorte considéré comme vide - vidé de sa substance - et il va s’emplir d’un matériau étranger qui va désormais servir à le définir du moins par rapport à l’émetteur. De ce point de vue, l’instrumentalisation nous apparaît comme une féminisation d’autrui. Mais une fois l’objet ainsi instrumentalisé, il va se comporter comme un émetteur donc se masculiniser, en étant rempli d’une substance qui l’habite mais qui lui est cependant étrangère. D’où le faux procès intenté contre l’astrologie, par exemple, quant au fait que les astres ne seraient pas dotés des vertus qui leur sont attribuées. Le concept d’instrumentalisation désamorce ce type d’objections.

   Insistons sur le fait que cet arbitraire devenu réalité n’existe qu’au sein d’un certain écosystème. Pour l’étranger au système le carrosse n’est jamais qu’une citrouille, pour reprendre l’image de Cendrillon. Seuls ceux qui sont les héritiers de ce rapport d’instrumentalisation seraient, selon nous, en mesure d’en profiter pleinement. On a trop souvent tendance à croire que ce qui marche pour les uns marche pour les autres. D’où des déceptions à propos de l’astrologie, notamment dès lors que l’on affirme une relation qui n’existe pas nécessairement avec le premier venu. Face à un émetteur, il convient en effet de se demander quel est le récepteur. La notion de croyance nous semble être liée à la prise de conscience d’un lien particulier et exclusif entre deux éléments.

   Certes, il existe des émetteurs qui émettent, peu ou prou, pour tous : le soleil, dit-on, brille pour tout le monde mais il en existe d’autres qui sont en quelque sorte des artefacts et dont le mode d’emploi s’avère sensiblement plus délicat. On pourrait parler d’émetteurs instrumentalisés, c’est-à-dire qui ne fonctionnent, si l’on peut dire, qu’avec une clef, comme on dit dans le langage du décryptage. Celui qui n’a pas la clef ne peut décoder le message, ne peut le saisir “en clair”. Pour parler en termes d’informatique, il y a des incompatibilités entre systèmes.

   Quant au récepteur du message, il n’est pas en mesure de transmettre à autrui le dit code, que d’ailleurs lui-même ignore et qui est donc tout à fait sécurisé, sinon par le biais de la procréation. On aurait donc ainsi affaire à un système dont même les intéressés n’auraient pas une connaissance directe et donc a fortiori encore moins les étrangers au système. D’où l’importance extrême accordé aux structures familiales et aux lois de succession par les mâles, selon la loi salique, un des fondements du Royaume de France. L’idée selon laquelle, certaines vertus, certains pouvoirs - dans tous les sens du terme - ne pourraient se transmettre que par la filiation et qui plus est par la seule filiation mâle revêtirait ici tout son sens.

   En principe, une telle représentation des choses devrait favoriser une idéologie de droite plutôt que de gauche, dans la mesure où elle implique l’existence d’un ordre préétabli. Toutefois, la confusion qui règne dans la perception de certaines structures ne permet pas nécessairement un fonctionnement satisfaisant. Une politique libérale ne peut en effet fonctionner que si l’on lève tous les obstacles à une bonne marche des choses. Mais, dès lors que ces obstacles ne sont pas signalés ou que l’on est impuissant à remédier à certains dysfonctionnements, les résultats risquent fort d’être médiocres. D’où des formules comme le national-socialisme (nazisme), qui visent à réformer l’ordre des choses, en (r)établissant un ordre ancien/nouveau. D’où une droite conduite à avoir une politique sociale : d’une part pour corriger certains dysfonctionnements, de l’autre parce que le combat pour l’excellence conduit à ce qu’il y ait beaucoup d’appelés et beaucoup d’élus et qu’il convient de récompenser tous ceux qui sont dans la course et pas seulement les vainqueurs.

   Parmi les dysfonctionnements qui menacent les sociétés, il convient de relever certains phénomènes de substitution, générant divers malentendus, en raison des effets du mimétisme et du syncrétisme. Comme dit l’Evangile, il faut séparer le bon grain de l’ivraie pour qu’une vraie harmonie puisse être à l’oeuvre, laquelle harmonie n’est nullement synonyme de confusion des genres.

   Nous avons signalé au cours de diverses études les effets négatifs dans le rapport des non juifs aux juifs et on ne saurait trop insister sur ce que peut avoir d’illusoire toute forme de conversion qui ne passerait pas par le couple: union d’une femme non juive avec un juif donnant naissance à un enfant juif.

   D’autres problèmes peuvent tenir, on le sait, à l’immigration, au déracinement qui ne permettent plus à un homme de jouer pleinement son rôle par rapport à la femme, dans la mesure où il se produit chez l’homme une féminisation. En fait, tout appauvrissement, qu’il soit matériel, intellectuel ou / et culturel, subi par un homme sur le plan social, tend à le démasculiniser et donc, par contrecoup, à ne pas permettre à la femme de jouer tout à fait son rôle de femme.

   Un homme déclassé socialement, ne pouvant plus s’appuyer sur son milieu d’origine, sur sa famille, sur une certaine culture, qui, en outre, ne dispose pas de lieu de vie suffisamment vaste pour créer un foyer, donc incapable d’offrir à une femme un mode de vie un tant soit peu attractif et qui ne se réduise à sa seule présence, sera conduit à inverser sa stratégie en recherchant une femme “nantie”, qui lui offrira ce qu’il ne peut plus, lui, offrir : une famille, une maison, voire une culture, une langue. C’est pourquoi nous soutenons que toute dépossession est à terme féminisante. Cela concerne aussi bien les émigrés, ceux qui sont victime d’une occupation étrangère, que les personnes ayant subi des revers de fortune, ruinées, comme lors de la crise de 1929. Mais une telle condition socio-culturelle lui sera difficilement supportable parce que contraire à son instinct et il cherchera à se comporter comme s’il était ce qu’il n’est pas ou plus, voulant faire preuve d’assurance sur des questions qu’il maîtrise / possède mal, d’où une certaine tendance au bluff, à l’esbrouffe, en se demandant à quel moment il sera démasqué.

   Pour la femme, le problème se pose autrement :en ce qu’elle s’appuie sur l’homme - si tant est qu’elle en trouve un qui assume sa place - et par conséquent, elle est obligée de faire confiance en tant que source où elle peut puiser. La confiance est en effet un moteur essentiel du psychisme féminin et qui tend à manquer chez l’homme. Quand un homme ne peut ni se fier à lui-même ni à autrui, il est dans une situation ingérable. Faire confiance, c’est se laisser guider, conduire, diriger, imprégner.

   La femme est l’expression par excellence de l’être instrumentalisable, auquel on demande de se décharger de son passé, d’en faire le deuil, pour entrer dans la peau d’ un nouveau rôle. C’est pourquoi, le féminin est souvent associé avec le chiffre 2 ; cela tient selon nous à une certaine dualité du psychisme de la femme et disons-le une certaine cyclicité la faisant passer par des états contrastés. On attend de la femme qu’elle puisse se libérer des empreintes propres au milieu dont elle est issue, qu’elle assume les projections que l’on fait sur elle. Il y a là une sorte de paradoxe de l’instrumentalisation : on recherche un support vide pour lui conférer une nouvelle substance, ce qui conduit le dit support à perdre les qualités que l’on appréciait chez lui. Un objet est d’autant plus facile à instrumentaliser qu’on ne sait rien sur lui, qu’il ne peut de lui-même rien nous révéler à son propre sujet; encore faut-il qu’il soit aisément repérable de par sa forme, de par sa couleur, que l’on puisse le distinguer sans difficulté. C’est toute la problématique de la virginité, état qui ne peut se maintenir indéfiniment mais le fait de déflorer l’objet en question conduit à une mutation. Il en est de même des révolutions qui font le vide mais qui s’emplissent très vite d’un contenu qui les fait ressembler, peu ou prou, à l’état antérieur à la Révolution. On peut concevoir ainsi des femmes qui refusent de renoncer à leur virginité dès lors qu’elles perçoivent celle-ci comme ce qui fonde leur spécificité. C’est ce que nous avons appelé la situation androgynal et c’est ce qui rend l’identité féminine si difficile à cerner, à commencer par les intéressées, en raison d’un double bind : à la fois rester vierge et à la fois montrer que l’on peut s’emplir, s’imprégner. L’accouchement apparaît dès lors comme un retour à un état virginal, à la fin d’un cycle pour pouvoir en commencer un nouveau. La vie de la femme est vouée à la cyclicité, donc à la dualité, elle est changeante et son psychisme est structuré de façon à fonctionner sur des registres contradictoires, ce qui peut conduire à un double jeu, à une double éthique. C’est un peu l’histoire de la chauve souris, mammifère et oiseau : “je suis oiseau, voyez mes ailes etc.” Il est remarquable que notre époque ait tant de mal à penser la femme comme elle a d’ailleurs du mal à penser l’astrologie. On sait que le public qui se passionne pour l’astrologie est largement féminin, c’est probablement parce que la femme y trouve un écho à sa problématique intérieure, grâce à un modèle qui rende compte - ou du moins qui prétende le faire, ce qui, en l'occurrence, revient au même - des tensions qui la traversent, modèle qu’elle ne trouve pas dans le discours scientifique dominant. Autrement dit, ce qui est véhiculé par l’astrologie fait écho, résonance, au psychisme féminin, ce qui ne signifie pas pour autant que la femme soit sensible aux configurations astrales, notre exemple ici se situant sur un plan purement formel; c’est, avant tout, la philosophie de l’astrologie qui attire la femme, de par une certaine analogie. En effet, si l’on devait se situer sur le plan du rapport aux astres, tel que nous l’avons défini, dans diverses études, on trouverait certes une dualité cyclique mais qui n’est pas pour autant superposable à la dynamique féminine. Il n’en reste pas moins qu’il y a certainement une affinité entre ces divers modes de cyclicité et que la femme est programmée pour s’y accommoder.

   Mais la liste serait longue de tout ce qui est susceptible d’instrumentalisation; encore faudrait-il qu’il s’agît d’objets matériels, palpables, visibles qui rendent possible une instrumentalisation inconsciente, relayée par l’organisme physique à l’insu du psychisme. Certes, au départ, le psychisme détermine le processus mais peu à peu ce dernier tend à lui échapper et à partir d’un certain seuil, de nouvelles informations ne seront pas opérantes car il n’est nullement question d’un système qui serait constamment en train de changer car cela empêcherait ou en tout retarderait sensiblement une nécessaire cristallisation. Pour que se mettent en place des habitudes - Bourdieu dirait un habitus - il faut qu’il y ait répétition, accoutumance. C’est pourquoi un flot continu, ininterrompu, d’immigration peut se révéler foncièrement déstabilisant pour la mise en place de relations sociales entre ensembles distincts.

   On rappellera que celui qui instrumentalise peut à son tour être instrumentalisé, c’est-à-dire être appréhendé non pas pour ce qu’il est mais pour ce qu’il n’est pas, vu qu’on ne lui demande qu’une certaine présence. Le juif est, de ce point de vue, à la fois instrumentalisant et instrumentalisé et en ce sens masculin et féminin. Il est instrumentalisant sur des bases que nous avons tenté, dans de précédentes études de cerner et il est instrumentalisé en ce qu’il est sujet aux représentations les plus diverses, chaque groupe humain tendant à se situer par rapport à la présence juive locale, à sa façon. Or, à partir du moment où des juifs ont été instrumentalisés dans une aire donnée, c’est cette image qui importe et il importe peu que ceux-ci protestent car c’est la dite image qui conditionne leur enracinement dans le cadre de la relation en question. Casser cette image, par un biais ou par un autre, conduirait, à terme, à remettre en question la qualité et la nature de la présence juive en un lieu donné.

   Comment mettre en évidence des relations instrumentalisées dans la mesure même où elles sont devenues inconscientes ? Il s’agit d’un problème de corrélation, à savoir l’existence d’un lien entre deux ensembles non reliées, a priori, causalement, c’est-à-dire sans rapport émetteur-récepteur s’imposant naturellement et universellement, de lui-même. La corrélation est une relation qui existe mais qui n’existe que dans des conditions très particulières. La mise en place d’une instrumentalisation implique un certain niveau de conscience qui n’a d’égal que le glissement vers l’inconscient qui finira par en résulter.

   Qu’est-ce qui nous prouve que certains astres aient été instrumentalisés par certaines sociétés de façon à bénéficier de leur dynamique ? L’élément instrumentalisant est dépendant de l’élément instrumentalisé quand bien même l’élément instrumentalisé n’existerait pas, du moins à un certain niveau, sans l’élément instrumentalisant. L’anglais est largement fonction du français qu’il a instrumentalisé, les sociétés sont fonction, dans les mêmes conditions, des astres, le femme de l’homme et ainsi de suite. Il y a certes des cas où l’on peut se demander s’il y a eu instrumentalisation entre A (instrumentalisant) et B (instrumentalisé) ou s’il s’agit d’une influence s’exerçant d’elle-même de B vers A. Dans les deux cas, le processus parvenu à maturité s’exerce inconsciemment. On distinguera les deux cas de figure en ce que le rapport d’instrumentalisation a des effets plus circonscrits que le rapport environnemental naturel. S’il pleut, tout le monde, dès lors qu’il s’expose sans protection, sera mouillé, il n’est pas besoin d’instrumentalisation pour que cela ait lieu ou non ; cela vaudra d’ailleurs aussi bien pour un homme que pour un chien, pour un livre que pour un vêtement. En revanche, quand il y a lien d’instrumentalisation, le facteur instrumentalisé n’exercera d’effet que sur le facteur instrumentalisant à l’exclusion de tout autre. Autrement dit, c’est l’exception qui confirme la règle, ce qui, on le conçoit, implique un revirement épistémologique. Une des applications les plus remarquables d’un tel modèle ainsi décrit est celui de l’astrologie et sans un tel modèle, il semble bien que l’astrologie, du moins une certaine astrologie, ne parviendra pas à être perçue comme réalité.

      1° Il importe de montrer qu’une telle corrélation ne concerne pas tout le monde, c’est-à-dire tout individu, ce qui implique un rejet de l’idée selon laquelle tout être disposerait d’un thème natal. Il n’y a pas de corrélation en rapport avec un seul individu, la corrélation concerne un réseau, dans le temps et dans l’espace.

      2° Toutefois, il importe de faire apparaître la corrélation au niveau d’un collectif, étant donné que si un élément est dans un rapport d’instrumentalisation, celle-ci se répercutera tôt ou tard sur l’ensemble environnant.

      3° Il conviendra de faire apparaître ce que nous appelons une double instrumentalisation, une sorte de réaction en chaîne. Le point 2 ne se produira, en effet, que s’il y a eu instrumentalisation au deuxième degré.

   Le cas juif illustrera le point 3. Pour que les juifs exercent un effet sur une société donnée, il importe que cette société leur accorde quelque importance, c’est-à-dire les repère et se situe par rapport à eux. L’antisémitisme - sous ses formes les plus diverses des plus subtiles aux plus brutales - est une expression caractérisée et somme toute normale de la relation juifs / non juifs.

   Il resterait à faire ressortir qu’astrologie et antisémitisme sont liés. Si l’on admet que les juifs sont le résultat d’une instrumentalisation par une société donnée de certaines configurations astrales, si l’on admet que ce processus détermine une certaine cyclicité, impliquant une certaine forme d’alternance comportementale, un tel mouvement périodique n’aura d’effet que sur des populations sensibles à la présence juive en leur sein et donc réagissant, à leur manière, aux amplitudes de ses manifestations.

   Mais quelle est précisément la place du juif dans la société, dès lors que nous en faisons un élément clef de toute étude de société, comme l’avait pressenti un Karl Marx dans sa Question Juive ? Si on laisse de côté les juifs immigrés et donc étrangers, on dira que les juifs de souche, dans un pays donné, préservent une certaine étrangeté, c’est-à-dire entretiennent, cultivent, leur singularité.

   Cette étrangeté juive, qui n’a rien à voir avec ce qui se dégage de l’étranger, tient à un faible coefficient de mimétisme : le juif en effet ne mimétise pas autrui mais est mimétisé par l’autre et l’on sait ce qu’il en est du rapport entre Chrétiens et juifs, notamment. Cette absence de mimétisme en fait un élément essentiellement masculin alors que l’errance juive est féminisante car vouée au mimétisme par rapport au pays d’accueil. D’où deux types de juifs qui cohabitent et s’opposent. Celui qui ne mimétise pas a un mode de fonctionnement autre, et est capable de raisonner autrement, avec plus d’acuité, ce qui conduit à ce que nous avons appelé la consciencialité.2

   L’homme juif authentique - car il n’y a pas pour nous stricto sensu de femme juive - est celui qui ne vient pas d’un quelconque ailleurs mais qui est partie intégrante de la société dans laquelle il se trouve et dont il est une composante inaliénable, selon une sorte de symbiose. Est-ce à dire que le non-juif est plus ancré au coeur de la dite société que le juif ? Dans le cadre d’une civilisation judéo-chrétienne, le juif occupe une position matricielle, il a une sorte de droit d’aînesse et l’aîné c’est celui que l’on suit, que l’on imite ou en tout cas par rapport auquel on se situe, que ce soit de l’ordre de la fascination ou du rejet. En outre, le juif est plutôt, on le conçoit, à l’origine du/d’un mouvement, ce n’est pas, a priori, quelqu’un qui “suit” le mouvement mais qui tendrait, en effet, à le précéder. En ce sens, il bénéficie, à différents titres, d’une position de primauté qui peut revêtir un caractère prophétique, précurseur. Mais, ce faisant, il peut surprendre par son originalité, par le fait d’avoir raison avant les autres, pour avoir un train d’avance. Est-ce que l’on ne pourrait pas dire que le juif interpelle le non-juif par le fait qu’il lui donne en permanence quelque chose de nouveau à digérer, ce qu’on appelle du grain à moudre.

   Il importe de distinguer une instrumentalisation à l’échelle individuelle, comme celle d’une femme pouvant, au cours de son existence, changer de nom, vivre des expériences fort différentes et une instrumentalisation au niveau de l’Inconscient Collectif et à laquelle on ne peut plus échapper. Cette dernière a une toute autre réalité que la première. Ce qui nous intéresse chez le juif c’est l’instrumentalisation en profondeur et non un mimétisme de surface. Pour nous le juif a un accès privilégié à l’essence des choses, par delà leur confusion apparente, à condition bien entendu de relativiser ce terme et de situer cette essence comme le résultat d’un long / lent processus de cristallisation.

   La notion d’instrumentalisation est essentielle pour penser l’épistémologie des sciences humaines et singulièrement des sciences sociales.3 La partie la mieux balisable des sciences sociales est, selon nous, celle qui relève de processus d’instrumentalisation, c’est-à-dire de la production d’artefacts, résultante de mises en relation entre les hommes et des objets matériels repérables dont la dynamique est canalisée et réorientée, lesquels artefacts finissant par avoir une présence incontournable, ce qui va à l’encontre de la thèse aujourd’hui dominante qui voudrait que les homme soient soumis à des rythmes, à des structures, dont ils ne seraient nullement responsables, lesquels existeraient quel que soit le niveau de conscience de l’Humanité.

Jacques Halbronn
Paris, le 7 décembre 2003

Notes

1 Cf. la rubrique Hypnologica, dans l’Encyclopaedia Hermetica. Retour

2 Cf. nos études sur E. H. et sur le Site Cerij.org. Retour

3 Cf. B. Bonfils-Mabilon, B. Etienne, La science politique est-elle une science ? Paris, Flammarion, 1997. Retour



 

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