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Editions RAMKAT

Thèse de Jacques Halbronn




THESE DE JACQUES HALBRONN

Chapitre 1

Almanachs et pronostications de Nostradamus

 

Sommaire :

  I - Introduction
 II - Le Janus Gallicus et la conservation des “présages”
III - Le secours des traductions


I

Introduction

     Il est un auteur, Michel de Notredame qui, de son nom de plume, signe Nostradamus et publie des Prophéties de Maistre Michel Nostradamus. En quelque sorte, ce faisant, l’auteur se met en scène, Nostradamus étant un double de Michel de Nostredame alias Nostradamus. Il y a un Nostredame auteur de Nostradamus, lui-même auteur de prophéties1, peut être sur le modèle des Prophéties de Merlin.

   Or, le premier corpus nostradamique, celui produit par un auteur du même patronyme, est complété par d’autres productions se présentant comme relevant de l’oeuvre du même Nostradamus. Celles-ci sont dues à d’autres auteurs qui laissent entendre qu’ils peuvent fournir des pièces complémentaires, au sujet d’un auteur / personnage appartenant au passé, et dont on aurait retrouvé des quatrains / sixains inédits, tout comme, à propos de Pantagruel, il est censé être question de chroniques d’un temps révolu, qui sont à la fois nouvelles puisqu’encore non publiées mais vécues depuis longtemps. Même stratégie chez le romancier épique et le faiseur de prophéties, laisser entendre que les choses se sont déjà passé ou ont été écrites jadis. Parler par exemple des imitateurs de Merlin ou de Nostradamus ne doit pas nous faire oublier que ceux qui sont ainsi copiés sont eux-mêmes des imposteurs ou plus exactement - car ils ne sont finalement que des personnages plus ou moins fictifs - les créations/créatures d’esprits inventifs.

Du prospectif au rétrospectif

   Pour Eugene. Parker (1923, p. 151), “afin de se faire passer pour prophète, il faut annoncer des événements possibles. Or, il n’y a rien de possible que ce qui s’est déjà passé et Nostradamus savait bien que l’histoire se répète. Aussi, pour se donner de bons sujets de prophétie, a-t-il eu recours à l’histoire passée, d’où il a extrait des événements frappants en les déguisant si habilement qu’ils ne se laissent pas facilement reconnaître.”

   Un tel constat est insuffisant: le succès de Nostradamus n’est pas uniquement dû à un texte attrape-tout, il faut aussi faire la part des éditions antidatées et des interpolations.

   Lorsque l’on rencontre un texte comportant une date remarquable, l’on peut se demander si l’auteur a bien “prévu” cette date ou bien si le texte a été écrit ou réécrit après coup2 ou encore, s’il a été écrit à l’occasion ou en phase avec l’événement en question. Il faut bien reconnaître que, sauf exception, l’historien du prophétique doit supposer dans ce cas de figure que la rédaction d’un tel texte est soit contemporaine de l’événement prétendument annoncé, soit postérieure à celui-ci, visant éventuellement à le justifier. Toutefois, il importe de ne pas tomber dans certains excès qui amèneraient à affirmer que tous les textes abordés sont plus tardifs qu’il ne paraît, sous prétexte que telle information ne pouvait être connue à l’avance, on ne saurait oublier que l’Histoire se répète. Qui ira soutenir que tel quatrain consacré à Varennes date de la fin du XVIIIe siècle et par voie de conséquence toutes les éditions comportant ce nom? Mais il conviendra tout de même d’expliquer par quel procédé le nom de Varennes figure, pour d’autres raisons que purement prédictives, chez Nostradamus, quelles sources, quels hypotextes, ont été utilisés qui ont abouti à faire figurer tel passage troublant après coup. Il convient, en effet, de distinguer la prophétie qui interpelle le lecteur contemporain de sa première publication et celle qui, du fait de diverses circonstances, fera sens ultérieurement.

   Abordons un instant un commentateur moderne des Centuries, Jean Charles de Fontbrune, Jean-Charles (de) (1980) qui connut dans les années quatre-vingt, un succès de librairie considérable, tant au niveau national qu’international - on ne compte plus les traductions - avec un titre significatif Nostradamus historien et prophète. Celui-ci, ouvrages d’histoire à l’appui dans la ligne d’un Chavigny en 1593, ou de l’auteur de l’Eclaircissement des véritables quatrains de 16563, va s’efforcer (pp. 47 - 49), de montrer que les Centuries ont annoncé un certain nombre d’événements qu’il relate depuis 1557, date à laquelle il considère que les Prophéties étaient parues. C’est ainsi que Nostradamus aurait prédit (pp. 56 - 62) la révolte du Duc d’Albe contre le Pape Paul IV (1557) au quatrain 29 de la centurie VII, la mort d’Henri II qui survint le 10 juillet 1559, la conjuration d’Amboise de mars 1560 (IV, 62), le Tumulte d’Amboise et la guerre des Guise (XII, 62), le ralliement d’Antoine de Bourbon au Triumvirat (IV, 88), la Paix de Cateau Cambrésis de 1559 (p. 83). Or, tous ces événements eurent lieu du vivant de Nostradamus et toute la question est de savoir si celui-ci ou d’autres après lui, en son nom, publièrent les quatrains en question, à une date où on ne pouvait en avoir pris connaissance4, pourvu cependant que ceux-ci ne soient pas d’une extrême banalité qui les ferait correspondre à n’importe quelle situation. Le problème des commentateurs tient au fait qu’ils ne veulent trouver dans les centuries que des prédictions réussies, qu’ils ne prennent pas en compte les projets avortés qui sont en fait la substance même du prophétisme ou encore qu’ils partent du principe que le texte prophétique ne puisse évoquer que des événements qui rétrospectivement s’avèrent toujours de la première importance, de préférence inscrits dans les manuels scolaires. Souvenirs d’école qui tendent à privilégier la période moderne, ce qui a pour effet de favoriser la dimension prophétique des textes aux dépens de leur dimension historique.

   A cela vient s’ajouter le prisme français - et aussi d’un savoir plus accessible à l’homme moderne - qui fait préférer la Corse (à cause de Bonaparte) à la Sicile dans tel quatrain nostradamique (I, 60) : ”Un Empereur naistra près d’Italie (…) Qu’on trouvera moins prince que boucher”5 et qu’il conviendrait plutôt, selon nous, de relier à Frédéric II, roi de Sicile et Empereur du Saint Empire, d’ailleurs parfois identifié à l’Antéchrist.6 Le terme “boucher” fait selon nous référence à l’accusation selon laquelle son vrai père aurait exercé ce métier, à Iesi (Iasi, actuelle Roumanie), lieu de sa naissance.7

   Une biographie de Nostradamus implique de déterminer quelles oeuvres parurent de son vivant et de son chef. Une autre question vient en corollaire: qu’est ce qui a été conservé des publications du dit Nostradamus ? Nous tenterons de faire le tri. Mais pour ce faire, nous sommes contraints d’amorcer dès à présent et simultanément la critique des différentes versions du canon - de la vulgate - nostradamique. Autrement dit, il ne nous est pas possible de faire le point sur l’oeuvre parue du vivant de Michel de Nostredame, sauf à nous contenter d’affirmations à vérifier ultérieurement, sans aborder toute la question des contrefaçons, des additions et des interpolations qui se sont succédé durant un siècle après la mort de l’auteur.

Pour une critique nostradamienne

   Que connaissons-nous, au vrai, des Centuries ? Nous savons de quelle façon elles se présentent, mais qu’en est-il de ce qui a fait leur succès initial et de ce qui a justifié au départ leur production ?

   Et encore, sommes-nous absolument certains du contenu de la première version des Prophéties ? Est-ce que Nostradamus n’a pas changé de genre, passant des prophéties perpétuelles, axées sur des séries d’années et constituées de brève formules en prose à des prophéties en quatrains qui n’offrent plus qu’incidemment de données datées, en tout cas pour le lecteur moyen car qui va aller retrouver dans les éphémérides que telle configuration correspond à telle date ? La fonction de ces quatrains centuriques est difficile à appréhender; certes, il s’est institué au cours des siècles certaines pratiques mais qui font fortement douter précisément de l’intention première de l’auteur. Comment le lecteur du XVIe siècle les percevait ? Nous le montrerons pour la période de la Ligue8, il s’agissait, selon nous, de repérer quelque “petite phrase”, une formule qui fasse mouche, qui annonce un événement attendu ou craint plutôt qu’elle ne vienne vérifier un fait déjà accompli. Nous avons montré que la parution du Livre Merveilleux dans les années 1560 - 1580 n’était vraisemblablement pas étrangère aux visées dynastiques des Guises, nous verrons que les Centuries n’ont pas davantage échappé à une certaine récupération politique, et ce dans le même temps et pour la même cause.

   Dans le domaine du prophétisme, l’effet d’annonce a priori nous semble beaucoup plus déterminant - en ce sens l’on pourrait parler d’une sorte de magie, de manipulation, prophétique qui viserait à créer, à peser sur l’événement -que le constat a posteriori de réussite d’un texte prophétique. C’est en cela que le prophétisme poursuit d’autres enjeux épistémologiques que l’astrologie, laquelle veut défendre un système. Il n’est pas du tout certain que le succès rencontré par Nostradamus ait été plus lié à un pronostic réussi qu’au fait qu’il ait su exprimer d’une façon frappante les espérances d’un royaume. En cela, le prophète est-il certainement poète, celui qui dit les choses autrement et de façon plus percutante en leur conférant une forte charge symbolique encore que cet impact soit compensé par la complexité formelle de rigueur.

   Qui peut affirmer pouvoir distinguer un vrai d’un faux quatrain de Nostradamus ? Qui peut dater de façon certaine une édition par l’étude de son papier, de sa typographie ? Il semble bien qu’il faille recourir à d’autres méthodes chronématiques pour parvenir à cerner une certaine genèse du texte.

   Les études nostradamiques souffrent en fait de deux travers qui affaiblissent sensiblement la vigilance des chercheurs : d’une part, ceux-ci ne sont guère surpris de voir des faits nettement postérieurs à la période de production de Nostradamus figurer dans tel ou tel quatrain, d’autre part, étant donné que les centuries sont censées avoir été achevées dans les années soixante, il ne serait donc pas besoin de se poser de questions sur l’influence des périodes plus tardives sur leur contenu, cela ne peut être que le fait d’une coïncidence. En d’autres terme, nous aurions deux catégories de nostradamisants : ceux qui partent du postulat que tout recoupement avec des événements est le fait de la vertu prophétique et ceux pour qui il ne s’agit que d’analogies faciles. Tout se passe comme si d’aucuns préféraient faire de Nostradamus un soi-disant prophète plutôt que de reconnaître que l’on puisse avoir affaire à des faussaires.

   En ce qui nous concerne, nous avons voulu ouvrir une troisième voie: les centuries ont été marquées par les époques traversées et c’est pour cela qu’elles ont pu acquérir un certain crédit. Autrement dit, il nous semble assez évident que le fait même qu’à chaque époque l’on ait pu se persuader que certains quatrains ou morceaux de quatrains pouvaient faire sens, en révèle ipso facto le caractère relatif.

   Un autre aspect qu’il nous semble essentiel de relever en introduction à cette dernière partie de notre travail concerne la prise en compte des clivages politiques: une fois mis en évidence un message politique favorable à tel camp, il en résulte que le dit message, du moins s’il est suffisamment explicite, ne peut cohabiter avec un message en sens inverse au sein du même ouvrage voire même au sein de la production d’un même libraire, à une époque donnée.9

   Il convient également de prendre en compte l’existence de génération: chaque époque doit gérer son rapport au prophétisme. Il est clair qu’une fois une échéance prophétique passée - qu’il y eut réussite ou échec d’ailleurs - il importe de continuer à se projeter sur un avenir relativement proche où les acteurs resteront ceux qui sont déjà sur la scène politique mais avec quelques années de plus. Or, un de ces acteurs peut mourir entre temps - expression de la dialectique nature / culture - et cela implique des réajustements. Mais il importe aussi de revoir les dates avancées et révolues, de repousser une échéance ou parfois de la rapprocher, selon les circonstances. Pour l’historien, il s’agit de se situer dans le contexte prophétique de l’auteur étudié: dans le cas de Michel de Nostredame et de sa génération des années 1550 - 1562, la perspective à court terme était celle de la conjonction de 1563/64 jusqu’en 1570. En revanche, pour les écrits au delà de 1562 / 1564, la nouvelle échéance serait celle des années Quatre-vingt, sautant par dessus les années Soixante-dix, le système des grandes conjonctions parcourant les décennies deux à deux, selon un cycle de 20 ans. La génération qui suivra la sienne, ou qui marquera ses dernières années, aura d’autres intérêts en rapport avec l’horizon des années Quatre-Vingt et la grande conjonction suivante de 1583 / 84, autour d’un Charles IX qui semble au début des années 70 un vecteur idéal alors que Nostradamus devait, du moins au début, investir sur Henri II. Dans les deux cas, la mort des souverains dérangera les plans. En tout état de cause, il importe de distinguer ce que Nostradamus a annoncé de façon plus ou moins datée et les dates qu’il a avancées en précisant peu ou prou ce qu’il en attendait.

   Or le passage d’une génération à l’autre semble avoir conduit à retoucher le texte nostradamien, faute de quoi, celui-ci aurait été décalé par rapport aux nouvelles spéculations. C’était le prix à payer pour que Nostradamus conservât son actualité et c’est apparemment ce que ne veulent pas admettre les partisans d’un Nostradamus capable - nouveau miracle ! - de dépasser son temps du seul fait de son génie ! Il va de soi que de telles considérations affectent la datation des éditions conservées par delà celle qu’elles affichent.

L’écueil unitaire

   Le piège dans lequel tombent la plupart des historiens est lié au passage d’un corpus nostradamique, englobant la totalité de la littérature de ce type10, à une tentative de description de cet ensemble en tant que relevant d’une seule et même inspiration en un seul et même temps. Avant de déterminer quelle est la pensée, la méthode, la vie d’un Michel de Nostredame, encore conviendrait-il en effet de séparer le bon grain de l’ivraie, ce qui est de cet auteur et ce qui ne l’est pas. Or, tout se passe comme si l’analyse de cette littérature au lieu de faire apparaître des clivages, des anomalies, comme dans la critique biblique, aboutit très vite à une volonté apologétique d’intégrer celle-ci en un tout cohérent et d’un seul tenant11, ce qui trahit les limites de ce qui est au mieux une paraphrase. Dès que cette confusion bibliographique se traduit en relation biographique, nous avons des formules du genre : “En 1558, Nostradamus va moins loin, remplaçant l’impulsion de l’inspiration divine par un naturel instinct12, prenant ainsi pour argent comptant13 la date de 1558 pour l’Epître à Henri II et ignorant apparemment l’existence, malgré Daniel Ruzo (1982)14 qui n’est pas cité, d’une première Epître au Roi de janvier 1556 / 1557, en tête des Présages Merveilleux.

Contrefaçons et reconstitutions

   Si nous traitons fréquemment de faux, nous ne sommes certainement pas le premier des historiens de la matière nostradamique à nous essayer à les signaler. Bareste, en 1840, dans son Nostradamus tente de faire un historique de la question des fausses éditions, au risque, dit-il, de lasser son public féminin. Mais Bareste n’y voit pas pour autant de motif pour remettre en cause l’image du prophétisme. Soit la contrefaçon serait grossière, soit innocente et ne ferait que reproduire à l’identique des éditions antérieures. L’un des personnages les plus troubles est certainement Chavigny auteur-compilateur - et pas seulement dans le Janus François - de la première tentative d’élaboration du canon.

   A propos de l’édition “Pierre Rigaud” de 1566, le directeur de l’Almanach Prophétique concède : “Cette édition paraît n’avoir été faite que dans le siècle suivant (soit le XVIIe) tout comme d’ailleurs l’édition lyonnaise de 1557 (cf. infra). Il est probable que Pierre Rigaud, ayant donné plusieurs éditions des Prophéties, l’exemplaire que nous avons sous les yeux appartienne à une contrefaçon faite dans le XVIIe siècle sur une édition préparée par le Frère Jean Vallier (...). L’édition vraiment donnée par Pierre Rigaud et que nous avons mentionnée(…) est in 32, (l’autre) pourrait être la contrefaçon d’une édition authentique est in 18.”15

   Et Eugène Bareste de rappeler les thèses de Bellaud à propos d’ “une contrefaçon qui, quoique datée de Lyon, 1568, a été imprimée à Paris en 1649 et dans laquelle il a été inséré deux faux quatrains qui sont les 42 et 43 de la septième centurie.”

   Le fait de produire des quatrains additionnels était au vrai maladroit, surtout en ne respectant pas l’organisation interne du canon, qui veut 42 quatrains à la VII et non 44. On peut à la rigueur en enlever, point en ajouter, sinon en en supprimant de plus anciens.

   Monde d’imitateurs et d’imitations mais où la mauvaise monnaie a chassé la bonne et où une contrefaçon en cache une autre. Nous verrons qu’il existe aussi des plagiaires - si tant est qu’il faille user d’un tel terme diffamant - comme Crespin - qui recomposent le texte nostradamique sans l’annoncer. En fait, de telles actions offrent pour nous un avantage principal, celui de nous aider à dater les étapes de la mise en place du canon nostradamique.

   Il semble que le premier réflexe face à un faux soit de se persuader qu’au moins les autres éditions ne le sont pas, sous prétexte qu’elles sont moins grossières. Toutefois, il convient d’éviter les mauvais procès : on nous parle d’imitateurs alors qu’il s’agit peut être de successeurs patentés et officiels, on nous parle de contrefaçon, alors qu’il ne s’agit que de ce qu’on appellerait de nos jours un reprint. Ce sont souvent les commentateurs qui confèrent aux éditions une ancienneté qu’elles ne prétendaient peut être pas avoir, ce sont les conservateurs qui, par incurie, proposent à la légère certaines dates qui ne figurent peut être sur certaines éditions qu’à titre de référence, alors que dans le corps de l’ouvrage, des additions portant des dates postérieures montrent bien qu’il n’y avait pas expressément volonté de tromper. Certes, ce faisant, l’on introduit parfois des anachronismes en projetant dans le passé des éditions modernes que l’on imagine identiques à celles, disparues, qui les ont précédées. Tel libraire ne souhaitait peut-être à l’origine que rappeler l’âge vénérable du document, sans y voir à malice. Le terme de reconstitution serait souvent préférable : une telle entreprise peut tenir précisément à la disparition des premières éditions, si elles n’ont pas été supprimées systématiquement. Des maladresses ont été à chaque fois commises qui aident l’historien vigilant à ne pas être dupe. On ajoutera que certains quatrains étaient à l’époque de leur parution perçus comme des échos manifestes de l’actualité. Ce n’est qu’avec le recul des siècles qu’on leur a accordé une valeur prédiction. Le prophétisme nous apparaît comme un mélange d’histoire, de polémique, et de propagande avec ce que cela implique de conditionnement de l’opinion, plutôt que comme une volonté de connaître un avenir défini en dehors de l’Homme. Les descriptions à caractère historique ou géographique correspondraient d’abord à une vague idée de la permanence des choses qui se confond souvent avec leur récurrence.

   On a du mal à cerner quel fut l’impact des Centuries du temps même de Michel de Nostredame. Comment celles-ci furent-elles reçues ? Nous pensons qu’elles devaient comporter une clef permettant de s’orienter dans le dédale de ces quatrains. En effet, nous avons découvert (cf. infra) un tel procédé à propos des Sixains : une première version était accompagnée d’une clef en bonne et due forme, véritable “pierre de Rosette” permettant de déchiffrer le message. Il semble difficile de reconstituer après coup d’éventuelles clefs pour les quatrains mais l’existence de celles-ci ne nous parait pas improbable, en raison de certaines répétitions de termes comme “rouges”, “razes” etc. Il est rare qu’un nom propre serve de clef. Notons que le propre du décodage des clefs semble être a priori, au départ, de ne pas accompagner le texte de référence. Autrement dit, la littérature nostradamique, toutes strates confondues, serait liée à un système de clefs et il est remarquable qu’en dehors d’une formule comme Chiren pour Henri relativement transparente et de quelques autres anagrammes16 ou noms “contournés” (selon l’expression du Janus), dont certains sont si accessibles qu’ils posent problème quant à la date de leur publication (cf. infra), les commentateurs n’aient guère développé une telle ligne de recherche. L’étude de la clef des sixains montre en tout cas que les conventions utilisées ne s’inventent pas et que la lecture de ces textes est relativement bien protégée.

   De même que sous le nom de Mirabilis Liber, un ensemble de pièces d’origines fort diverses est organisé, de même sous le nom de Nostradamus - autre nom à consonance latine, l’on tente de préserver une unité de temps et d’espace qui dissimule mal la diversité des contributions et leur étalement historique. On étudiera dans un premier temps l’oeuvre de Michel de Nostredame, celle qui peut lui être raisonnablement attribuée en la dégageant - ne serait ce que pour restituer une biographie acceptable, de divers faux antidatés.17 Dans un second temps, nous nous intéresserons à la postérité de Nostradamus, qu’il s’agisse de ses imitateurs ou de ses exégètes.

   Si la date de 1789 fait partie intégrante du prophétisme français et si elle figure en premier lieu en 1414 chez Pierre d’Ailly, c’est en fait à partir de la seconde moitié du XVIe siècle par le truchement de l’Epître (remaniée) à Henri II qu’elle fera carrière durant les XVIIe et XVIIIe siècles, quelque peu modifiée en Mil Sept Cens Nonante Deux et c’est dans la mesure où cette Epître a pu être traduite que la prophétie alliacienne pour la fin du XVIIIe siècle a pu se répandre à l’étranger.18 L’oeuvre nostradamique se prête à une sorte de critique biblique. Celle-ci, jusqu’à présent, s’est manifestée essentiellement dans la mise en évidence d’éditions antidatées et de quatrains ajoutés tardivement, guère dans la mise en cause de l’attribution de l’oeuvre nostradamique au seul Michel de Nostredame comme si l’on préférait mettre les incohérences sur le compte de celui-ci, quitte à le présenter, comme le fait Pierre Brind’amour (1993), comme un personnage à la pensée assez alambiquée et dont il ne faut guère attendre de rigueur et de suite dans les idées. Si l’oeuvre est le reflet d’un seul auteur, l’on imagine en effet quelle représentation l’on peut s’en faire; dès lors, le malentendu sur l’oeuvre rejaillit sur l’appréhension de l’homme Michel de Nostredame.

   Nous nous sommes efforcés de rechercher des critères permettant à la fois de mieux cerner l’organisation du discours prophétique de Michel de Nostredame et d’isoler la présence d’autres discours, fonctionnant sur d’autres bases.

   Il semble que jusqu’à présent, les seules tentatives qui aient tendu vers la recherche de corrélations entre le texte nostradamique et des données extérieures ont concerné l’astronomie et certains événements du début du XVIIe siècle reflétés dans les sixains. Nous pensons être parvenu à renforcer une telle recherche toutefois hypothéquée par le fait que rien, dans l’absolu, n’empêchait Michel de Nostredame, en sa qualité de prophète, de traiter du futur pour ne pas parler du passé. Ne devenait-il pas ainsi vain de mener à bien de telles corrélations en vue d’une quelconque datation de l’oeuvre, est-ce qu’il ne fallait pas, à la façon d’un P. Brind’amour (1993), se contenter d’expliquer certains passages sans autre implication ? Nous avons pensé qu’il importait d’aller au delà d’un tel enjeu : nous avons donc renoncé à imaginer que Michel de Nostredame pouvait prévoir des événements au delà d’une certaine précision et ce notamment jusqu’au milieu du XVIIe siècle, période de gestation du canon centurique.19 De la même façon, nous avons essayé de dégager une certaine cohérence dans le calendrier prophétique du médecin de Salon et n’avons pas, à la différence de P. Brind’amour (1993), laissé entendre que ses spéculations étaient confuses ou incohérentes, ce qui nous aurait interdit toute tentative de tri entre ce qu’il fallait lui “rendre” et ce qu’il convenait d’attribuer au club des nostradamistes.

   La crédulité des chercheurs dans le domaine centurique a achoppé toutefois sur les 58 sixains qui font partie du canon. On s’est évidemment demandé les raisons de ce passage de strophes à 4 versets à des strophes à 6. On peut penser d’ailleurs que s’il s’était agi encore de quatrains, le scepticisme aurait été moins aiguisé. De plus en plus de chercheurs ont admis que certaines corrélations trop nettes en devenaient suspectes.20 C’était ouvrir une brèche que nous avons considérablement élargie.

   L’on a parfois noté21 que les 58 sixains venaient compléter ainsi les 42 quatrains de la septième centurie - 42 étant le nombre finalement admis.22 Après une période de flottement, les éditions de la fin du XVIe et du début du XVIIe comporteront en effet une VIIe Centurie à 42 quatrains.23 On aurait ainsi disposé de dix centuries pleines. Le choix des sixains aurait été en fait dû à l’utilisation d’un document déjà existant, ce qu’on aura préféré à la rédaction fastidieuse de 58 nouveaux quatrains.

   Pour les exégètes de Nostradamus, au XVIIe siècle, les sixains faisaient encore bel et bien partie du canon nostradamique comme l’attestent leurs commentaires, notamment chez le médecin protestant Jacques Massard. Quant aux historiens de l’oeuvre nostradamique, tels Pierre Brind’amour (1993), Robert Benazra24 ou Michel Chomarat25, les Centuries de quatrains, au moins, semblent constituer un tout d’un seul tenant dont ils ne parviennent pas à séparer franchement les composantes. Pourtant, comment imaginer, par exemple, que le sixain 52 qui mentionne la Saint-Barthélemy (1572) n’a pas été rédigé après coup et donc nécessairement après la mort de Michel de Nostredame en 1566.26

   Hormis, en fait, quelques quatrains placés à la fin de certaines centuries - sous la Fronde par exemple - l’on n’a pas jusque là, à notre connaissance, discerné de strates au sein des Centuries ni repéré de sources, d’emprunts ou d’interpolations. sinon de façon très ponctuelle.27

Un corpus pour le XVIIe siècle

   Nos recherches tendent à mettre en évidence le fait que le corpus nostradamique ne parvient à maturité que dans la première moitié du siècle qui suit son émergence. La période de la Ligue28 et encore dans les dernières années, à partir de 1588, enrichira considérablement le dit corpus.29

   En déplaçant au temps de la Ligue et aux années du tournant du dix-septième siècle, soit en gros jusqu’à la mort d’Henri IV pour ce qui est des sixains, le temps de la cristallisation de l’oeuvre centurique, nous avons ouvert un champ qui restait jusqu’à présent réservé à l’exégèse, on songe évidemment au Janus Gallicus, aux Pléiades de Chavigny.

   Désormais, la recherche des sources et l’idée même d’édition critique - ce qui semble avoir largement échappé à un Pierre Brind’amour - devra se concentrer sur les relations entre la rédaction des centuries et les événements politiques de la seconde partie du seizième siècle, sans bien entendu négliger l’étude de références plus anciennes déjà bien avancée par le chercheur québécois qui, toutefois, semble mieux connaître les sources anciennes que celles du XVIe siècle - on pense notamment à l’apport du Guide d’Estienne.

   Une édition critique des centuries exigera dès lors de repérer le maximum d’allusions à des événements qui jusqu’à présent paraissaient hors du champ des sources puisque considérés à tort comme postérieurs à la rédaction, à moins bien entendu de se placer dans la logique du prophétisme annonçant ce qui est à advenir. L’étude de la seconde moitié du siècle devrait désormais ne plus être le fait des commentateurs. Le signifiant centurique, c’est-à-dire l’établissement du texte proprement dit, ne s’est pas clos en 1568 mais un demi-siècle plus tard pour l’essentiel ; on croyait jusqu’à présent qu’il n’était plus question au delà de cette date - sauf pour les sixains - que de passer au stade du signifié, c’est-à-dire de la glose.

   Nous commencerons par étudier la production d’almanachs et autres pronostications. En effet, un certain nombre d’exemplaires en ont été conservés alors que le problème est plus complexe en ce qui concerne les Centuries.

Almanachs et centuries : les quatrains

   Il nous semble que les quatrains les plus accessibles furent ceux des almanachs. Ces quatrains, comme ceux des centuries, sont truffés de termes géographiques à telle enseigne que l’on pourrait parler d’un prophétisme des noms propres qui est assez unique en son genre même s’il ne s’agit peut être au départ que d’une façade. On peut supposer que Michel de Nostredame s’illustra d’abord par ses commentaires du calendrier.30 Le succès des almanachs de Nostradamus31 pourrait avoir été dû en réalité à ses oracles quotidiens, ce qui en ferait en quelque sorte l’ancêtre de nos horoscopes de presse encore que l’on trouve, chez un Oronce Finé32, à propos des 28 mansions de la Lune, des observations mais qui reviennent chaque mois à l’identique du genre “Il fait bon marchander, semer, faire mariages & maulvais faire gaigeure” (mansion 28).

   En témoigne l’almanach pour 1559 de la Lambeth Library (Londres) :

   “There be also added to this Almanack the Ides and Nonas wyth the interpretation of the authour thereof in short and mysticall sentences what things shall happen upon every daye in the same.” La présentation anglaise semble ainsi insister sur ce qui singularise l’oeuvre, la présence de petits oracles au jour le jour, dans les colonnes mêmes du calendrier qui accueillent traditionnellement les phases de la Lune comme c’est encore le cas de nos jours pour le calendrier des postes.

   Chaque mois comporte deux pages numérotées identiquement, l’une fournit les saints et l’autre les oracles, Un cas remarquable est l’almanach pour 1566 de la Osler Library (Montréal).

   C’est d’ailleurs au sein du calendrier que se fixeront les quatrains de Nostradamus et non dans les pronostications. Les Centuries apparaissent dès lors comme un recueil de quatrains pouvant servir pour illustrer les calendriers. L’idée de placer des quatrains dans les calendriers n’était d’ailleurs pas neuve puisque c’est déjà le cas, on l’a dit, dans le Kalendrier des Bergers pour chaque mois de l’année. Mais sait-on vraiment quel était le mode d’emploi de ces Centuries, dans l’esprit de leur auteur ? Dans sa préface à César, Michel de Nostredame s’y réfère comme à des “vaticinations perpétuelles”, ce qui pourrait impliquer, entre autres hypothèses, une sorte de cyclicité, tel le système trithémien de 354 ans.33 (voir Livre I).

   On ne saurait opposer Almanachs et centuries dans la mesure où les Présages, tels qu’on les nomme de façon assez inappropriée, intégrés au sein du canon nostradamique, sont issus des quatrains figurant dans les publications annuelles de Michel de Nostredame. Ce sont en tout cas ces productions qui ont fait d’abord la gloire de l’auteur probablement en raison de quatrains figurant dans ses almanachs et qu’il convenait de déchiffrer et c’est probablement en raison du succès de ces quatrains là que Nostradamus décida ou reçut commande d’en rédiger un recueil. Mais pouvait-il être aussi pertinent et incisif dans le court terme que dans le long terme ?

   L’avantage de ces textes annuels, donc à consommation immédiate, devenus extraordinairement rares - la BNF n’en conserve aucun ! - et n’ayant pas fait l’objet de rééditions sinon à la fin du XIXe siècle pour quelques uns, est de constituer une base fiable, du moins pour les premières années, dans un contexte marqué par une profusion de fausses éditions des Centuries.

Les premiers échos aux quatrains

   Il y a un saisissant contraste entre l’accueil prétendument triomphal des centuries et le peu d’échos que l’on est en mesure de recueillir. En dehors des éditions proprement dites des centuries, à combien de reprises trouve-t-on mention de tel ou tel quatrain, au cours de la seconde partie du XVIe siècle ? Bien maigre moisson au demeurant et notamment chez les adversaires, les satiristes, les imitateurs qui ne fournissent guère de matière en dehors des Prophéties dédiées à la Puissance Divine & à la Nation Françoise (PDPDNF) de 1571, qui se révèlent à ce propos extraordinairement précieuses mais sous une forme déconstruite.

Le témoignage d’Estienne Pasquier

   Les attestations extérieures aux oeuvres signées Nostradamus concernant la lecture des Centuries avant les années quatre-vingt sont rarissimes; Nostradamus ne les mentionne même pas dans ses “Epistres Latines” manuscrites, c’est-à-dire un échantillon de sa correspondance, ce qui est étonnant pour un texte ayant connu, prétend-on, une vogue extraordinaire. En revanche, lorsque l’on considère une période plus tardive, l’on en trouve de significatifs comme la lettre d’Estienne Pasquier à Airault, qui date de 158934 et vise un quatrain issu des trois premières centuries.

   “Dans les Centuries de Nostradamus de l’an 155335 (sic), il y a un quatrain qui semblait prédire l’émotion que nous vismes l’an passé, entre le Roy & les Parisiens (...) :


Paris conjure un grand meurtre commettre
Bloys luy fera sortir son plein effect36
(...) Il me souvient qu’allant à Bloys avec Monsieur des Marquets (...) nous tombasmes sur ces quatre autres vers de Nostradamus (cf. Centurie III, Quatrain 55)
En l’an qu’un oeil en France règnera
La Cour sera en un bien fascheux trouble
Le grand de Bloys son ami tuera
Le Règne mis en mal & doute double.” (Livre XIII, Lettre VI)37

   Le témoignage d’Estienne Pasquier est postérieur à l’Epître au Président Larcher de 1570, placée en tête de l’Androgyn de 1570, à l’instar du deuxième commentateur, citant explicitement un quatrain que nous connaissions des Centuries, bien avant Chavigny (qui semble avoir amorcé son travail dès 1589 mais ne le publia qu’en 1593 / 94).38 Rappelons la parution, à Vienne (Dauphiné), en 1513, des Avertissemens es trois estats du monde selon la signification de ung monstre (Ars, 4 Sc A 3822) comprenant des éléments de Lichtenberger (voir Livre II).

   En revanche, Blaise de Monluc au quatrième livre de ses Commentaires39, paru en 1592, à Bordeaux, témoigne, avec quelque recul il est vrai, qu’en juin 1558 Henri II avait fait lire des “présages” de Nostradamus. Il pourrait s’agir d’une édition non conservée40 des Présages pour 1559, sur le modèle des Présages Merveilleux pour 1557 mais le terme présage peut désigner non pas un ouvrage en tant que tel mais un passage en vers ou en prose.41

   Mais peut-être un des témoignages les plus anciens serait celui rapporté par Chavigny, dans le Janus Gallicus, à propos de Dorat, Jean.42 Le 5 janvier 1567, le poète aurait mentionné de mémoire, à propos d’un fait divers comme dans le cas de l’androgyn, un quatrain des centuries :

En la cité où le loup entrera
Bien près de là les ennemis seront

   Or, ce quatrain est le 33e de la centurie III et se complète ainsi :

Copie estrange grand pays gastera
Aux murs & Alpes les amis passeront.

   A ce propos, il semble bien que le Janus Gallicus ait emprunté assez largement à J. Dorat des éléments d’une oeuvre qui ne nous est pas parvenue autrement. Dans le Recueil de Présages Prosaïques (RPP), Chavigny signale la lecture de Dorat à savoir “loin” pour Louis de Bourbon.43

II

Le Janus Gallicus et la conservation des “présages”

    Avec le Janus Gallicus avait débuté la publication de biographies de Michel Nostradamus qui vont évidemment accréditer l’idée de la paternité de Michel de Nostredame sur l’ensemble de l’oeuvre nostradamique. L’auteur anonyme de l’Eclaircissement des véritables quatrains de 1656 semble bien tout ignorer ainsi de l’importance des éditions de la Ligue44 pour la formation de la somme centurique :

   “Il est asseuré, écrit-il, qu’ils (les quatrains) commencent l’an 1555 au mois de janvier parce qu’il dédia les 7 premières Centuries à son fils César l’an susdit au premier jour de Mars & par conséquent il est à croire qu’il les avait déjà fait & c’est le moins que nous puissions donner à un Auteur pour composer 700 quatrains (...) Quant à la huitième, neuvième & dixième Centurie, l’on pourrait croire que la prophétie n’en commence que depuis l’an 1558 le 27 juin dont son Epistre liminaire au Roy Henry II est datée; néantmoins il dit en la même epistre qu’il fera dans un escrit à part l’éclaircissement de ses quatrains commençant du 14 mars 1557 & dans son Epistre à Nostradamus son fils, il luy dit en général qu’il avoit composé livre de prophéties contenant chacun cent Quatrains sans spécifier s’il parlait des sept qu’il lui dédioit ou de tous les autres.”

   Giffré de Rechac n’explique pas pourquoi sur ces sept centuries, l’une n’est pas complète, à savoir la septième qui n’a qu’une quarantaine de quatrains.

   Son contemporain David Derodon pourrait davantage être considéré, selon nous, comme un pionnier de la critique nostradamique. En tout cas, il parle de fausses éditions dans son Discours contre l’Astrologie Judiciaire légèrement postérieur à l’Eclaircissement de Giffré de Rechac de 1656.45

   Il faudra toutefois attendre le XVIIIe siècle pour que se mette en place une véritable méthode critique avec un article-lettre du Mercure de France paru en août 1724 sous le titre “Lettre Critique sur la personne & sur les écrits de Michel Nostradamus” et dont nous avons retrouvé le manuscrit d’origine (BNF, Fonds Français 12294) avec le titre “Les conjectures de mon père sur les prétendues prophéties de Nostradamus et ses explications. Lettre écrite en réponse à un de mes amis qui me demandait ce que je pensais de Nostradamus”. Le manuscrit en date de 1720 est plus complet et comporte notamment les remarques suivantes qui ont été supprimées lors de l’impression : “Les centuries VIII, IX et X ne sont point de Nostradamus”46 Selon l’auteur de cette Lettre, “il est clair comme le jour que cette édition s’est faite pendant les guerres de la Ligue qui désolèrent le Royaume vers la fin du XVIe siècle.”47

   Nous disposons en fait de deux recueils de publications annuelles, tous deux réalisés par Jean Aimé de Chavigny à partir de collections d’almanachs, de pronostications et de présages parvenus en sa possession. L’un - Les Merveilles de nostre temps ou Recueil des Présages prosaïques de Maistre Michel de Nostradame lors qu’il vivoit, conseiller du Roy Tres Chrestien Charles IX (...), extrait des Commentaires d’iceluy & réduit en XII livres par Jean Aimé de Chavigny Beaunois, conservé en manuscrit - porte la date de 1589,à Grenoble, dans la zone d’influence de la Ligue48, l’autre - le Janus Gallicus - dont on ne connaît que les éditions parues l’année du couronnement d’Henri IV (1594) à Chartres, commente des quatrains issus aussi bien des almanachs que des centuries. Il convient en outre d’accorder toute son importance aux Prophéties dédiées à la puissance divine et à la Nation française d’Antoine Crespin, parues probablement, dans une première version, au début des années 1570. Mais si dans le cas du commentaire de Chavigny, nous disposons d’un certain nombre d’almanachs de Nostradamus, parus de son vivant, en revanche, pour ce qui est de Crespin, nous ne pouvons comparer qu’avec des documents plus tardifs mais qui reprennent en grande partie le contenu des premières éditions des Centuries. En tout état de cause, on ne peut retenir a priori, dans ce dernier cas, que les éléments qui convergent avec la compilation de Crespin, la question étant de savoir si l’on peut tracer sur cette base quelque topographie des centuries précrespiniennes. En fait, Crespin serait un Nostradamus à la puissance 2 : au lieu d’apprivoiser le texte centurique par un travail exégétique en bonne et due forme, il lui inflige un traitement qui l’éloigne encore plus de la source où Michel de Nostredame est allé le puiser, le conduisant ainsi à une désarticulation, à un démantèlement de sens, quitte à adresser un texte déchiqueté, à des personnages, eux, en chair et en os, et qui devront s’en débrouiller.

A - Le Recueil de Présages Prosaïques

   Le Recueil de Présages Prosaïques a-t-il jamais été imprimé ? La Bibliothèque Municipale de Lyon La Part Dieu, depuis 1991, en conserve un exemplaire qui se présente comme un manuscrit (MS 6852) prêt à être imprimé à Grenoble.49 Peut-être en existe-t-il plusieurs copies manuscrites ?

   Jean Aimé de Chavigny fait allusion à ce recueil factice50 dans le Brief discours sur la vie de Nostradamus : “Nous avons de luy d’autres présages en prose faits depuis 1550 jusques à 67, qui colligez par moy la plupart & rédigez en XII livres sont dignes d’être recommandés à la postérité.” (p. 7)51 Massard note en 1687.52

   “Nostradamus a fait aussi des Prophéties en prose qu’on a imprimées depuis quelque temps à Rouen mais je ne les ai pu voir.”53

   Dans son Epître à Henri IV en tête du Janus François, il est cité un passage des “Présages” pour 1563 lequel vise un texte en prose et nullement quelque quatrain.54

   L’étude de quelques pages du Manuscrit MS 6852 (cf. supra) de la Bibliothèque de Lyon nous éclaire sur le dit Recueil des Présages Prosaïques de M. Michel de Nostradame (sic) (...) Extrait des Commentaires d’iceluy & réduit en XII livres par Iean Aime de Chavigny Beaunois.55 Au regard du sous titre, il semble qu’il s’agisse d’un premier jet du Janus François :

   Oeuvre qui se peut dire à la vérité, Les merveilles de nostre temps, ou se verra à l’oeil toute l’histoire de noz troubles et guerres civiles de la France, dez le temps qu’elles ont commencé, iusques à leur entière fin et période (...) Extrait des Commentaires d’iceluy & réduit en XII livres etc.

   Comparons avec le sous-titre de la Première Face du Ianus François en notant la date de 1589 :

   Contenant sommairement les troubles, guerres civiles & autres choses mémorables advenues en la France & ailleurs dès l’an de salut MDXXXIII iusques à l’an MDLXXXIX (...) Extraite et colligée des centuries et autres commentaires de M. Michel de Nostredame etc.

   Le manuscrit dont nous disposons désormais à Lyon semble ainsi incomplet par rapport à son titre car il ne comporte que la reproduction des textes annuels - pas un seul quatrain centurique n’est reproduit. En fait, le corps du recueil est uniquement constitué de la copie, selon l’ordre chronologique, de la production annuelle de Nostradamus, seules quelques observations, dans les marges, constituant l’ébauche du commentaire tel qu’il sera mis en place dans le Janus Gallicus, mêlant cette fois les quatrains, toutes origines confondues.

   Chaque Livre du Recueil reprend en fait le titre de “ (…) Recueil des présages prosaïques de Mich. de Nostradame. Livre (…)” et se termine par la mention “Fin”.

   Certes, comme le note Brind’amour56, on y trouve, pour chaque année les quatrains des almanachs, ce qui explique probablement pourquoi le terme “Présages” leur a été affecté dans les éditions du XVIIe siècle : les bibliographes n’ont pas recensé d’édition des Présages avant 1628 / 1630.57 Ils sont alors intercalés entre les derniers quatrains et les sixains.58

   Dans le “Brief Discours sur la vie de M. Michel de Nostradame”59, le présage sur l’année 1555 est signalé comme étant le premier de la série60, ce qui pourrait laisser entendre qu’une édition de l’ensemble des Présages ait pu déjà avoir eu lieu lors de la parution du Janus François. En effet, le quatrain en question est bien celui qui figure en tête alors que cela aurait pu être “De l’Epître liminaire sur la dite année” qui ne vient en fait qu’en second. En fait, il semble que nous ayons affaire à une interpolation maladroite :

   Il “se mit à escrire ses Centuries & autres présages commençant ainsi (...) lesquelles il garda longtemps sans les vouloir publier”.

   Le quatrain suivant apparaît alors :

“D’ESPRIT divin l’ame présage atteinte
Trouble famine peste, guerre courir
Eau, siccité, terre & mer de sang teinte
Paix, tresve, à naître, Prélats, Princes mourir”

   qui correspond au quatrain introductif de l’an 1555.

   Le Janus François (Lyon, 1594), beaucoup mieux connu, apparaît aux yeux du chercheur une citadelle incontournable du corpus nostradamique, tous quatrains confondus et pourtant son compilateur Jean Aimes de Chavigny n’a pas hésité à transformer nombre de quatrains sans parler de ses traductions latines fantaisistes. Grâce à Chavigny, des quatrains oubliés connaissent une nouvelle fortune, sont recyclés. Mais est-ce également le cas des quatrains des centuries ?

La conservation des almanachs et autres textes annuels

   Les almanachs de Nostradamus ne furent pas au demeurant à l’abri des contrefaçons, ce qui d’ailleurs vient confirmer leur succès. On connaît deux almanachs nostradamiques pour 1563. L’un, authentique, parait à Avignon, chez Roux et a fait l’objet d’une reproduction moderne, l’autre est conservé à la BM de Lille et est considéré comme un faux, utilisant des quatrains des almanachs pour les années 1555, 1557 et 1562.61

   P. Brind’amour (1993) a relevé62 que l’Epître placée après le calendrier et dédiée à François de Lorraine, duc de Guise, était quelque peu imitée de l’Epître à Henri II placée en tête des dernières centuries, selon l’agencement habituel. Serait-ce là la preuve que cette Epître à Henri II serait parue à cette date ou bien s’agit-il d’une influence exercée par l’Epître au Roi placée en tête des Présages Merveilleux pour 1557 et dans ce cas nous aurions avec le faux de 1563 une esquisse de la fausse Epître à Henri II à laquelle fera référence Antoine Crespin après la mort de Michel de Nostredame ?

   Ci-dessous les variantes d’un passage introductif attesté dans la première Epître à Henri II :

   Présages pour 1557
“laquelle ma fait prendre ceste licencieuse audace vous consacrer les présages de lan”

   Almanach pour 1563
“m’a fait prendre l’audace vouloir consacrer ce mien petit ephemeris”

   Nouvelle épître à Henri II
“je viendrais consacrer ces trois Centuries du restant de mes Prophéties parachevant la miliade et après avoir eu largement cogité d’une téméraire audace.”63 Cette formule vise en fait les dix centuries, sans tenir compte du fait que la centurie VII est incomplète. Elle figure probablement pour la première fois dans la pseudo-édition de Cahors, au sein de l’Epître à Henri II, introduisant les centuries numérotées de VIII à X.64

   On observe que la formule des Présages Merveilleux est relativement plus proche de celle de l’Almanach pour 1563. Mais nous percevons surtout ainsi comment le moule introductif utilisé en 1556 / 57 et 1563 a pu être réutilisé quelques années plus tard par rapport à un autre texte, à savoir un groupe de centuries. Les observations de Brind’amour (1993) quant à la parenté des deux textes ne font en fait que confirmer la thèse de la fausse Epître et dès lors le fait que cette Epître, dans sa version la plus tardive (c 1590) renvoie à un millier de quatrains n’a évidemment aucune valeur de témoignage.

   Les almanachs et les pronostications semblent, au bout du compte, avoir constitué le fer de lance de la popularité de Nostradamus comme “prophète” ou en tout cas comme “astrophile” et, qui plus est, ne pas avoir fait l’objet de faux au cours des années 80 - 90 et plus, ce qui n’exclut pas pour autant les imitations d’époque par les soins, dans les dernières années de la vie de Michel de Nostredame, à partir des années soixante du siècle, d’un Nostradamus le Jeune ou d’un Antoine Crespin, Antoine Nostradamus65, les “faux enfants” de Nostradamus, comme les appelle Edgar Leroy.66

   Si les Centuries ne semblent pas avoir connu de traduction avant la seconde partie du XVIIe siècle, les almanachs et les pronostications, qu’il en soit ou non l’auteur, sont attestées du vivant de Nostradamus en anglais, en italien et même en allemand ou en tchèque.67 Dans la dernière décennie du siècle, des textes paraîtront sous son nom à Anvers en flamand (Bib. Anvers). En fait, on ne trouve de traduction des quatrains des almanachs qu’en anglais et non en italien malgré l’importance transalpine de la production nostradamique, les Italiens semblant préférer les pronostications en prose de l’Oracle de Salon, sensiblement plus compréhensibles. La correspondance de Nostradamus est, elle même, de peu de poids dans ce domaine et notre auteur n’y fait aucune allusion à ses Centuries, du moins dans le manuscrit qui nous est parvenu et qui pourrait avoir été élagué.68

   Pour comprendre l’impact des Almanachs et des Pronostications de Nostradamus, dans les années cinquante, il nous semble indispensable d’apprécier quelle était la situation du genre dans les décennies qui précédèrent.

   Le premier tiers du siècle témoigne d’une floraison de publications en français. Que celles-ci viennent de Louvain, de Genève69 ou de Lyon, ce dont témoigne, on l’a vu, François Rabelais dans la Pantagruéline Pronostication. Les éditions de Louvain, malgré leur localisation en Flandre, ne se réfèrent pas nécessairement à l’empereur, comme l’atteste la grande pronostication nouvelle pour 1533, de Laet astrologue en l’université de Louvain :

   “Du très chrestien Roy de France, François, premier de ce nom, sera cette présente année très joyeuse en toutes ses affaires qu’il entreprend. Dieu par sainte grâce lui veuille donner si bon conseil que nous puissions tous vivre en paix au Royaume de France.” (BNF, Res. V 1903)”

   Chorématiquement, on peut quand même s’interroger sur une telle formule, dans une publication supposée extérieure au royaume.

   On trouve d’ailleurs pour les accompagner des satires comme celle des Merveilles à venir. La condamnation de l’Apologia de Michel Servet semble avoir porter un coup d’arrêt car le Parlement en profite en 1538 pour obtenir un contrôle préalable des almanachs.70 Et de fait, les années suivantes n’offrent plus la même ampleur. C’est d’ailleurs, dans les années quarante que parait l’Advertissement de Jean Calvin contre l’Astrologie Judiciaire.

   Il importe en effet de ne pas réduire l’oeuvre de Michel de Nostredame à la seule production de quatrains, il a fort bien pu se faire remarquer par un passage en prose de tel ou tel de ses pronostics d’ordre astrologique. Chavigny s’appuiera largement par la suite sur des extraits des dites prognostications.

   Les quatrains prophétiques de Nostradamus, on l’a dit, ne sont pas le privilège des Centuries et au demeurant le Kalendrier des Bergers, dès la fin du XVe siècle, propose un quatrain pour chaque mois avec cette différence que celui-ci n’est pas renouvelé chaque année et que son contenu est assez innocent. Il n’empêche que la présence en soi d’un quatrain ne devait guère surprendre le lecteur français. En contre-partie, il n’est pas certain qu’il y ait toujours accordé de l’importance. On en trouve généralement pour chaque mois du calendrier de ses almanachs annuels. Ces quatrains seront commentés par l’auteur du Janus François (1593 - 1594) et par la suite réunis sous le nom de Présages71 à la fin des Centuries si bien que l’on peut attribuer à Michel de Nostredame d’une part les premières centuries, de l’autre les “présages” au nombre de 141 quatrains qui ne sont qu’une partie de sa production de quatrains, encore ne s’agit-il que de ceux retenus par Chavigny. Ce nombre peut être quelque peu augmenté en recensant les quatrains directement à partir des almanachs conservés.

   Mais nous ne sommes pas certains que les quatrains des almanachs furent la base de la réputation de Nostradamus, la preuve en est que les nombreuses éditions italiennes des pronostications de Nostradamus ne comportent aucun quatrain.72 En fait, ces quatrains des almanachs devront attendre la Première Partie du Janus François pour être intégrés dans le canon nostradamique - et encore seront-ils boudés de la plupart des commentateurs.73 - alors que l’oeuvre en prose n’y est représentée que par les épîtres introductives, les pronostications y étant relativement négligées74, elles sont mieux traitées dans les Pléiades du même commentateur. Encore faudrait-il nuancer : les quatrains figurant dans les almanachs de Nostradamus ne seront pas toujours reproduits fidèlement à la fin du siècle. Chaque fois qu’une comparaison est possible du fait de la conservation du document d’origine, l’on observe des variantes, tant sur le fond que sur la forme, ce qui montre un Jean Aimé - Jean Aimes selon la formule qui figure en tête du Janus Gallicus bilingue (français-latin) - de Chavigny ne reculant pas devant certaines manipulations pour asseoir son commentaire.75 On retiendra notamment le fait que certains mots sont écrits dans le Janus François avec des majuscules qui n’existent pas dans les quatrains des almanachs.76 Chavigny veut faire de Nostradamus le prophète de la guerre dynastique des années Quatre-Vingt, ce qu’il ne fut pas vraiment.77 Et pour cela, il est prêt à malaxer - à déconstruire - le texte de façon à en évacuer toutes les lectures antérieures et tous les procédés systématiques, ce qui marquera de façon indélébile l’exégèse nostradamique si on la compare avec la pseudo-malachique. A vrai dire, est-ce que le Recueil des Présages Prosaïquesq78, constitué de présages pour les années 1550 à 1567, avait au départ vocation à accueillir une exégèse -d’abord sur les marges du manuscrit puis dans les publications chavigniennes - qui serait propre à la période de la Ligue ?

   Nous pensons donc que la priorité revient en fait, pour la recherche historique, à l’étude des textes en prose de Michel de Nostredame surtout si l’on sait à quel point son oeuvre en vers est, pour une grande part, d’une authenticité douteuse.79

   La question est de savoir cependant si le succès de Nostradamus, du moins de son vivant, tenait à ses textes versifiés ou à ses oracles sibyllins mais non rimés. Pour notre part, nous ne croyons guère à l’impact de la “poésie” de Nostradamus, du moins dans un premier temps, sinon autour de tel quatrain, isolément, ayant pu frapper les esprits par rapport à une perspective à venir.

   On notera que Antoine Couillard Du Pavillon, dans la quatrième partie de ses Prophéties80 de 1556.81, ne fournit pas de quatrains en tant que tels mais des formules sibyllines telles celles qui figurent dans les almanachs de Nostradamus et qui constituèrent peut-être leur intérêt principal avant même les quatrains. Au fond, il s’agissait - pour revenir aux pratiques actuelles de la Presse - d’une sorte d’horoscope quotidien alors que les quatrains constituaient un horoscope mensuel.82 Couillard propose : “abrogation d’offices après les guerres”, “abus en l’Eglise”, “successeurs bien empeschez”, etc. Or, nous lisons, par exemple, dans l’Almanach pour 1561 : “Mutination grande”, “Calomnie sourde” et autres oracles lapidaires et souvent rédigés en abrégé, puisque ne pouvant tenir que sur une ligne, alternant météorologie et politique. Les almanachs avec Nostradamus devenaient prophétiques. Deux ans, plus tard, en 1558, Jean de La Daguenière83, auteur du Monstre d’Abus (Paris, Barbe Regnault) ironise également sur cette “prose” de Nostradamus : prose en effet lorsqu’il n’y a pas de rime mais ici la forme détermine un contenu sensiblement différent : “Bataille navale, ville assiégée, victoire gallique, retour felice, la mort du grand, heureuse nativité & une infinité d’autres telles asneries & sotteries.” Mais ne s’agit-il pas là des notations susceptibles de se trouver au sein de prophéties perpétuelles de type Moult ( voir Livre II).

B - Recensement des almanachs, présages et pronostications de Michel de Nostredame

   Après cette mise au point concernant les Présages, nous pouvons aborder la recension de ces documents. Dans le Testament de Nostradamus, Daniel Ruzo (1982) fait un bilan (pp. 340 - 341) des documents qui feraient défaut. On constatera d’abord que le défunt bibliographe mexicain mélange systématiquement almanach et pronostication lesquels constituent généralement deux publications distinctes et n’accorde pas de place significative aux Présages, sinon pour désigner les quatrains des almanachs.

   Ainsi écrit-il : “Prognostication pour 1558. Nous connaissons non seulement les quatrains-Présages de cette édition disparue mais également la transcription manuscrite de deux d’entre eux par l’abbé H. Rigaux qui a dû en connaître un exemplaire.“84 Mais il fait en fait référence à l’Almanach pour 1558. Or, Ruzo n’a pas eu accès à la Pronostication pour 1558 de la Bibliothèque Royale de La Haye que nous avons retrouvée, laquelle ne comporte évidemment aucun quatrain puisque ce rôle est dévolu aux almanachs, sauf lorsque ceux ci sont fondus avec les pronostications.

   Ruzo tient le même discours pour 1559 : “Prognostication pour 1559. Nous connaissons les douze quatrains-Présages pour 1559 réédités par Chavigny en 1594.”

   Pour 1556, il convient également de préciser que l’on ne dispose ni de l’almanach pour 1556 ni de la Pronostication pour cette même année.85 C’est une année sinistrée du point de vue de la conservation. Pierre Brind’Amour86 pense toutefois qu’un almanach anglais a pu conserver en traduction la série des quatrains négligés par Chavigny.

   Il faudrait tenir le même propos pour l’année 1564 : on ne connaît ni la pronostication ni l’almanach mais dans une Lettre à Lobet87, Nostradamus fait explicitement référence à son Pronostic pour 1564. En outre, il existe une traduction italienne combinant Pronostication (saisons) et Almanach (mois), soit Pronostico et Lunario mais sans quatrains (cf. infra). Chaque mois est précédé d’une formule en latin88, alors que Ruzo notait “Aucune traduction n’en a été retrouvée.“89

   Quels sont donc les quatrains des almanachs dont nous pouvons disposer pour les confronter avec la présentation du Janus Gallicus ?90 Nous disposons, de sources directes et ne dépendons pas exclusivement du recueil de 1594, pour les années suivantes. Par ailleurs, le Recueil de Présages Prosaïques91, dès lors qu’il comporte les quatrains des almanachs, constitue également une source et nous avons pu relever certaines variantes, par rapport au Janus Gallicus et éventuellement par rapport aux almanachs qui nous sont accessibles.

Les almanachs à quatrains

   Le Recueil de Présages Prosaïques (RPP) ne comporte pas de quatrains avant l’almanach pour 1555 mais cela n’exclut pas qu’il y en ait eu. Ce manuscrit se réfère souvent à plusieurs documents par an.92 Cela donne en tout cas une idée de la production annuelle et par comparaison avec les éditions disponibles, l’on pourrait éventuellement déterminer un certain nombre de documents qui recevraient un code mais tel n’est pas ici notre objet.

   Il convient en fait de dater ces almanachs de l’année précédant leur publication, sur la base d’un changement d’année au premier janvier.93

       1555, Almanach pour 1555. Pas d’exemplaire retrouvé. On dispose de la Pronostication pour 1555 (Bib. Ruzo). Le RPP en a repris une partie que nous n’avons pu cerner, hormis pour les quatrains, ne disposant pas de la Pronostication.

       1556, Almanach pour 1556. Pas d’exemplaire conservé. On n’en a pas non plus les quatrains.94 Nous montrerons que ces quatrains pourraient être ceux de l’édition anglaise de l’Almanach pour 1564 (Bib. Urbana, Illinois, USA). Le RPP comporte des extraits en prose de l’almanach ou / et de la Pronostication.

       1557, Almanach pour l’an 1557, Paris, Jacques Kerver, Coll. Ruzo.95 M. Brind’amour nous en a communiqué une copie.96 La Pronostication est conservée au Musée Arbaud. Seule année pour laquelle, l’on a conservé également des Présages (Bib. Ruzo). Mais le cas des Présages Merveilleux ne doit pas égarer : le terme “présage” est entendu dans le manuscrit pour n’importe quel ouvrage prédictif en prose, sans égard au titre. La présence de quatrains d’almanachs dans ce recueil semble au départ assez secondaire.

       1558, Almanach pour l’an 1558. Pas d’exemplaire retrouvé. On en a une partie, dont les quatrains, dans le RPP. Nous avons retrouvé la Pronostication pour 1558, à la Bib. Royale de La Haye.

       1559, Almanach pour l’an 1559. On en a une partie, dont les quatrains, dans le RPP. On dispose de la traduction anglaise : An Almanack for 1559, H. Huntington Library, San Marino (Californie) On a trace du titre : Grand pronostication nouvelle avecques la déclaration ample de MDLIX, Lyon, Jean Brotot. Il existe une édition anglaise, The prognostication of maister Michael Nostredamus, Doctour in Phisyck with predictions and presages of every month, parue à Anvers (BL C 71 a 15). En fait, il existerait deux éditions anglaises d’un almanach de Nostradamus pour 1559.

       1560, Almanach pour l’an 1560, Paris, Guillaume Le Noir, Bib. Ruzo, Mexico. On a trace du titre : La Grand’pronostication nouvelle pour l’an mil cinq cens soixante. On trouve les quatrains et peut être le texte de ces deux pièces dans le R.P.P.

       1561, Almanach L’an 1561 (sic), Paris, Guillaume Le Noir, BSG.97 On n’a pas trace du titre de la Pronostication (voir Recueil de Présages Prosaïques pour compléter cet almanach).

       1562, Almanach Nouveau pour l’an 1562, Paris, Guillaume Le Noir & Jehan Bonfons, Archives Royales, Bruxelles. La Pronostication pour cette même année se trouve à Munich.

       1563, Almanach pour l’an 1563 avec les présages, Avignon, Pierre Roux, Musée Arbaud Aix en Provence. Il existe un reprint de cet ouvrage, de 1905, par les soins de H. Douchet. A partir de cette date, les présages sont intégrés dans l’almanach qui s’étoffe.

       1564, Almanach pour l’an 1564. On n’a pas trace de cet almanach qui devrait porter le même titre que les almanachs pour 1563, 1565 et 1566, le terme “significations” étant apparemment équivalent à “présages”. Signalons le Pronostico et Lunario de M. Michele Nostradamo pour 1564, paru à Florence (Bib. Centrale de Florence) adressé à Charles IX, daté du 15 décembre 1563, de Salon de Craux. Ce pourrait être la traduction d’une édition perdue de la Pronostication pour 1564.98 C’est la dernière année dont on connaisse la pronostication comme publication séparée.99 Par ailleurs, il existe une édition anglaise de l’almanach (peut-être avec les quatrains de 1556) et de la pronostication (Bib. Urbana, Illinois).

       1565, Almanach pour l’an 1565 avecques ses très amples significations & présages d’un chacun moys, Lyon, Benoist Odo, Bib. Augusta de Pérouse. L’almanach comporte les Présages comme en 1563. Il comporte une Epître à Charles IX, cette fois datée du 14 avril 1564, très proche de l’épître italienne au même dédicataire en date du 15 décembre 1563.

       1566, Almanach pour l’an 1566 (...) avec ses amples significations & explications, Lyon, Antoine Volant & Pierre Brotot, Osler Library, Montréal.100

       1567, Almanach pour l’an 1567 (...) avec ses amples significations, ensemble les explications de l’Eclypse merveilleux & du tout formidable qui sera le IX d’Avril proche de l’heure de midy, Lyon, Benoist Odo. Reproduction de l’édition française par Henri Douchet, probablement à partir d’un exemplaire d’une collection privée. On ne signale qu’un exemplaire dans la Collection Ruzo. On peut en revanche consulter une traduction italienne conservée à la Bibliothèque Jagellon de Cracovie.101

Pronostications sans quatrains

   Les quatrains de Michel de Nostredame seraient parus pour la première fois, à en croire Benazra (1990) au sein d’une Prognostication nouvelle & prédiction portenteuse pour l’an 1555 (Lyon, Jean Brotot). On disposerait d’une traduction anglaise des dits quatrains reprise dans un almanach pour 1562, faute d’avoir accès à l’original, ce qui permet de vérifier les éléments fournis dans le Janus François.102 La Collection Ruzo en possédait un exemplaire.103 Comme on ne dispose d’aucun almanach ou pronostication pour 1556, l’on serait tenté de penser que dans un premier temps les quatrains figurèrent au sein de la Pronostication puis, dans un deuxième temps, au moins depuis l’Almanach pour 1557 dans l’almanach.104 En réalité, il n’en est rien : il s’agit d’une simple hypothèse de R. Benazra ! Très vraisemblablement, la Pronostication pour 1555, comme toutes celles qui vont suivre, était dépourvue de quatrains, de ceux qui constitueront les “présages”. L’auteur du RCN a fait l’amalgame (pp 5 - 8) entre les quatrains rapportés par Chavigny et la Pronostication conservée à l’époque par Ruzo à laquelle il n’a pas eu accès105, mais qui a le mérite d’exister.

   La distinction entre almanachs et pronostications s’impose ne serait-ce qu’au niveau de la présentation : les almanachs ont une page de titre très sobre (Almanach pour 1557), sans autre illustration que, dans certains cas, la marque du libraire (Almanach pour 1561) ou de quelque instrument de mesure. En revanche, en tout cas chez Nostradamus, la pronostication porte traditionnellement une vignette représentant un personnage dans son cabinet de travail (cf. infra), comme celle que l’on fera figurer sur la page de titre des (fausses) éditions des Prophéties de 1555 ou de 1557 (cf. infra).

   Les quatrains de l’almanach pour 1555 - tels du moins qu’ils nous ont été conservés par Chavigny - se distinguent en ce qu’ils sont quatorze au lieu de treize.106 Par la suite, du moins était-ce déjà le cas pour les pronostics concernant 1557, l’on ne connaîtra plus que treize quatrains par an. On trouve le texte de ces 14 quatrains dans le Janus François.107

   R. Benazra (1990) signale à juste titre que le quatrain “De l’Epist. Liminaire sur l’an 1555” ressemble énormément au quatrain 59 de la centurie II, mais pourquoi Michel de Nostredame n’aurait-il pas recyclé dans ses Centuries certains quatrains d’abord conçus dans le cadre de ses publications annuelles ? On voit mal Chavigny inventer, comme le suggère Benazra un tel quatrain qui ferait double emploi avec un quatrain centurique sinon parce que les deux quatrains cohabitent.

   Quant à cette “Epître Liminaire” de 1554, elle comporte une allusion au baron de la Garde et au Comte de Tende (Claude de Savoie), comme le note M.E. Rose108 :

“La mer Tyrrhène, l’Océan par la garde
Du grand Neptune & ses tridens soldats
Provence seure par la main du grand Tende
Plus Mars Narbon l’héroiq de Vilars.”

   qui deviendra, dès l’année suivante 1555109, dans la deuxième centurie :

“Classe Gauloyse par appuy de grand garde
Du grand Neptune & ses tridents souldars
Rongée Provence pour soustenir grand bande
Plus Mars Narbon par iavelotz & dards.“ (59)

   Enfin, on notera que le terme “présage” pour désigner un quatrain placé au sein d’une publication annuelle apparaît pour cette année 1555 du moins dans le Janus François de 1593 / 1594110, et c’est sous ce nom que, de façon métonymique, l’ensemble des quatrains de ce type sera désigné dans le canon nostradamique. En réalité, le terme “présage” semble avoir signifié, pour Michel de Nostredame, le commentaire qu’il tirait des quatrains ou d’un autre support. Le quatrain ne serait pas en lui-même le présage pas plus que le présage ne se réduisait, à Babylone, au foie de l’animal.

   Dans l’Epître centurique à Henri II, l’auteur se réfère ainsi à la Préface à César :

   “Dedans l’Epistre que ses (sic) ans passez ay dédiée à mon fils César Nostradamus j’ay assez apertement declaré aucuns poincts sans présage. Mais icy, ô Sire, sont comprins plusieurs grands et merveilleux advenements, que ceux qui viendront après le verront”.

   Il semble que par “sans présage”, l’auteur signifie qu’il s’est exprimé ouvertement alors que dans la nouvelle Epître, ce qui est annoncé ne peut pas l’être aussi directement. On notera qu’il compare dans ce passage les deux Epîtres sans se référer aux quatrains supposés déjà parus.

Le problème des trois derniers almanachs

   Nous observions qu’à partir de la production annuelle pour 1564, l’on n’avait plus trace d’une pronostication séparée de l’almanach. Certains indices nous conduisent en fait à penser que Michel de Nostredame aurait pu cesser son activité dans ce registre en 1563, ce qui n’empêchera nullement ceux-ci de figurer dans le Recueil des Présages prosaïques et dans les autres travaux de Chavigny.

   Il est assez évident en effet que Nostradamus utilise une clef, dans les quatrains de ses almanachs qui semble ne pas avoir été décryptée. Il semble qu’il y ait deux camps : les razes et les rouges. Les rouges semblent être les Catholiques comme nous le verrons dans un contexte plus frappant, ce qui pourrait faire des razes les réformés, qui seront également désignés comme “noirs” (cf. infra).111 Visiblement, Nostradamus envisage plutôt la déconfiture des “razes”.

Août 1558:
“Les Razes pris: esleu le Pempotam
Faillir deux Rouges & quatre bien croisez”

Mai 1559
“Par les trois parts Rouges, Razez partis”

Février 1560
“Hors d’armes Sacre long Rouge voudra avoir”

Avril 1560
“Du lieu esleu Razes n’estre content”

septembre
“Privez seront Razes de leurs harnois”

décembre
Razes Grand mort, refus fait à l’entrée”

février 1562
“Pour Razes Chef ne parviendra à bout”

septembre
“Tous defiez, plus aux Razes fiance”

juin 1564
“Du ciel grands foudres estat des Razes paistre”

juillet 1564
Razes esmeu, par conseil ce qu’estoit”

septembre 1564
“Tout inonder, à la Razée perte”

   Nous observerons que cette forme n’apparaît plus pour les dernières années 1565, 1566, 1567. Avec les almanachs pour 1565 et 1566, les mentions agricoles se font en revanche plus nombreuses :

1565
Janvier : neiges; rouillures, pluyes ... etc
Mars : pluyes grands vents...
Avril : Temps modéré, l’hyver peu de retour
Juillet : gresle rouillures, pluyes etc
Aoust : stérilité, grain pourri, d’eau bondance(sic)
Septembre : guere de fruits, ni grain, arbres & arbrisseaux
Décembre : forte gelée, glace plus que concorde.

1566
Juin : Les bleds trop n’abonder, de tous autres fruits force / l’esté printemps humides. hiver long, neige, glace
Juillet : par pestilence & feu fruits d’arbre periront
Aoust : pluyes fort excessives & aussi de biens abondance

   Il y a là manifestement une nouvelle façon de travailler qui tranche avec les années précédentes. Nous abordons plus loin le cas particulier de l’almanach posthume pour 1567 qui est encore plus atypique, ce qui n’a nullement découragé Chavigny de l’inclure dans son corpus, et tendrait à prouver à quel point tout ce qui avait trait, de près ou de loin, à Nostradamus était bien accueilli par ses soins, sans trop d’inventaire.

   Cet Almanach pour 1565 de la Bibliothèque de Pérouse -sur lequel nous reviendrons à propos de son Epître à Charles IX - offre certains changements par rapport aux éditions antérieures. En effet, pour la première fois, l’almanach ne comporte pas de quatrains au sein de son calendrier. mais en tête des textes mensuels en prose française. Auparavant, l’on trouvait un chapeau en latin pour chaque mois.112 L’auteur de cet almanach a vraisemblablement pensé que ce nouveau dispositif était préférable et il désigne ces quatrains sous le nom de “présages” au titre.

   Les années soixante seront marquées par l’essor d’une littérature pseudo-nostradamique : cas de l’almanach pour 1563 de la Bibliothèque Municipale de Lille, cas de la révision de l’Epître de Nostradamus au Pape (moutures italiennes). Un dénommé Mi de Nostradamus, non identifié, ne publie-t-il pas en 1564 une Prognostication ou Révolution pour 1565113, chez le libraire lyonnais Benoist Rigaud censé avoir publié en 1568 - ce qui est de plus en plus improbable - l’édition complète des Prophéties de Michel de Nostredame ou du moins une édition en deux volets de 3 centuries qui complète celle de 1560 ?

   L’almanach pour 1566 retrouve ses quatrains au sein du calendrier, c’est-à-dire dans la première partie du diptyque, chaque volet étant divisé en douze.114 Cela dit, si l’almanach pour 1565 est suspect, qu’en est-il des quatrains qui s’y trouvent et que Chavigny reprend ? On note d’abord une anomalie dans cet almanach : le premier quatrain est placé sous le mois de janvier 1565 au lieu de désigner l’ensemble de l’année et le deuxième sous la formule redondante “Significations de Janvier 1565” comme s’il y avait deux quatrains pour janvier et aucun pour l’année en général (cf. fol A et B5).

   Les variantes sont au demeurant multiples avec le texte du Janus Gallicus. On trouve dans cet almanach pour 1565 une nouvelle adresse au Pape Pie IV (qui meurt justement en 1565) pour le mois d’août de cette année qui peut aussi sembler redondante avec les précédentes.

   Mais il s’agit aussi de quatrains sensiblement différents de la version qu’en donneront en 1594 le Janus Gallicus et à sa suite les Présages. R. Benazra a de ce point de vue tort de ne fournir, pour chaque année, que le texte présenté par Chavigny :

   Voici quelques échantillons des différences au niveau des premiers versets :

Année 1565
Almanach : “Cent fois plus pire estre cet an que l’an passé”.
Présage 105 : “Pire cent fois cest an que l’an passé”.

   L’almanach pour 1565 place ce quatrain en deuxième position, comme un quatrain janvier bis. Chavigny a corrigé l’erreur. Il intègre cet almanach sans état d’âme comme il le fera pour certaines centuries post-nostradamiennes.

Janvier
Almanach : “Grands pluyes, neiges, roillure, playes grandes”.
Présage 106 : “Neiges, rouilleures, pluyes & playes grandes”.

Mai
Almanach : “Le menu peuple par débats & querelles”.
Présage : “Au menu peuple par débats & querelles”.

Septembre
Almanach : “Non guieres fruicts, ne grain, arbres, arbrisseaux”.
Présage : “Guère de fruits, ni grain, arbres & arbrisseaux”.

   En fait, le ton de ces quatrains serait celui de Prophéties Perpétuelles, et correspond peut-être, peu ou prou, au contenu de l’édition comportant la première Préface à César dont on a dit qu’elle annonçait ce type d’ouvrage.

Les faux almanachs

   En ce qui concerne les almanachs, qu’on en juge par les bibliographies de Chomarat et de Benazra : en 1565, on recense de M. de Nostradamus des Prophéties ou révolution merveilleuse (...) jusqu’en l’an 1567 (voir Benazra, RCN, pp. 71 et 79). Mais faut-il s’imaginer que les faussaires prennent abusivement la peine d’annoncer leur production en usant d’expressions telles que “Mi. de Nostradamus” ou “Nostradamus le Jeune” ? Quant à Chavigny, il porte bien son nom de Janus : à la fois se présentant comme disciple de Michel de Nostredame et à la fois trahissant sa pensée et son oeuvre.

   Les almanachs ont fait l’objet de suspicion et l’auteur de l’Eclaircissment des véritables quatrains, en 1656 (p. 71, BNF, Ye 7376) propose de “retrancher” ces publications “faites sous son nom” du canon nostradamique, prenant ainsi le contre-pied de Jean-Aimé de Chavigny.

L’Epître à François de Guise

   Un faux almanach pour 1563 (BM de Lille)115 comporte une épître au Duc de Guise, quelque peu inspirée, comme l’a noté P. Brind’amour (1992) de l’Epître à Henri II, en tête des Présages Merveilleux pour 1557. On voit qu’ainsi Nostradamus, notamment sous la Ligue, est récupéré par les deux camps puisque on lui fait rédiger, par ailleurs, des quatrains annonçant la chute des Lorrains116, c’est-à-dire des Guises. Il est probable que le choix des quatrains d’autres années n’est pas innocent et doit être ad hoc : ainsi pour décembre, “la gueulle ouverte, il parlera de paix / Mais elle sera trop frauduleuse & faincte (feinte) ”. C’est probablement le camp adverse qui est ainsi visé au cours d’une année 1562 particulièrement conflictuelle. On a là l’exemple d’une utilisation des quatrains d’almanachs obsolètes pour étayer un discours politique plus tardif, ce qui annonce les procédés du Janus Gallicus, trente ans plus tard.

La compilation astrologique de 1567

   Le cas de l’almanach pour 1567, paru après la mort de Nostradamus, est encore diffèrent et offre un caractère factice obvie et qui ne prend même pas la peine de veiller au fond. Chavigny s’est quand même évertué à en intégrer les quatrains dans son commentaire.

   Tout se passe comme si l’on avait pris un manuel d’astrologie, au chapitre consacré aux maisons du thème117, comme les Jugements astronomiques des nativitez d’Auger Ferrier, parus à Lyon, chez Jean de Tournes, en 1550 et qu’on les avait agencés pour en faire treize quatrains, à l’inverse de ce que fit Crespin qui rendit en prose ce qui était en vers.118 Nous placerons entre parenthèses la maison correspondant au texte.

Quatrain de l’an 1567 :
“Mort (VIII), maladies (VI) aux jeunes femmes, rhumes”

Janvier :
“Prisons (XII), secrets, ennuis, entre proches discordes
La mort (VIII) s’ensuyvra, poison fera concorde”

Février :
“Prisons (XII) par ennemis occults (XII) & manifestes. (VII)
Voyage (III ou IX) ne tiendra. inimitié mortelle (VII)”

Mars :
“Les ennemis publics (VII), nopces et mariages (VII)
La mort (VIII) après, l’enrichi par les morts (VIII)”

Avril :
“Par grandes maladies (XII), religion (IX) fachée
Bien des vieux peres (VIII), Roy (X) en bonne contrade”

Mai :
“Les grandes nopces (VII), ennemis ( VII) garbelans
Les bons amys ( XI) & femmes contre tels groumelans”

Juin :
“Par le thresor, trouvé l’héritage (IV) du père
Les Roys (X) & Magistrats, les nopces (VII), ennemis (VII) ”
La mort( VIII), poeur & frayeur & trois Grands à mort mis.

Juillet :
“Encore la mort (VIII) s’approche
Les jeunes hoirs (VIII) (...) thrésor trouvé etc”

Aoust :
“Les ennemis secrets (VII) seront emprisonnez (VII)
Les Rois (X) & Magistrats y tiendront la main seure”

Septembre :
“Longues langueurs de teste, nopce ( VII), ennemy (VII)
Par Prélat (IX) & voyage (IX), songe du Grand terreur”

octobre :
“Les Roys (X) & Magistrats par les morts ( VIII) la main mettre
Tout par langueures & nopces ( VII), ennemis (VII), serfs (VI) au maître”

novembre :
“Du retour d’Ambassade (IX) don de Roy mis au lieu
Plus n’en fera. Sera allé à Dieu (IX)
Parens plus proches (IV), amis (XI), freres du sang (III)
Trouvez tout mort (VIII) prez du lict & du banc.”

Décembre :
“Enfans (V), frères & soeurs (III); amis (XI), thresor trouvé (VIII)
Le ieune, le Prélat(IX), le Légat, le Voyage (IX)
La maladie (VI), la femme aura prouvé
Que pour la mort (VIII) changera de visage.”

Fin de l’An :
“Entre frères (III) et soeurs, inimitié, discorde ( VII)
Thrésors ( VIII) & libertez, plus apparents les testes
Seicheresse l’Esté, mourir (VIII) ceci à corde.”119

   Il s’agit là de quatrains qui ne semblent nullement de la main de Nostradamus. Il n’y a là au demeurant que jeu de mots que l’on retrouve sans cesse avec diverses variations. Quant aux quatrains des almanachs pour 1565 et 1567, ils offraient, nous l’avons vu, certains traits atypiques, bien différents de ceux des centuries.

   Or, force est de constater que le Recueil des Présages Prosaïques a inclus des quatrains de l’almanach pour 1567, nous avons notamment identifié le quatrain de novembre. Si nous sommes assez sceptiques sur la paternité de Nostradamus à son sujet, nous observons que le compilateur du dit Recueil n’a pas fait de distinguo pas plus d’ailleurs que Chavigny n’en fit pour les Centuries comme si tout ce qui a forme de quatrain et se réfère à Nostradamus avait droit de cité au sein de la somme nostradamique.

   Signalons un dernier trait de cet almanach pour 1567, à savoir qu’il ne respecte pas toujours l’agencement traditionnel des rimes de quatrain120 :

Novembre :
“De retour d’Ambassade, don de Roy, mis au lieu
Plus n’en sera. Sera allé à Dieu
Parens plus proches, amis, frères du sang
Trouvé tout mort prez du lict & du banc.”

   à moins que tout simplement, on n’ait pas pris la peine de les redisposer une fois composées, il aurait fallut obtenir in fine : lieu, sang, Dieu, banc.

La reconstitution de l’almanach pour 1561

   La comparaison entre les différentes éditions des almanachs devrait logiquement permettre de dégager un certain nombre de traits récurrents mais aussi une évolution. Récemment, à la suite de la découverte de défets de plusieurs exemplaires de l’almanach bichromé (rouge et noir) pour 1561, le problème s’est posé, notamment à Catherine Amadou, de reconstituer celui-ci. On est surpris que celle ci ne se soit appuyé sur aucun des almanachs parus pour mener à bien ce travail.121 Encore des changements peuvent ils survenir dans la disposition des matières d’une année sur l’autre.

   Or, l’on dispose aux Archives Royales de Belgique, à Bruxelles, d’un exemplaire de l’Almanach pour 1562 paru chez le même libraire, Guillaume Le Noir (en 1562, Jehan Bonfons s’est adjoint). Quelques différences au titre : en 1562: Almanach nouveau pour l’an 1562, en 1561, Almanach (...) L’an 1561 (sic). Il n’est pas certain, en raison de la majuscule à “L’an” que pour figure, la partie gauche de la page de titre manquant. On peut au moins reconstituer une partie de la présentation de l’auteur car les morceaux ne comportent parfois qu’une moitié de page :

   “Composé par Maistre Michel Nostradamus, Docteur en Médecine de Salon de Craux, en Provence”

   L’édition de 1562 comporte au dessus du quatrain introductif : “Quatrain de l’An universel”, celle de 1561 ne comporte pas un tel chapeau.

   On note que l’almanach pour 1561, tel qu’il est reconstitué dans la succession des pages, place en tête de l’ouvrage, en page 2, les “caractères des signes” et ceux des “Lunes nouvelles, pleines, quartiers”. L’almanach pour 1562, en revanche, les place à la fin du calendrier. L’étude du verso montre qu’effectivement, ce tableau se trouvait au début de l’almanach.122

   On suivra moins C. Amadou lorsqu’elle ne mentionne même pas l’Epître à la duchesse de Savoie123, qui vient en tête des Prédictions, c’est-à-dire à la suite du calendrier et des quatrains. En 1562, l’Epître était adressée à Pie IV, en 1561 elle le fut à Marguerite de Savoie, soeur d’Henri II, récemment mariée, dans le cadre de la Paix du Cateau-Cambrésis (1559) au duc Emmanuel-Philibert, c’est ce que nous apprend un défet comportant la mention “A Madame la Duchesse de Savoie” placé in fine, au verso du Privilège.

   Après les quatrains du calendrier, l’on peut certes placer, comme dans l’almanach pour 1562 un “Présage sommaire de l’année” que C. Amadou annonce, de son propre chef, comme “Discours sommaire sur l’année”. Mais ensuite se situe l’Epître aucunement signalée dans la reconstitution, celle ci étant présentée comme faisant partie du “discours sommaire”. Or, le “discours” se termine ainsi (p. 25 de la reconstitution) : “Je feray fin Madame, priant à Dieu l’Eternel qu’il vous doint (sic) santé, vie longue, parvenir en bonne convalescence & attaindre à ce que plus aspirez” (manque la date et la mention de l’auteur). L’on peut penser, en s’inspirant de l’almanach pour 1562, que l’Epître était ainsi présentée :

   “Les Prédictions de l’almanach de l’année 1561 contenant les déclarations d’un chascun moys de l’an. Dédiées à Madame la Duchesse de Savoye, composez & calculez par M. Michel Nostradamus docteur en médecine de Salon de Craux en Provence.”

   A la suite de l’Epître faisaient suite immédiatement, dès le verso, les Prédictions mensuelles. Il ne s’agit pas de “Présages”, le texte ne comportant pas d’étude de figures avec les maisons (cf. infra). L’on peut raisonnablement supposer que des Présages pour 1561 parurent séparément. Ces Prédictions s’achèvent avec la mention de l’auteur et la date de rédaction, au 23 avril 1560, de Salon.124

Les variantes chavigniennes

   Nous prendrons pour référence l’Almanach pour 1557125 que nous comparerons avec la restitution qu’en fait le Janus Gallicus qui n’en comporte d’ailleurs pas l’intégralité. Nous avons placé les numéros d’ordre qui figurent dans les “Présages”. On notera des variantes dues aux besoins du commentaire de Jean de Chavigny.

(15) janvier 1557
“L’indigne orné craindra la grand fornaise
L’esleu premier, des captifs n’en retourne
Grand bas du monde, L’Itale non alaise
Barb. Ister, Malte. Et le Buy ne retourne.”

(16) mai
“Conjoint icy, au Ciel, appert dépesche
Prise, laissée, mortalité non seure
Peu pluye, entrée. le Ciel la terre sèche
Defait, mort, pris, arrivé à mal heure.”

(17) juin
“Victor naval à Houche, Anvers divorce
Né grand du Ciel feu. tremblement haut brule
Sardaigne bois, Malte Palerme, Corse
Prélat mourir, l’un frape sur la Mule.”

(18) juillet
“L’héraut errant du chien au Lion tourne
Feu ville ardra. pille.prise nouvelle
Découvrir fustes. Princes pris.on retourne
Explor. pris Gall. au grand jointe pucelle.”

(19) aoust
“De la grand Cour banni. conflit, blessé
Esleu. rendue. accuse, mat. mutins
En feu cité Pyr. eaux venins, pressé
Ne voguer onde, ne facher les latins.”

(20) septembre
“Mer, terre aller. foy,loyauté rompue
Pille, naufrage. à la cité tumulte
Fier, cruel acte. ambition repeue
Foible offensé: le chef du fait insulte.”

(21) octobre
“Froid, grand deluge de regne dechassé
Niez, discord. Trion, Orient mine
Poison.mis siège. de la Cité chassé
Retour felice. neuve secte en ruine.”

(22) novembre
“Mer close, monde ouvert, cité rendue
Faillir le Grand. esleu nouveau. grand brume
Floram patere, entrer camp. foy rompue
Effort sera sévère à blanche plume.”

(23) décembre
“Tutelle à Veste. guerre meurt, translatée
Combat naval. honneur. mort prélature
Entrée, decez. France fort augmentée
Esleu passé, venu à la mal’heure.”

Quatrains des Almanachs et Extraits des Présages

   On comparera dans quelques cas les versions qui figurent des les Présages du manuscrit de Lyon 6852, portant le nom de Jean Aimé de Chavigny et l’année 1589, qui nous sont accessibles126 et ceux des quatrains des almanachs qui le sont également.

   Le découpage du manuscrit est le suivant127 initialement constitué en 14 livres, il fut réduit par la suite à 12, par le regroupement au sein des livres I et II :

Livre I : années 1550, rien pour 1551, 1552, 1553, 1554, 1555
Livre II : 1556 (sans quatrains) et 1557
Livre III : 1558
Livre IV : 1559
Livre V : 1560
Livre VI : 1561
Livre VII : 1562
Livre VIII : 1563
Livre IX : 1564
Livre X : 1565
Livre XI : 1566
Livre XII : 1566.128

   On peut s’interroger sur le passage de 14 à 12 livres : dans le “Brief Discours sur le vie de M. Michel de Nostre Dame”, in Janus Gallicus, il est question in fine de deux ensembles de douze : les “12 centuries de prédictions comprises brièvement par quatrains” et “d’autres présages en prose, faits puis(sic) l’an 1550 iusques à 67 qui colligez par moi & rédigez en XII livres.” Il est donc probable que le projet initial ne visait pas une division en 12. Est-ce que Chavigny changea d’avis en cours de route et dut ainsi remanier son propre travail ? Dans ce cas, il faut admettre qu’il avait l’intention de le publier plus ou moins tel quel car en quoi cela eut-il importé si le manuscrit devait rester inédit ?

Un projet non centurique

   La lecture du “Brief Discours sur la Vie de Nostradamus“ montre clairement que le projet exégétique initial ne visait pas les centuries : “Nous avons de luy d’autres présages en prose, faits puis l’an 1550 iusques à 67 (…) ceux-ci comprennent notre histoire d’environ cent ans & tous noz troubles, guerres & menées depuis un bout iusques à l’autre”. Le Janus Gallicus, pour sa part, fait évoluer le projet vers un commentaire des textes en vers, quatrains d’almanachs et de centuries comme si Chavigny avait pris conscience qu’il pouvait raconter les cent années en question sur la base des seuls quatrains, pourvu que l’on décomposât ceux-ci de façon à les changer en fait en de la prose, ce qu’avait réalisé, à sa manière, vingt ans plus tôt un Antoine Crespin. Parallèlement, les Pléiades (1594 pour la version manuscrite, 1603 pour la première édition imprimée) auraient à gérer l’ensemble en prose mais au sein d’un corpus prophétique plus vaste n’incluant pas exclusivement du Nostradamus, ce qui dénote une certaine distance.

   Ce Recueil est au départ la collection de textes parus, comme il est indiqué au titre, entre 1549 (pour 1550) et 1566 (pour 1567), il ne fournit jamais le nom du ou des libraires. On y trouve les quatrains à partir de l’almanach pour 1555 sauf pour celui de 1556, absents également du Janus Gallicus, ce qui souligne le lien entre les deux ouvrages mais, nous l’avons déjà souligné, il semble que ces quatrains ne présentent pas, du point de vue du dit recueil, un grand intérêt et d’ailleurs ils ne sont pas, par définition, en prose. Or, ce sont justement ces seuls quatrains qui seront inclus dans les éditions des centuries, la production en prose étant apparemment jugée non conforme, et se retrouvant dans les Pléiades et accessoirement dans certains commentaires au sein du Janus Gallicus. Pour notre part, en ce qui concerne la prose, nous avons identifié de larges emprunts aux pièces suivantes :

Almanach pour 1557
Significations de l’Eclipse de 1559
Almanach pour 1563
Almanach pour 1565
Almanach pour 1566

   Le cas de l’année 1557 est remarquable puisqu’il comporte les trois genres: l’Almanach, la Pronostication et les Présages pour 1557, ces derniers étant introduits par l’Epître à Henri II. Précisons que ces trois documents parurent séparément, chacun avec son épître adressé à un personnage distinct. On notera en tout cas que le Privilège en date du 14 octobre 1556, figurant en tête de l’Almanach pour 1557 vise “les almanachz, Présages & Pronostications de maistre Michel de Nostradamus (...) pour l’an mil cinq cens cinquante sept”. Mais dans le Manuscrit, il est clairement précisé (p. 79) : “D’un autre présage de la même année qui ne se trouve point dédié à la Majesté du Roy Tres Chrestien” il ne sera pas question. En fait, l’auteur du RPP appelle “présages” tout texte en prose de Nostradamus, constituant un commentaire de positions astronomiques, celles-ci étant souvent évacuées. En ce qui concerne les quatrains, dans la plupart des cas, lorsqu’ils diffèrent des éditions des almanachs conservées, Chavigny s’aligne sur le recueil, ce qui semble indiquer qu’il n’a plus accès aux quatrains d’origine.129

   L’Almanach pour 1557 pourrait cependant s’inscrire assez bien dans le schéma suivi par le recueil: au lieu que le calendrier occupe une partie et les études mensuelles une autre, il dispose chaque mois avec son calendrier et son commentaire puis passe au mois suivant et ainsi de suite. C’est un tel dispositif, abandonné par la suite, qui pourrait avoir servi à la conception du Recueil des Présages Prosaïques si ce n’est que le calendrier n’y figure plus.

Le cas de l’almanach pour 1565

   Cet ouvrage conservé à la Bibliothèque de Pérouse semble se conformer au système du Recueil de la BM de Lyon. Les quatrains ne se trouvent pas au sein du calendrier mais avec les textes en prose, en tête de chaque mois. C’est sur ce modèle que l’on aurait aligné l’ensemble de la production nostradamique et c’est pour cela que les quatrains y figurent année par année. En effet, il ne faudrait surtout pas conclure, sur la base du recueil, à l’existence d’un tel modèle pour les autres années, hormis peut être pour 1564 dont nous n’avons pas l’exemplaire.

   Le Recueil de présages prosaïques, tout en empruntant donc à des pièces authentiques les restructure : déplacement des quatrains, suppression de développements astronomiques ponctuels. Cependant, lorsque l’auteur regroupe plusieurs ouvrages, il les aborde l’un à la suite de l’autre et ne les fond pas en un seul. Il précise alors “autre présage pour l’année ...”, le terme signifiant simplement texte en prose, tous titres confondus.

Etude autour de l’almanach pour 1563

   Ci-dessous le texte de janvier des Présages pour 1563 dans l’édition d’Avignon. En fait, la différence apparaît surtout dans les premières lignes qui sont abrégées dans le VIIIe Recueil. Le texte de l’Almanach a été découpé dans le Recueil en paragraphes numérotés. Les variantes dues au Recueil sont marquées “Rec” et celles propres à l’Almanach “alm”. En marge, figurent dans le Recueil en quelque sorte le résumé de chaque paragraphe ainsi constitué : par exemple, pour le paragraphe 5, “Sylla et Marius ressuscités”. Ce sont en fait ces brèves formules qui, numérotées, et liées à un Recueil précis, pourraient avoir eu une valeur oraculaire qui aurait fait pendant à celle des Centuries. Chacun des 12 Livres comporte plusieurs centaines de ces paragraphes ainsi brièvement résumés. Les quatrains eux mêmes ne sont plus ici que des paragraphes comme les autres.

Quatrain de l’an universel (p. 332)
(Le recueil le qualifie de “quatrain général”)
“Le ver sain, sang mais esmeu est d’accord
Infinis meurdres, captifs, morts, prévenus
Tant d’eau & peste, (Peste, tant d’eau) peu de tout sonnes cors
Prins, morts, fuys, grand devenir, venus.”

   1 - Janvier

“Tant d’eau, tant mortz, tant d’armes esmouvoir
Rien d’accordé, le grand tenu captif
Que sang humain, rage, fureur avoir
Tard pénitent, peste, guerre, motif.”

   (on saute le calendrier)

En marge janvier
Prédiction (sic) de Janvier

   2 - Dans ce moys de janvier 1563, sera le pre (mier Rec.) quart de la Lune (précédente, le premier jour à 19 degr. d’Aries qui participe de la mauvaise qualité des jours précédens : avec un peu de température de peu de durée : et sera froid, sec, pluvieux, puis temps variable) donnant (donnera Rec.) admiration, cum formi me et pavore de ce peu qui sera demeuré des humains, que

   3 - (Car Rec.) par le fléau de Dieu nous est menacé d’une la plus grande frayeur que peut jamais estre advenue au remanant des poures a miserables hommes.

   4 - (Et puis que Alm.) lon convertira le bruit & les tormens de feu aux auteurs des conflicts et des effusions de sang, tellement que les plus grans ne seront seurs dans leurs forteresses & manoirs.

   5 - Et à l’occasion de l’année précédente, ou Sylla & Marius semblent avoir esté ressuscités, adviendront telles frayeurs & troubles qu’en calculant cecy la plume se vient à retirer, pour ne mettre par escrit ce que les astres présagent advenir par guerres plus férines que humaines : par famine, pestilence, subites & repentines invasions.

   6 - Mars en la présente révolution du monde estant à l’ho-(roscope & par tous endroits en signe ignée tant par l’ascendant que par le décret de Zodiac signifie que de la partie orientale adviendra perte, dommage & affliction au Roy). On a mis en italique ce qui ne figurait pas sur la page étudiée (333) soit parce que sauté, soit parce que vraisemblablement sur la page suivante (p. 334)

Les trois genres

   Le Recueil des présages prosaïques tend en fait à effacer la distinction existant dans les années cinquante entre trois genres comme l’atteste le privilège de 1556 pour 1557, où l’on distinguait trois productions annuelles : celle des Présages semble avoir été celle qui se voulait la plus amplement consacré aux événements à venir, mois par mois, ne comportant pas de calendrier ni d’ailleurs de quatrains. Les Présages amplifient130 les textes des almanachs d’où la formule “très amples significations & présages” qui figure par exemple pour l’année 1565. Les Pronostications sont quant à elles structurées en 4 saisons et le commentaire s’y organise autour du thème de l’ingres en chaque saison, à 0° du Bélier, du Cancer, de la Balance et du Capricorne alors que les almanachs organisent leurs prévisions autour des phases de la Lune, soit deux informations différentes au niveau astronomique. Les Présages se fondent sur les mêmes données que les Almanachs, à savoir le thème astral dressé tous les sept jours environ, lorsque la Lune est conjointe (nouvelle lune), en quadrature ou en opposition (pleine Lune) avec le Soleil. La situation à ces 4 moments (pronostication) ou à ces 48 et plus moments (almanach) renseigne sur la période qui s’étend jusqu’à la configuration suivante étudiée. On conçoit que la Pronostication exige moins de travail, moins de calculs, que l’Almanach ou le Présage. A son tour le Présage ne se contente pas d’étudier les aspects des planètes entre elles, dans les signes du Zodiaque, sans lien avec un lieu précis, mais analyse également la position de celles-ci dans les douze “maisons” du thème dressé, ce qui permet de préciser en quels lieux l’impact planétaire aura lieu, pour quel degré de latitude. Travail plus sophistiqué que les deux autres, au niveau de la science astrologique.

   Il est possible que l’astrologue les abordait par ordre croissant de complexité : d’abord, la Pronostication, puis l’Almanach puis les Présages, ce qui ne signifie pas que ces documents ne paraissaient point en même temps.131

   Pierre Brind’amour (1993, pp 501 - 502) s’est contenté, ayant été un des tout premiers, parmi les spécialistes, à examiner l’ouvrage avant son envoi à la restauration, de parler d’ “extraits nostradamiens en prose portant chacun un numéro d’ordre”;132 Il semble donc que ce chercheur qui fut un des rares à prendre connaissance du manuscrit lyonnais avant qu’il soit retiré pour des projets de restauration, n’ait pas identifié les sources du document. Il n’a pas fait le rapprochement avec les Présages déjà parus, pour certaines années et a, semble-t-il, imaginés qu’il s’agissait de divers extraits mis bout à bout, comme c’est le cas d’ailleurs en partie pour les centuries mais non pour les publications annuelles, alors qu’il s’agit de textes d’un seul tenant découpés en paragraphes. “Ce document, écrit Brind’amour (1993), avec ses milliers d’extraits (sic), quand la restauration l’aura rendu accessible, sera l’une de nos principales sources pour l’étude de Nostradamus”. Ce ne serait guère le cas si ces extraits étaient, comme il le laisse entendre, issus des almanachs et pronostications, en grande partie connus et ne comportant pas des développements très sophistiqués au niveau de l’analyse astrologique-thème central de l’ouvrage de Brind’amour (1993). Il en est tout autrement si avec ces centaines de pages manuscrites, plus de 700, l’on a affaire à l’oeuvre astrologique majeure de Michel de Nostredame, dont il n’existe que très peu de vestiges d’origine, avant 1563133, en dehors des Présages Merveilleux pour 1557, seule année pour laquelle nous disposons de trois publications annuelles. Brind’amour (1993) donne en fait l’impression que ces textes ne sont jamais parus dans l’état où ils figurent dans le dit manuscrit : “Le manuscrit n’était (...) pas destiné à une publication immédiate. L’ouvrage est une suite d’extraits (resic) nostradamiens en prose portant chacun un numéro d’ordre avec en marge ici et là des rapprochements effectués par Chavigny avec des événements passés ; il s’y trouve des prédictions pour l’avenir immédiat dont Chavigny espèrait la réalisation avant de le publier”. Tout au contraire, nous pensons que les commentaires en marges sont des résumés oraculaires, numérotés de façon systématiques en face de chaque paragraphe, sans qu’ils soient liés à une époque précise. Chavigny a ajouté dans une seconde marge, comme note l’auteur de la présentation du manuscrit, quelques observations assez dispersées dont on ne sait si elles devaient paraître.

   Exemple de texte de pronostication :

“L’esté ceste année 1557 commencera le 12 de Juin, le Soleil entrant au premier point de Cancer à 26 minutes, la lune à 5 degr.18 minu. de Capricor. Saturne oriental descendant combuste à 7 degrés 48 minu. de Taurus.”

   Exemple de texte d’almanach :

“Dans ce moys de février 1562, sera nouvelle lune le 3 jour à 6h 36 mi. par ascendant, le 12 degr. de Virgo à 1 degr. 12 minutes de Aquarius etc.“

   Exemple de texte de présage :

“Mars estant par le décret du zodiac en la XI & X donne à entendre les causes principales mouvantes le fait de la guerre (...) Aussi par le trine du Soleil à Jupiter, le Soleil dans la XI. Jupiter dans la III demonstré est devers les Espagnes, la mer Tyrrhéne etc.“134

La présence de quatrains d’almanachs dans les Centuries de la Ligue (1588)

   Dans les éditions parisiennes de la Ligue (1588), figure une centurie VI bis qui ne sera pas intégrée dans le canon et qui est en fait constituée, à une exception près non localisée, de quatrains issus de l’almanach pour 1561.

   R. Benazra a consacré dans le RCN (pp 42 - 44 et 118 - 120), une étude assez développée à la question des quatrains pour 1561135, tels qu’ils figurent tant dans le Janus Gallicus que dans les éditions de la Ligue. Nous disposons comme élément supplémentaire du Recueil des Présages Prosaïques (BM Lyon) et l’almanach conservé à la BSG dont il ne semble pas que Benazra se soit servi, le but étant à la fois de reconstituer les quatrains de l’almanach pour 1561 et de comprendre les manipulations subies par ceux-ci dans les années 1588 - 1594. Au départ, l’intérêt pour le dit almanach pourrait simplement tenir à l’existence d’un recueil factice comportant et des Prophéties agrémentées d’une addition pour 1561 parues chez Barbe Regnault et un almanach pour la même année, paru chez Guillaume le Noir, Guillaume.

   En ce qui concerne la reconstitution des quatrains de l’almanach paru chez Guillaume le Noir, à Paris, l’exemplaire de la BSG comporte quelques lacunes, notamment pour le mois de janvier - celui de l’année restant inchangé - nous le complèterons grâce au Recueil des Présages Prosaïques malgré D. Ruzo qui affirme que “celui de janvier 1561 est définitivement perdu” :

“N’avoir de n’estre né refuse dur fait
Horreur d’emprinse, de changement refus
Hors borne (ou birne) puis descouvert au faict
Et non content assailli, mort confus.“

   En ce qui concerne février, l’ordre des versets de l’almanach et du Recueil de Présages prosaïques n’est pas celui de l’addition de 1588, soit c-d-a-b cela pour éventuellement éviter les rapprochements.

a “Prins et captif n’arreste les prez triples
b Plus profond mis, eslevé, mis au trosne
c Renfort de sieges manubis & maniples
d Changez le sacre & passe sus le prosne. ”

Pour mars, idem
Pour avril, idem
pour mai, idem
pour juin, idem
pour juillet, idem
pour août, idem

   En ce qui concerne septembre, l’almanach pour 1561 est lacunaire. Nous ne pouvons donc nous reposer que sur le RPP puisque le Janus Gallicus, dans sa première face, ne les a pas mobilisés. Il est identique à la version 1588.

a “L’Occident libre les isles Britanniques
b Le recongneu passer le bas, puis haut
c Ne content triste Rebel, Corse. Escotiques
d Puis rebeller par glus & par nuict chaut.“

   Benazra, pour octobre, note la même permutation.

   En ce qui concerne le quatrain du mois de novembre, l’ordre des versets diffère :

a “Par le retour du voyage barbare
b Exalteront la protestante entrée
c Le stratagème simulte sera rare
d La mort en voye rebelle par contree.“

   alors qu’en 1588, nous avons la série c-d-a-b., soit la même combinaison que pour février.

   Enfin, pour décembre, encore une fois l’ordre c-d-a-b.

a “D’oppression grande calamité
b L’épithalame converty pleurs & larmes
c Vents chaud, conseil, pleurs & timidité
d De nuict au lict assailly sans les armes“

   Daniel Ruzo (1982, p. 262) a bâti tout un roman autour de l’almanach de Barbe Regnault, en sa possession, et de l’édition de 1561 qui comporterait les quatrains présents dans l’édition de Guillaume le Noir, qui auraient du s’insérer dans le dit almanach :

   “Dans la septième centurie (de l’édition de 1560), on a inséré douze quatrains qui n’y ont jamais figuré. Le premier de ces quatrains est : VI, 31 ; les autres sont ceux qui se trouvaient, tout composés, à l’imprimerie pour être publiés comme Présages dans l’Almanach pour 1561 (...) Supprimés de l’Almanach par souci d’économie, ils furent insérés dans les Prophéties comme Centurie VII et furent numérotés de 72 à 83 comme s’ils appartenaient à cette Centurie.”. Et Ruzo de préciser : “Il fallait terminer l’édition au plus bas prix et avec le plus petit nombre de pages possible.(...) Les copies de 1588 et 1589 nous permettent d’apprécier la quantité incroyable d’errata commis dans l’édition de 1561 etc.” (p. 261)

   Nous ferons les remarques suivantes : le raisonnement de Ruzo s’appuie en réalité sur l’édition de 1588 qui se réfère à une édition de 1560 susceptible en effet d’être celle de Barbe Regnault. Ruzo semble tout ignorer de l’édition avec quatrains de Guillaume le Noir. Si Chavigny a repéré les quatrains de 1561, c’est à partir de cette édition et non de l’édition centurique de 1588 dont les quatrains des mois ne sont pas signalés comme tels. Pour notre part, les éditions de 1588 se sont contentées d’emprunter à Barbe Regnault et à sa veuve la page de titre, remplaçant des centuries par d’autres. Pourquoi ne lui auraient-elles pas emprunté la centurie VII telle qu’elle aurait du se trouver en 1560 s’il s’était agi d’une simple réédition à l’identique, car on ne comprend pas pourquoi ces quatrains d’almanachs auraient été intégrés dans une édition de 1560 et que de ce fait les 40 quatrains de la VIIe centurie auraient, eux, disparu. Nous pensons que l’édition des Centuries de 1560, chez Barbe Regnault, comportait 630 quatrains comme son titre l’indique. Le scénario proposé par Ruzo convient beaucoup mieux à la situation de 1588 alors que plus personne ne sait que les almanachs comportaient également des quatrains, ce qui permettait de faire des fausses centuries avec de vrais quatrains. Apparemment, l’objectif des 639 / 640 quatrains ne fut atteint qu’en 1590 avec l’édition de Cahors.

   L’édition troyenne Du Ruau désignera ces 12 quatrains comme retrouvés dans les centuries précédentes alors que, note Ruzo, à une exception près, il ne s’agit pas de quatrains des Centuries mais il semble que le terme de centurie soit devenu alors synonyme de quatrain. Les éditions Chevillot136 comportent cinq quatrains et non quatre : on y a gardé “Les ravasseurs se trouveront mocquez etc” qui correspond au mois d’octobre 1561.137 Chevillot138 a conservé, peut-être par inadvertance, un quatrain de plus que Du Ruau, à savoir celui du mois d’octobre qui pourtant figurait dans le Janus Gallicus.

   Il existe deux éditions de Pierre Mesnier. L’une est identique139 à celle des autres libraires parisiens, Roger et Veuve Rosset, l’autre, comme le note Benazra (1990, p.122) comporte une addition à la fin de la centurie VI. Il apparaît que cette édition augmentée, selon P. Renouard, doive être datée d’une dizaine d’années de plus, la mention “portier de la porte St Victor” ayant remplacé alors “demeurant à la rue d’Arras, près la porte S. Victor”. Mesnier a publié par ailleurs une Prophétie Merveilleuse d’Antoine Crespin, comportant une Epître à Charles X, le roi de la Ligue, en date du 20 mars 1589 (BNF, 8° Lb35 334), ce qui confirme le caractère ligueur des centuries qu’il fait paraître à la même époque.140

L’exemple de l’almanach pour 1565

   Tout se passe comme si l’on avait voulu, en réalisant ce Recueil de Présages Prosaïques, prendre pour modèle l’almanach paru en 1564 pour l’année suivante : “Almanach pour l’an MDLXV avecques ses très amples significations & présages d’un chacun moys” composé par Nostradamus devenu médecin du Roi (Lyon, Benoît Odo, Bib. Pérouse).

   Le calendrier y est dépouillé de ses quatrains. En revanche, les prédictions mensuelles sont ouvertes par un quatrain, surmonté de la mention du mois et de l’année, alors que dans le calendrier, la mention de l’année ne figure pas.

   L’année suivante, l’almanach reviendra à sa forme habituelle, le calendrier retrouvera ses quatrains et les textes en prose comporteront un chapeau en latin pour chaque mois. (Bib Osler, Montréal), sorte de solution intermédiaire.

Fonction chronématique des vignettes

   Il existe, du vivant de Michel de Nostredame, trois vignettes représentant un homme assis, écrivant, devant une sphère. Il serait bien hardi d’affirmer, avec P. Béhar, Pierre141, qu’on y trouve le “premier portrait connu de l’auteur”.142 Nous avons montré plus haut ce que ces vignettes devaient aux éditions de Virgile et à celles du Kalendrier des Bergers. C’est ainsi qu’en 1555, seraient parus deux ouvrages comportant chacune une série différente : l’édition de Macé Bonhomme (Lyon, 1555) qui ne mentionne pas le nom M. de Nostredame au sein de la vignette et l’autre, une Pronostication pour 1555 (Lyon, 1554, catalogue Bib. Ruzo, 1982) avec une vignette ainsi légendée et entourée d’une frise zodiacale. Béhar (1996, p. 124) note143 “La vignette (de Bonhomme) s’est inspirée de celle de la Prognostication144 pour 1555 (donc parue dès 1554). Jugement peut-être hâtif car il existe de nombreuses éditions de textes nostradamiques comportant la même vignette que celle de l’édition Macé Bonhomme, nous pensons à la Pronostication pour 1562145, au faux Almanach pour 1563. On nous objectera que la Pronostication pour 1562 est plus tardive que l’édition des Prophéties de 1555. Mais encore faudrait-il prouver de quand date réellement la dite édition lyonnaise. Il peut quand même sembler étrange que la même année paraissent à Lyon deux ouvrages du même auteur ne comportant pas la même vignette ! En l’espace de quelques mois, le motif aurait donc évolué.146 Sans une étude de l’ensemble des vignettes connues, il n’est guère possible de s’engager de la sorte. Ainsi, les Significations de l’Eclipse pour 1559 renouent-elles avec la vignette de la pronostication pour 1555, il suffit pour cela d’étudier les planches de la Bibliographie de Chomarat (p. 31).

   En fait, s’il est vrai que la vignette de la Pronostication pour 1555 précède chronologiquement celle qui figure dans l’édition de Macé Bonhomme, il importe de ne pas télescoper les années. Nous disposons de la Grande Pronostication Nouvelle avec portenteuse prédiction pour l’an MDLVII (Musée Arbaud, Aix) qui est en tous points conformes, pour la vignette, à la Prognostication nouvelle & prédiction portenteuse pour Lan MDLV. De même pour la Pronostication nouvelle pour l’an Mil cinq cens cinquante & huict, que nous avons retrouvée à la Bibliothèque Royale de La Haye. Les Significations de l’Eclipse qui sera le 16 septembre 1559 comportent toujours ce même motif qui figure en tête de la Pronostication pour 1555. Notons qu’il s’agit de Pronostications et non point d’almanachs et que notre collection concerne des éditions parisiennes pour 1557, 1558 et 1559, mais il y eut des éditions lyonnaises comme le montre la Pronostication pour 1555.

   Ensuite, le motif de la Pronostication nouvelle pour l’an mil cinq cens soixante deux va changer en adoptant une autre vignette, constituant une variante, celle qui ne présente ni le nom de Nostradamus en écusson, ni la frise zodiacale. On trouve ce même motif cette fois sur un Almanach, considéré comme un faux147, celui pour l’An 1563, de la BM de Lille. Exemple d’utilisation de ce type de vignette pour un (faux) almanach alors que chez Nostradamus, cet usage était, apparemment, réservé à la pronostication.

   Mais entre ces deux vignettes, il semblerait qu’une autre se soit intercalée, attestée dans l’édition anglaise d’un almanach : Almanack for the yere MDLXIII (F.S.L., Washington). Le personnage tient à la main une baguette qu’il dirige vers une sphère armillaire. Or on ne connaît pas d’exemplaire original des pronostications pour 1559, 1560 et 1561, il est possible que l’almanach ait emprunté son motif à l’une de celles-ci et de toute façon pas à la Pronostication pour 1562 qui diffère. En fait, nous disposons d’un autre document148, paru en France celui-là, il s’agit d’une vignette figurant sur des éditions des Centuries et parues en 1588 - 89 mais ayant pour titre Les prophéties de M. Michel Nostradamus : dont il y en a trois cens qui n’ont encores esté imprimées, lesquelles sont en ceste presente édition/ Revueues & additionnées par l’Auteur, pour l’An mil cinq cens soyxante & un, de trente neuf articles à la dernière centurie.149 Il semble acquis qu’un tel titre ait bien désigné une édition des Centuries en 1560, chez Barbe Regnault150 mais, selon nous, avec un tout autre contenu que celui des centuries de la Ligue. Or, cette date de 1560 correspond justement au trou existant entre les deux séries de vignettes. Est-ce à dire qu’à cette date, les prophéties portaient les vignettes des pronostications, ce qui justifierait leur présence dans les éditions des Centuries de 1555 et de 1557, usant du troisième motif ? Mais précisément, l’on conçoit mal qu’en 1555 et 1557 on ait utilisé la troisième vignette et en 1560 la seconde.

   La frise zodiacale ne sera plus de mise dans les années 1560. Il est vrai que l’astrologie a été condamnée en 1560, à la fin du règne de François II, peut-être sous l’influence des Guises, aux Etats Généraux d’Orléans.151 Enfin, le nom “M. de Nostredame” - qui ne comporte même pas le prénom - ne figure plus : ne serait-ce pas sous ce nom et non sous celui de Michel Nostradamus que cet auteur se serait d’abord fait connaître ? Si c’était le cas, il faudrait conclure que sa production aurait débuté bien avant la Prognostication pour 1555. En effet, l’intitulé de celle-ci - la plus ancienne qui nous soit parvenue - comporte au titre “composée par maistre Michel Nostradamus”, juste au dessus de la vignette qui comporte “M. de Nostre / Dame.152 Tout se passe comme si la vignette en question datait déjà et qu’on l’avait conservée en dépit de la réputation de l’auteur, mieux connu désormais sous le nom de Michel Nostradamus. Ce décalage ne pouvait se poursuivre indéfiniment. Plutôt que de supprimer cette mention sur la vignette, on aura préféré en composer une autre. A la fin du XVIIe siècle, Balthazar Guynaud utilisera pour frontispice un “portrait” calqué sur la première vignette, on y voit Nostradamus, la plume d’oie à la main, devant un écritoire et son encrier et dans le coin droit le haut d’une sphère armillaire. La bibliothèque est présente comme pour le modèle. En revanche, il n’y a pas d’ouverture vers le ciel. Le chapeau ressemble fort à celui des vignettes des années 1550 / 1560. On voit le personnage barbu dans son fauteuil de face et non de profil. A n’en pas douter, ce “portrait” paru à la fin du règne de Louis XIV est calqué sur celui de 1554.

   Si l’on considère que les almanachs ne comportaient pas de vignette extérieure autre que des instruments de mesure, comment se fait-il que les Centuries qui en sont le prolongement, du fait des quatrains, en comporteraient ? Il faut noter en effet que les éditions des centuries, par ailleurs également douteuses, de 1568, chez Benoist Rigaud, ne comportent pas de vignette du type pronostication mais bien un motif cosmographique153 à l’instar des almanachs comme celui pour 1566.154 Cette présence de vignettes de pronostication en tête des éditions des centuries de 1555 et 1557 nous apparaît en soi comme un signe de contrefaçon, n’étant plus au fait des usages de l’époque ou en tout cas des éditeurs de Nostradamus. Il y a en effet là une dualité remarquable entre le personnage assis, censé représenter l’astrologue et l’autre vignette où l’on voit deux bras, l’un tenant un compas, l’autre une sphère, avec au dessus les luminaires et les cinq planètes, symbolisées par des étoiles. Cette vignette convient mieux au genre de l’almanach qui ne relève pas de l’astrologie judiciaire. Il s’agit là en fait du couple Astrologie-Astronomie tel qu’il était instauré au sein des sept Arts Libéraux, se partageant la même discipline, tout en étant au fait de ce qui les distinguait dans leurs méthodes. De ce point de vue, les éditions de 1568 portant la marque des almanachs nous semblent être restées fidèles à un certain esprit et l’on peut raisonnablement présumer que si vignettes il y eut sur les éditions des centuries, elles correspondaient davantage en effet à celles des almanachs, leur caractère de pronostication astrologique n’étant guère avéré.

III

Le secours des traductions

    La réputation de Michel de Nostredame est attestée par l’écho que son nom rencontre à l’étranger. Mais celle-ci n’est pas liée aux Prophéties qui ne seront traduites qu’au XVIIe siècle, à commencer par l’Espagne dès les années 1640.

   Certains textes de Nostradamus ne nous seraient en fait connus que grâce aux traductions anglaise ou italienne et il apparaît indispensable pour les bibliographes de Nostradamus de recenser systématiquement les diverses traductions et textes se référant, d’une façon ou d’une autre, à Nostradamus, ce qui permet éventuellement de repérer des faux français ou des falsifications sans évidemment exclure que les publications étrangères soient également sujettes à diverses variantes plus ou moins délibérées.

A - L’apport des éditions anglaises

   Nous étudierons les éditions pour 1559 et 1564 et nous aborderons la question des contrefaçons sur la base même des recoupements par les traductions. Le recours aux traductions a longtemps été le seul accès à des publications perdues, ce n’est plus le cas avec la conservation désormais, à la Bibliothèque de Lyon-La Part Dieu, du Recueil des Présages prosaïques, encore que cette copie manuscrite d’un certain nombre d’almanachs et pronostications ne soit pas à l’abri de tout soupçon mais elle a au moins l’avantage d’être plus complète et plus systématique que la sélection opérée par Jean-Aimé de Chavigny à partir de ce corpus, pour la première Face du Janus Gallicus.

Les Significations de l’Eclipse de 1559

   Comment fixer à quelle date ont pu paraître les premiers quatrains centuriques ? La tâche est rendue difficile par la pénurie quasi totale de témoignages tant de la part de Nostradamus lui-même, tant dans ses lettres que dans ses almanachs et pronostications, que de celle de ses contemporains concernant les centuries, avant les années Soixante-dix.

   La seule exception résiderait dans un ouvrage que Nostradamus aurait publié en 1558 sous le titre de Significations de l’Eclipse pour 1559 - 1560, lorsqu’il est fait allusion par Nostradamus lui même, si ce passage n’est pas apocryphe, à une Interprétation de la seconde centurie dont on n’a pas de trace.155 Il ne s’agit pas là d’un quatrain qui serait cité mais de l’annonce de l’existence d’interprétations des centuries. En cela, nous rangerions le dit ouvrage dans la catégorie programmatiqueq, c’est-à-dire annonçant une série de textes (cf. infra).

   Voilà donc qui laisse entendre que les quatrains, qu’ils soient ceux des almanachs ou ceux des Centuries auraient fait l’objet de “commentaires” et ne se suffiraient pas à eux-mêmes. La formule parisienne “Commentaires” de Chavigny apparaît en fait comme plus proche de la réalité que celle de “commentaires de Nostradamus”.

   Nous pensons en réalité que les Significations auraient pu faire l’objet d’une interpolation à l’instar de la première Epître à Henri II. Celui qui a voulu accréditer l’existence de “commentaires” que Michel de Nostredame aurait effectué sur ses Centuries est l’auteur de la première Face du Janus Gallicus dont l’ouvrage paru à Lyon en 1594, comporte en sous titre “extraite et colligée des centuries et autres commentaires de M. Michel de Nostredame”.

   C’est le cas dans les dernières phrases de la Préface à César : “comme plus à plain j’ay rédigé par escript aux miennes autres prophéties qui sont composées tout au long (...) comme nous avons noté par les autres parlant plus clairement etc.”

   Il en est ainsi de l’interpolation que nous suspectons dans les Significations de l’Eclipse : “comme plus amplement est déclaré à l’interprétation de la seconde centurie de mes Prophéties”. On notera la similitude de forme “comme plus à plain” et “comme plus amplement”.

   Cela dit, ce passage peut être compris à deux niveaux : d’une part, certes, il annonce une interprétation des centuries, de l’autre, il signale au moins qu’il existe une “seconde centurie”, qu’elle ait ou non fait l’objet d’une quelconque glose.

   Autrement dit, si l’on renonce à contester l’authenticité des Significations, c’est-à-dire sinon à mettre en cause la paternité de Nostradamus sur celles-ci du moins à remettre en cause la date de parution, alors nous pourrions admettre qu’en 1558 au plus tard - terminus ad quem - seraient parues des centuries attribuées à Nostradamus. Ce qui recouperait assez bien l’existence d’une édition des centuries en 1557, chez Antoine du Rosne.

   On ne peut non plus exclure qu’une contrefaçon ait utilisé des éléments authentiques et que, si tant est qu’il s’agisse d’un faux, Nostradamus aurait en effet mentionné, dans le texte, une centurie :

   “Les Roys (...) devraient aviser que cecy (…) menasse quelque cas que tel autre & beaucoup plus sinistre & calamiteux adviendra l’an 1605 que combien que le terme soit fort long, ce nonobstant les effectz de cestuy ne seront guères dissemblables à celuy d’icelle année comme plus amplement est déclaré à l’interprétation de la seconde centurie de mes Prophéties.” (Significations, fol. BII).

   Si l’on examine le paragraphe visé, on remarque que l’auteur fournit une date en précisant “combien que le terme soit fort long”, c’est-à-dire “en dépit du long terme”. 1605, ce n’est jamais qu’une quarantaine d’années plus tard. On peut réellement se demander si initialement la date n’était pas sensiblement plus éloignée que 1605. On pense notamment au XVIIIe siècle. Voilà qui nous confirmerait dans l’idée de retouches ponctuelles qui ne portent pas atteinte au corps du texte. Il serait dès lors concevable que Nostradamus ait effectivement référé à sa seconde centurie voire à quelque interprétation qu’il aurait eu l’intention de faire connaître et qui n’aurait point été retrouvée si tant est qu’elle fut rédigée.

   D’autres observations sont à mentionner à propos de ces Significations : on remarque au fol. A7 l’emploi d’abréviations inhabituelles chez Michel de Nostredame : “Et aussi H.T.H.N.S. & par moyen d’héréditer (sic) s’ensuivra telles merveilleuses adventures”. En revanche, Chavigny est coutumier du fait dans ses Pléiades (1603).

   Comme pour l’Epître à Henri II, il apparaît assez clairement que nous avons affaire probablement à des interpolations au sein d’un texte ayant existé, en fait une lettre dédiée à Jacobo Marra, vice-légat d’Avignon, mais dont nous ne semblons plus avoir trace, sous une autre forme et avec un contenu quelque peu distinct, et qui se trouverait lié à la polémique de l’astrologue avec certains de ses adversaires.156

   Ainsi, il nous apparaît qu’il y a un bon usage des contrefaçons : une fois les retouches les plus flagrantes détectées, l’on se doit de considérer le texte comme comportant une part d’authenticité : date de publication, adresse du libraire, expressions remaniées que l’on peut tenter de restituer etc. Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

Les deux fausses épitres en date de 1558

   Si dans l’épître au vice-légat, il est question de 1605 (fol B ii), dans l’épître centurique à Henri II, dont rien ne prouve qu’elle fut publiée au moins durant dix ans, et qui peut n’avoir été rédigée que bien après la date qui figure à la fin de l’épître, il s’agit de 1606157, deux dates qui selon nous n’étaient pas significatives dans le système de Nostradamus qui visait plutôt le début du siècle suivant (cf. infra).

   En revanche, dans le système léovitien, 1606 est la dernière année étudiée; elle est considérée comme dangereuse non pas en raison d’une grande conjonction mais du fait des effets d’une éclipse : “En cest an commenceront les effects de l’horrible éclipse de Soleil qui l’an précédent aura esté veue. C’est chose toute certaine que plusieurs siècles auparavant n’en a esté une plus grande.” On trouve dans l’Epître au Roi une série de positions planétaires en signes zodiacaux qui correspond à l’Ephemeridum de Leovitius mais nous avons été amenés à mettre en cause très fortement l’authenticité de la version de cette Epître. La seconde Epître à Henri II est datée du 27 juin 1558 - date qui ne saurait évidemment être celle qui introduisait les Présages Merveilleux pour 1557 tandis que les Significations sont datées du 14 août 1558, soit à quelques semaines d’intervalle : “Saturne en Capricorne, Jupiter en Aquarius, Mars en Scorpio, Vénus en Pisces, Mercure dans un mois en Capricorne, Aquarius et Pisces, la Lune en Aquarius, la teste du Dragon en Libra la queue à son signe opposite suyvant une conjonction de Jupiter à Mercure, avec un quadrin aspect de Mars à Mercure....” (Epître à Henri II) Il s’agit d’une configuration annoncée pour 1606 date qui figure dans la version centurique : “mesmes de l’année 1585 et de l’année 1606”. Le style de l’Epitre nous semble inspiré du texte léovitien comme en témoigne la formule “commençans icelle année” pour désigner une échéance lointaine : pour 1606, précisément, nous trouvons dans le recueil léovitien : “En cest an commenceront etc.”

   Il semble, en tout cas, que Michel de Nostredame ne se soit intéressé aux Années Quatre-Vingt du XVIe siècle, s’il l’a jamais fait, que sur la fin de sa vie et c’est d’ailleurs alors, dans les années soixante, que l’échéance régiomontanienne de 1588 commencera à connaître un certain écho. Mais le texte italien que nous avons retrouvé à la Valiceliana de Rome est antérieur à un tel intérêt.

   Il faudra donc attendre l’almanach pour 1565 - qui ne doit probablement pas être attribué à Michel de Nostredame - paru à Lyon chez Benoist Odo (Bib Pérouse)158, pour lire une formule de ce type : “le proche definement du monde l’an 1585 & cent fois pire l’an 1588” mais cette fois, il n’est pas fait allusion au début du XVIIe siècle puisque précisément, comme le notait Jean Bodin, quel intérêt y avait il à s’intéresser à 1605 si la fin du monde devait se produire en 1588 ? Il y a là une contradiction qui relève d’un syncrétisme entre approche cyclique et spéculations eschatologiques.

   Il semble en revanche tout à fait improbable qu’une telle année ait pu figurer dans un texte de Michel de Nostredame à la fin des années cinquante et notamment dans une Epître à Henri II en tête d’un groupe de Centuries comme c’est le cas dans les versions que l’on nous présente.159

   Denis Crouzet a raison160 d’admettre le principe d’un changement d’inspiration au sein du discours nostradamique qui au demeurant trahit parfois l’émergence d’un autre auteur sous le même nom. Une certaine évolution dans l’imaginaire de l’astrologue s’y fait sentir, reflet du cheminement d’une pensée qui s’est enfermée dans un rhétorique catastrophiste.

   L’auteur des Significations s’est certes contenté de reproduire des éléments déjà parus par ailleurs, notamment chez Leovitius, mais Nostradamus était bien capable d’un tel procédé ; il en aurait profité pour annoncer la rédaction de commentaires des centuries, dont la seule trace que nous ayons est celle proposée par Chavigny qui publie en 1594 la Première face du Janus Gallicus dont il dit qu’elle est “extraite et colligée des centuries et autres commentaires de M. Michel de Nostredame”. Curieusement, si Nostradamus semble n’avoir laissé en vérité la moindre trace d’un commentaire de ses centuries-en revanche, au niveau annuel, il apparaît qu’il n’a cessé d’accumuler et de croiser les lectures et gloses autour des positions astrales : almanach, pronostication, présages. Ces Significations pour l’éclipse de 1559 sont au demeurant uniques en leur genre, nous n’en connaissons pas d’équivalent, à notre connaissance, dans toute l’oeuvre de Nostradamus.

   Nostradamus - si c’est lui - explique, au début de son épître au vice-légat, qu’après avoir terminé “Almanach et pronostiques” de l’an 1559, il s’est aperçu “quelques jours après”, “par plus profonde calculation” de “calamiteuses adventures” concernant les Jovialistes “ou V. S. en est un des chefz”. Les expressions “jovialistes”, “martialistes” sont typiquement léovitiennes (cf. l’Eclipsium). Dans une lettre datée du 7 Juin 1879, année cruciale pour le système trithémien, avec le passage de Saturne en Bélier, l’Abbé Torné, un des maîtres des études nostradamiennes au XIXe siècle, écrit à Raoul de Tricqueville161 qu’il voit dans les Significations de l’Eclipse “la reproduction mot pour mot de tout ce que l’astrologue Léovice venait de publier sur cette éclipse”.

   Dans le débat autour des Significations de l’éclipse de septembre 1559, l’apport de la traduction anglaise de la Pronostication pour 1559, conservée à la British Library, va se révéler des plus précieux et nous semble confondre les faussaires.

   Nous avons signalé que l’Epître à Iacobo Marra du 14 août et celle du canon à Henri II du 27 juin, sont l’une et l’autre datées de la seconde moitié de l’été 1558, soit un an avant la mort d’Henri II, blessé le 30 juin et décédé le 10 juillet.162

   Dans les deux cas, l’on peut se demander si la raison d’être de ces deux contrefaçons n’a pas été après coup d’annoncer la mort inopinée du roi. Il serait tout de même troublant, reconnaissons-le, que Nostradamus ait rédigé des Significations pour les années 1559 et 1560 qui furent si déterminantes pour le gouvernement de la France, sans en pressentir les graves échéances. On comprendrait dès lors pourquoi Nostradamus, ou plutôt celui qui se présente sous son nom, reconnaît qu’après avoir publié almanach et pronostication163, il s’est rendu compte, avec quelque retard, qu’il avait encore certains points à préciser. Il y aurait donc fort à suspecter une tentative pour pallier une certaine carence à prévoir.164 Mais Henripolis, en tête de l’almanach pour 1559 - ce qui est attesté par le RPP, Livre IV, p. 96 - ne serait-il pas le nouveau nom que le prophète se propose de donner à Calais165, reprise, avec Guines, par François de Guise à l’Angleterre de Marie Tudor le 6 janvier 1558. L’almanach anglais correspond exactement avec la version du Janus Gallicus :

To erect a sign of victory, the city Henripolis

Sur la dite année: Dresser trophée, cité d’Henripolis

   En fait, comme on peut le lire, pour le mois de mai, dans l’édition anglaise de la Pronostication pour 1559 (BL, C5 r) le roi construira “a nevve citie in the North, called Henripolis”, il s’agirait d’une ville nouvelle qu’Henri II fondera dans le nord de la France. A ce propos, on notera que la Pronostication constitue bel et bien ici un commentaire du Quatrain de l’almanach alors qu’on ne trouve pas d’équivalent pour l’interprétation des quatrains des Centuries.

   Ne conviendrait-il pas, au demeurant, de resituer les publications de 1558 - 1559 dans le cadre de la politique du royaume ? Marie Tudor meurt en 1558, date à laquelle le dauphin François épouse Marie Stuart, héritière du trône d’Ecosse et ayant des prétentions sur l’Angleterre.166 Est-ce que cet almanach ne relève pas de la propagande pro-française ?167 Ne pourrait-il être d’origine écossaise ?

   Voilà ce que Nostradamus écrit pour le mois de juin 1559 selon la traduction anglaise : “Fraunce to be greatly augmented, to triumphe, to magnifie ans specially his ovvne monarke”. Le traité de Cateau (ou Chasteau) Cambrésis, signé en avril, ne correspond guère à une telle augmentation territoriale ou politique et quant à son monarque, il sera mortellement blessé le 30 juin. Mais sur le coup, ce traité dut apparaître, lors de sa préparation, comme une divine surprise-on songe à une sorte d’Accords de Munich - avant que la France soit endeuillée. Dans le Janus François / Gallicus, qui se veut la tête de proue du prophétisme français, organisé année par année, il est encore mentionné en 1594 : “Paix universelle soubz le Roy Henry II de ce nom”, mentionnant le quatrain I, 92 :

“Sous un la paix par tout sera clamée”

   Au demeurant, contrairement à ce qui est affirmé en tête des Significations, Nostradamus n’a nullement négligé l’éclipse de septembre, dans sa Pronostication (cf. the prediction of September) et il inclut comme dans les Significations l’année 1560 dans son pronostic, probablement à la lecture de l’Eclipsium de Leovitius. En réalité, il nous semble que les Significations ne font que reprendre le texte de septembre en y introduisant quelques changements de circonstance.

   Le texte de la pronostication pour 1559 était en effet déjà assez développé au regard de l’éclipse :

   “The prediction of september. In this moneth shall be comprised almost all the apparences of the whole yeare bycause that the Eclipse shall be in it etc (…) It is most evident that this Eclipse whiche is in this moneth pronounceth and telleth some great mutation, insurrection, sedition, rebellion, and conspiratie against the bishops and priestes.”

   Ce seraient en fait, selon la pronostication pour 1559, les évêques et les prêtres qui auraient été menacés par cette éclipse. Et de conclure à propos de septembre : Mars est et sera favorable à toute la France, présage une grande prospérité au monarque en raison de l’éclipse équinoxiale. (Trad. de l’anglais)

   Que dire en effet de ce qu’écrivait Nostradamus pour le mois de novembre 1559 ? “The great monarke of Fraunce shall not be farre from the surname of the title of the Empire & saluted of ten times by his subiectes, Caesar victor Imperator”. Outre le fait qu’Henri II mourra au début d’août 1559, il est tout de même remarquable qu’un tel texte ait pu être publié en Angleterre et de fait il est imprimé à Anvers - ville ennemie - et on ne sait de quelle façon il pouvait circuler outre Manche, sous le règne d’une Elisabeth, qui, à vrai dire, venait juste d’accéder au trône, succédant à sa soeur Marie Tudor.

Les effets d’Antarès

   La pronostication anglaise ne fait pas référence à l’étoile Antarès comme si en fait Nostradamus n’avait pas lu Leovitius, dans l’oeuvre duquel cette étoile figure en bonne place tout comme dans les Significations :

   “Or, il faut entendre que voyant Mars principal dominateur de l’eclipse occupant la 8. maison non esloignée d’Antare qui est une étoile fixe de la seconde grandeur la plupart de la nature sienne est martiale du tout, qui vient à menasser (...) la mort violente & subite ioint avec morts publiques de quelques uns.“

   La conjonction de l’étoile fixe Antarès, “coeur du scorpion”, avec une planète comme Mars est traditionnellement l’annonce de danger à l’œil.168 Or, Henri eut l’oeil crevé par la lance de Montgomery. Nous pensons que le choix du texte de Leovitius s’éclaire : repérant après coup la présence d’Antarès dans le thème de l’éclipse du 16 septembre 1559 qui fait de peu suite à la mort du roi, il a probablement semblé qu’il fallait pour le moins que Nostradamus ait noté cette menace, connue de tout astrologue. L’emprunt n’était donc pas innocent, il signifiait également que l’événement avait été annoncé au moins dans l’Eclipsium de Leovitius.

   Et l’auteur par ailleurs d’annoncer bien des changements parmi ceux qui se croyaient installés au pouvoir : “ceux qui se penseront estre les plus seurs ce seront ceux qui seront constituez en plus extrême périclitation”. On songe à l’arrivée des Guise aux côtés du jeune couple royal et à la disgrâce de certains favoris. Il est même possible que l’on ait voulu annoncer, pour faire bonne mesure, dans les Significations, le début du règne de François II, “homme vir non vir & du tout efemine (sic)”, du tout signifiant ici tout à fait.

   Il n’en reste pas moins que l’on ignore à quelle date furent publiées ces Significations.169 En 1559 - 1560 ou bien plus tard ? Par des nostradamistes peu scrupuleux ou bien par Nostradamus lui-même, après coup ? On fera en tout cas remarquer une certaine similitude avec le titre de l’Almanach pour l’an 1567 (...) avec ses amples significations, ensemble les explications de l’Eclypse merveilleux & du tout formidable qui sera le IX d’avril proche de l’heure de midy, Lyon, Benoist Odo. Le terme “signification” est semble-t-il synonyme de “présages”, si l’on compare avec certains almanachs des années précédentes. En ce qui concerne l’almanach pour 1565, on trouve “significations & présages” alors qu’au titre de l’almanach pour 1566, la formule est “significations et explications”.

   C’est, à en croire une lettre manuscrite de Henri Torné-Chavigny, envoyée à Raoul de Triqueville, publiée en fac-simile, avec la réimpression des Significations de l’Eclipse de 1559 dans l’Almanach pour 1880 (Ce que sera !)170 qu’aurait du paraître la réimpression des Significations accompagnée de la dite lettre de Torné. Triqueville aurait communiqué à Torné, entre autres, le dit livret “reproduction mot pour mot de tout ce que l’astrologue Léovice venait de publier sur cette éclipse (ce qui) dénote que le vrai but de l’auteur était de réduire à néant l’astrologie le jour où son plagiat serait découvert.“171

   Contrairement à ce qu’affirmait Torné dans sa Lettre à Raoul de Triqueville, les Significations de l’Eclipse pas plus que la lettre ne parurent dans l’Almanach pour 1880, bien que figure le nom de l’oeuvre au Sommaire. En effet, dans la présentation de son prochain ouvrage La Science en défaut, H. Torné note :

   “La science prend pour un astrologue Nostradamus qui dans les Significations de l’Eclipse a copié servilement l’astrologue Léovice _ ce qu’aucun savant n’a encore soupçonné _ uniquement pour montrer que l’astrologie, à qui il oppose dans le même ouvrage ses véritables prophéties ne peut révéler l’avenir avec précision et certitude.“

   Il semble donc que H. Torné-Chavigny ait préféré traiter le sujet dans un des huit chapitres de ce nouvel ouvrage qui semble n’être jamais paru. Par ailleurs, dans le même Almanach pour 1880, Torné fait en effet une très brève allusion à l’oeuvre (p. 122) dans une Lettre à Gourdon. Torné rappelle que selon lui Nostradamus serait l’auteur du dessin en tête de cet ouvrage. Cette gravure est reproduite avec un commentaire la reliant aux deux premiers quatrains de la première Centurie dans le même Almanach pour 1880 à la page 158.

   Mais Torné n’alla pas jusqu’au bout de la piste Leovitius, en raison peut être de ses convictions anti-astrologiques.

   Comment l’auteur des Significations procéda-t-il ? Leovitius, en sus des Tables, rédigea dans une seconde partie des Praedictiones astrologicae pour étudier les effets de chaque éclipse. C’est le chapitre intitulé Praedictio astrologica ad annum domini 1559 & 1560 qu’il traduit sans citer ses sources :

   “Cum autem eclipsis Lunae in gradu 2 Arietis fiat, quae quartae & quintae domui praest, seditiones vulgi erga reginam quamdam suscitat item conspirationem nonnullarum civitatum interse denunciat quae per vigilantiam aut largitiones praefectorum dissolvetur. Ex quo postmodum graves mulctae ingruent. Deinde cum eclipsis circa principium prime domus contingat, annonae caritatem ac famem portendit. Tertio cum Mars dispositor eclipsis octavam domum occupet, non procul ab Antare constitutus stella fica ut plurimum nature suae accommoda, magnitudinis secundae...“

   devient :

   “Et pour ce que l’éclipse est en partie entre Pisces & du deuxième degré d’Aries qu’il est préféré & va devant le quatrième & cinquième domicile du ciel, elle menace de quelques grandes & fort étranges séditions, conspirations, conjurations, contrariétés secrètes & manifestes querelles, mesmes (surtout) à l’encontre de quelque Reine ou homme vir non vir & du tout efféminé avec la surprise de quelques autres Grands desquels la particularisation ici ne peut avoir lieu (...). Et après pour ce que la dite éclipse sera environ le commencement de la première maison céleste, elle vient à présager en mauvaise partie (…) Or il faut entendre que voyant Mars principal dominateur de l’éclipse occupant la 8eme maison non éloignée d’Antarès qui est une étoile fixe de la seconde grandeur la plupart de la nature sienne est martiale du tout.”

   En tout état de cause, la brièveté du texte de Leovitius _ une page environ _ n’aurait pas suffi à constituer ces Significations lesquelles, au niveau technique, s’apparentent à des Présages.

   Nostradamus ne sera pas le seul à s’inspirer de Leovitius, qui, rappelons-le, fut un des responsables de la mobilisation des esprits pour 1588.

   En 1565, paraissent des Prédictions des choses plus mémorables qui sont à advenir depuis l’an MDLXIII jusqu’à l’an 1607 prises des éclipses et grosses Ephémérides de C. Leovitie et des Prédictions de Samuel Siderocrate. Les éditions de ce genre sont nombreuses, certaines sont des traductions, d’autres n’utilisent ce titre que comme prétexte pour placer un système fondé sur des cycles planétaires de type perpétuel (cf. infra).172 En fait, il s’agit pour les premières éditions de traductions françaises d’abrégés parus en Allemagne et non de compilations réalisées en France.173

   L’avantage de ces sommes prédictives proposées par Leovitius dans les années cinquante est de proposer des calculs astronomiques de qualité. Il reste qu’une autre astrologie considère qu’un tel effort n’est pas nécessaire et que l’on peut fort bien se contenter de répéter des textes séculaires selon un cycle de 28 ans, idée qui s’imposera pleinement et submergera les formules plus sophistiquées, à partir du XVIIIe siècle.

L’almanach anglais pour 1564

   La Bibliothèque d’Urbana possède une édition anglaise de l’Almanach pour 1564, que pendant longtemps l’on ne connut que par le Janus Gallicus et désormais par le RPP. Or, les quatrains anglais ne correspondent absolument pas à ce qui figure dans les Présages. A priori, il n’y a pas de raison de soupçonner Chavigny d’avoir présenté d’autres quatrains que ceux des almanachs. La première hypothèse qui vient à l’esprit est celle d’un faux almanach dont les quatrains auraient été composés par un auteur local. Nous essaierons de montrer que ce ne fut pas le cas mais dans ce cas une autre question se pose : d’où viennent ces quatrains s’ils sont bien d’origine française et s’ils sont d’une veine nostradamienne, sont-ils d’un imitateur français en cette période - 1563 - où les faux tendent-ils alors à se multiplier ? Il est en tout cas remarquable que les bibliographes des années 1980, de Ruzo à Benazra174 en passant par Chomarat, n’aient pas étudié ces quatrains anglais. Désormais, nous disposons, avec le RPP (Livre IX), d’une reproduction manuscrite de l’almanach pour 1564. Or, le texte est largement identique mais la question n’est pas réglée définitivement, étant donné que les deux sources françaises sont très proches. De toute façon, nous disposons avec l’almanach anglais du calque d’un almanach français, probablement nostradamique, paru avant 1564. Rappelons que l’année précédente, était paru (Paris, Barbe Regnault) un faux almanach pour l’an 1563 (BM Lille 13984).

   L’étude des rimes montre, nous apparaît-il que l’on a bien affaire à une traduction du français :

   Février 1564 : frendes (anglais moderne : friends) ne rime pas avec enemies mais en français amis rime avec ennemis.

   Avril 1564 : adversaries ne rime pas vraiment avec affayres mais adversaires, en français, rime avec affaires.

   Juillet 1564 : le pluriel Infidels ne rime avec le singulier cruel alors que cela se pratique en français où l’on ne marque pas la finale. On trouve des exemples dans un quatrain de Nostradamus.

   Octobre 1564 : le pluriel faces hideuses rime avec le singulier la piteuse.

   Décembre 1564 : Mercury ne rime pas avec care mais Mercure rime avec cure.

   On notera dans le même quatrain de ce mois : mercurialistes rimant avec jovialistes, le français ayant été conservé tel quel.

   Prenons le cas d’un autre almanach traduit en anglais, An almanack for the yere MDLXII made by maister Michael Nostrodamus (sic) Doctour of phisike, of Salon of Craux in Provance (FSL). Comme le note Chomarat (1989, p.38), cette publication “a la particularité de contenir les présages de l’almanach pour 1555 et non ceux annoncés dans le titre pour 1562”. Ainsi, les éditeurs anglais disposaient-ils de collections déjà anciennes, remontant six à sept ans plus tôt dans le cas considéré.

   Ne serait-il pas envisageable, dès lors, que cette série de quatrains de l’almanach pour 1564 correspondît avec l’année pour laquelle nous n’avons pas de trace, pas même chez Chavigny, à savoir l556 ? Une autre éventualité concernerait un almanach antérieur à 1555 - mais y en-a-t-il eu ? - puisque nous n’avons pas non plus trace des quatrains d’almanachs plus anciens.

   Il y est fortement question des Turcs et des Infidèles dans ces quatrains.

   Juillet : “Peace and Unity between the Infidels”

   Septembre : “Towards the Turks, it will be easy to fight”

   Octobre : “Turky in trouble”

   Or, à la fin de juillet 1551, la flotte turque menaçait les Etats de l’Eglise. Le pape Jules III jetait l’anathème sur Henri II, allié, comme son père, avec le Sultan, Soliman le Magnifique. Ne pourrait-on envisager que le thème turc ait pu marquer un éventuel almanach pour 1552 ?

   On ignore pour quelle raison les éditeurs anglais préférèrent renoncer aux quatrains parus pour 1564 - comme ils le firent en ce qui concerne 1562 - mais il est concevable que les quatrains pour l’an 1556 aient mieux correspondu à certains enjeux de l’an 1563, date de leur mise en place. En tout cas, il ne s’agit là que de la substitution des quatrains car les données astronomiques, avons-nous pu aisément vérifier175, à des dates plus tardives que celles de leur destination première n’a pas pris naissance avec Chavigny.

B - L’apport des éditions italiennes

   Nous étudierons notamment le cas des éditions pour 1563 et 1564.

Les éditions adressées au pape Pie IV

   Tout comme il existe des Epîtres à Henri II dont la seconde fut très certainement conçue à partir de la première, il y a également un problème concernant un grand contemporain de Michel de Nostredame, le Pape Pie IV.176 On connaît deux versions de la première “lettre” au pape, l’une, imprimée, datée du 17 mars 1561, l’autre, restée manuscrite à l’époque, du 20 avril de la même année.177 Curieusement, c’est la première qui sera publiée et non la seconde, plus développée mais largement identique. On en connaît le manuscrit notamment grâce à Douchet qui, en 1906, dans le cadre de ses rééditions d’almanachs de Nostradamus publia celui ci.178

   Comparons le passage consacré à l’échéance de 1570 :

   Préface manuscrite : “Comme aussi par le sommaire que j’ay calculé en la préface suivante iusques à l’année 1570. là environ.”
Préface imprimée: “Comme par le sommaire que j’ay calculé dans la présente préface manifestant iusques à l’an 1570.“ Et de fait l’épître est précédée d’un “Présage sommaire de l’année” qui constituerait, en quelque sorte, le premier volet de la Préface.

   Tout se passe en fait, à lire le texte manuscrit, comme si l’épître manuscrite avait été envoyée au pape telle quelle avant d’être inclue dans un ensemble plus vaste. Nous pensons que le déroulement a pu être le suivant : l’épître d’avril a certes été rédigée après celle de mars mais envoyée voire diffusée avant puisque les contingences de la publication d’almanachs concentrent leur vente sur le dernier trimestre de l’année “romaine”.

   Nous avons par ailleurs retrouvé une édition italienne signalée dans le Catalogue de la Succession de l’Abbé Rigaux.179 Cet imprimé se trouve à la Bibliotheca Valicelliana de Rome. Jusque là on ne connaissait que des éditions tardives de cette Epître au Pape180 lesquelles ne débutaient qu’en 1565 alors que dans cette édition il s’agit d’un texte qui se présente comme ayant été rédigé fin 1562 (le 18 décembre).181

   En réalité, il ne s’agit ni plus ni moins que de la traduction italienne de l’Epître au Pape figurant en tête de l’Almanach pour 1562 et datée du 17 mars 1561 : Les Prédictions de l’almanach de l’année 1562 (...) consacrez à nostre Sainct Père le Pape Pie quatriesme de ce nom. Or, que lit-on dans cette épître182 : “Soubz votre sainteté toute la chrétienté dépend que plus à plain pourra veoir par le contenu d’un chascun moys, comme par le sommaire que j’ay calculé dans la présente préface manifestant jusques à l’an 1570 là environ que au commencement de ma calculation j’ay communiqué à la Sérénissime majesté de la Royne régente de France.“183 Chavigny, dans le Recueil des Présages Prosaïques, commentera ainsi, en marge, le passage : “Et je crois que l’auteur escrivant ceci, il ne terminoit pas nos maux à l’an 1570, en sa tacite pensée mais les estendoit plus avant mais il escrit ainsi pour estonner le monde et le rendre plus enclin à retourner à Dieu” (p. 282 du Recueil des Présages Prosaïques).

   En fait, à partir de cette Epître française dédiée au Pape de Mars 1561, l’on passera à une Epître italienne datée de Décembre 1562 puis à des Epîtres non datées dans les éditions ultérieures. lesquelles seront de plus sensiblement remaniées puis adressées au Duc d’Orléans et non plus au Pape.

   La première traduction italienne de l’Epître est relativement fidèle mais la fin en est sautée et la date du 18 Décembre 1562 se trouve tout à la fin de la pronostication avec la formule Per il vostro humiliss. obedientiss. servitore osservatore di V. Santita Michele Nostradamo, sur le modèle du texte français. C’est donc tout le pronostic qui aurait été interpolé dans l’Epître. Par la suite, pour les éditions commençant en 1565, les libertés avec l’Epître seront encore bien plus grandes.184

   Il est clair, du moins selon notre méthodologie, qu’un tel pronostic n’est pas compatible avec celui qui aurait prétendument été publié en 1558, soit antérieurement dans la seconde Epître à Henri II. On imagine mal Nostradamus s’intéresser, comme c’est le cas dans la “seconde” Epître à Henri II à la période 1584 - 1605 quand il s’adresse au Roi et à la période des années soixante dix quand il s’adresse au Pape plusieurs années plus tard !185 Certes, l’importance des années quatre vingt pour les contemporains de Nostradamus apparaît rétrospectivement comme déterminante - nous en traitons à propos de la prophétie régiomontanienne - mais ce qui nous importe, c’est que ces années là ne constituent pas pour Michel de Nostredame une échéance significative ou qu’il a préféré, pour diverses raisons, travailler des échéances plus brèves. Dans le système prophétique de celui ci, il ne nous semble guère concevable - même à en faire, comme P. Brind’amour un personnage assez fantasque - qu’il puisse écrire au Pape de prendre garde à l’an 1570186 et qu’il ne parle au Roi, à la même époque que d’une échéance autre et ne lui touche mot de cette date de 1570 !187 On pense à la remarque de Jean Bodin à propos précisément de Leovitius annonçant la fin du monde pour les années Quatre-Vingt mais publiant des Ephémérides jusqu’au début du siècle suivant. Affirmer avec Brind’amour (1993) que précisément ces textes italiens sont des faux qui ne correspondent pas à la pensée de Michel de Nostredame et leur préférer en revanche des textes qui ne peuvent guère lui être attribués pour les mêmes raisons, voilà qui montre la difficulté insigne qu’il y a à évoluer dans un monde où le faux et le vrai s’entremêlent. Nous pensons que Michel de Nostredame, comme il l’a fait pour les Voyages de plusieurs endroits de Charles Estienne Charles s’est servi de certains documents astronomiques sans nécessairement leur accorder d’autre importance que celle d’un ornement ou d’un support divinatoire.

   Le texte en question connaîtra de nombreuses éditions italiennes188 à l’exemple de ces Presagi et Pronostici di M. Michele Nostradamo quale principando l’Anno 1565 diligentemente discorrendo di Anno in Anno fino al 1570, Gênes, 1564. Mais il convient de préciser que paraissaient à Avignon - territoire pontifical - des textes en langue italienne comme en témoigne encore en 1820, au lendemain du rattachement à la France du Comtat Venaissin, cette Clef d’Or, parue à Avignon chez A. Joly, attribuée à une certain Albumasar de Carpenteri (italianisation de Carpentras) et traduite de l’italien.189

   On trouve également de Francesco Barozzi le Pronostico Universale (...) qual comincia dal principio dell’anno 1565 & finisce al principio dell’anno 1570, raccolto dalli Presagi del Divino Michiel Nostradamo (BNF et Mazarine). Il s’agit là d’une compilation utilisant entre autres les traductions italiennes précédentes.190

   Les éditions suivantes de cette Epître à Pie IV ne comportent plus sa date de rédaction dans le souci de laisser entendre que le texte est plus récent, peut être parce que ce qui avait été annoncé pour 1563 ne s’était pas réalisé et qu’il convenait donc d’en reporter l’échéance.

   Il faut en effet avoir accès aux versions italiennes pour comprendre quelles sont les échéances du prophétisme de Michel de Nostredame pour le seizième siècle. La BNF a conservé deux de ces textes (BNF, res V 1194 et 1195) : “fina al 1570”.191

Mi. de Nostradamus et les Annotationi de Francesco Barozzi

   Ce Pronostico fit l’objet non seulement d’une traduction mais d’un commentaire dans une nouvelle version des Présages de 1564 parue à Bologne en 1566 et, comme l’autre édition bolognaise, intitulée Pronostico, à la Librairie du “Mercurio” : Pronostico Universale di tutto il Mondo, il qual comincia dal principio dell’anno 1565 & finisce al principio dell’anno 1570 raccolto dalli Presagi del Divino Michiele Nostradamo & dalli Pronostici di molti altri Eccellentissimi Autori & con brevi annotationi illustrato.

   Barozzi expose son programme dans une Epître adressée aux notables bolonais, datée du 20 janvier 1566 : il a corrigé les “presagi” mal traduits et mal imprimés et les a amplifiés à l’aide des pronostics d’auteurs éminents. Ses annotations viseront notamment à expliciter, dit-il, tous les termes difficiles de l’Astrologie dont se sert Nostradamus.

   Cette fois, l’Epître à Pie IV, décédé, a été découpée en chapitres (couvrant les années 1565 à 1570), séparés par des Annotations et aucun nom de dédicataire n’apparaît plus.

   Qui est ce Francesco Barozzi (en latin Barocius) ? C’est un Vénitien qui dès 1560 publie, vers vingt ans, à Padoue, un Commentariorum ad universam mathematicam disciplinam (de Proclus) qui n’est pas sans rapport à l’Astrologie. Il sera plus tard notamment l’auteur d’une Cosmographia, dont nous connaissons les deux éditions (1585 et 1598) conservées à la B.N.F. (V 20682 et V 31455) et qui accorde une large place à l’Astrologie.192

   Le principal passage des Annotationiq consacré explicitement à Mi. de Nostradamus traite précisément du Pape qui vient de mourir. On compare donc l’astrologue français à un autre astrologue, Gian Battista Carelli, auteur d’Ephémérides qui vont de 1564 à 1575, parues à Venise chez Vincento Vulgarisi (BNF, V 8311 et Maz).

   Chapitre III Des graves événements de l’an 1566 :

   “Pour cette année, Nostradamus (il Nostradamo) fait référence à la mort d’une Dame (Matrona) et Carelli (il Carello) prévoit celle-ci pour 1569, année pour laquelle (comme on le verra plus loin) Nostradamus annonce la captivité ou la mort de quelque grand Prince ou Pape, alors que Carelli annonce ces événements pour 1566. Dès lors à l’époque des deux morts en question, nous avons deux auteurs qui ne sont pas du même avis et il convenait de le signaler.”

   Et Barozzi poursuit au Chapitre VI Sommaria narratione di tutto quello accarrera li due anni 1568 & 1569 :

   “De cette différence d’avis, je ne veux tirer de jugement, étant donnée l’excellence de ces deux auteurs dans cette profession mais l’expérience déterminera lequel des deux aura été le plus véridique.”

   Barozzi compare ainsi judicieusement les Pronostici de Nostradamus et les Ephémérides annuelles de Carelli. Ce dernier, pour 1566 avait écrit Princeps maximus morietur alors que Nostradamus avait ainsi terminé son Epître à Pie IV en évoquant la mort d’un “grandissimo costituito in la dignita della Hierarchia Ecclesiastica”, pour 1569. Nostradamus pouvait-il faire allusion au décès de son dédicataire ?193

   Barozzi écrit au début de 1566 et ne peut donc encore apprécier la valeur respective des prévisions de Nostradamus et de Carelli du moins pour 1566 et 1569. Il sait toutefois que Pie IV est mort. Les spéculations concernent donc le successeur de ce Pape, qui prendra le nom de Pie V.

   Il apparaît cependant que Barozzi aurait pris quelque liberté par rapport au texte de Nostradamus dont il déclare d’ailleurs qu’il a dû le rétablir, en raison d’erreurs qui s’y étaient glissées :

   “tal detrimento accompagnera & sara compresa qualche gran matrona (che non passeranno quelli anni 1566 & 1567 che ogni cosa cosi accadera & ancora piu di tal sorte), che il potere la forza la liberta sara levata a coloro che per avanti havevano ogni possanza....”

   On a mis entre parenthèses le passage sauté par Barozzi qui montre que Nostradamus ne faisait pas référence à la seule année 1566, mais aussi à l’année suivante. De la même façon, la référence à la mort d’un Prince de l’Eglise en 1569 n’est pas non plus clairement formulée dans l’Epître de Nostradamus. Il semblerait plutôt qu’il traite in fine de l’année 1570.

   Francesco Barozzi aurait quelque peu aménagé le texte de Nostradamus pour que son parallèle avec Carelli apparaisse plus frappant. Pour Michel de Nostredame, celui des Centuries en tout cas, l’Italie est en passe de connaître les plus grands malheurs.

L’édition adressée à Charles IX

   Charles IX polarisera l’activité prophétique dans les années soixante-dix (voir Livre II) mais le processus avait déjà commencé dans la décennie précédente.

   Signalons le Pronostico et Lunario de M. Michele Nostradamo pour 1564, paru à Florence (Bib. Centrale de Florence) adressé à Charles IX, datée du 15 décembre, de Salon de Craux 1563. Ce pourrait être la traduction d’une édition perdue de la Pronostication pour 1564.194 Comme nous l’avons fait observer pour les éditions anglaises, l’on a parfois du mal à croire qu’un tel hommage au roi de France ait pu circuler de l’autre côté des Alpes. Il est à noter que Charles IX rencontrera Nostradamus à Salon, lors de son “voyage” qui commença le 13 mars 1564.

   L’Epître est suivie d’un quatrain de Jean de Chevigny - sur l’identité duquel nous reviendrons - comme c’était le cas pour l’almanach pour 1563, paru à Avignon. Un autre quatrain latin en l’honneur de Nostradamus, du même Chevigny, figure in fine. Il est d’ailleurs assez remarquable qu’un texte qui vante de façon aussi dithyrambique les mérites de la France et de son souverain paraisse tel quel en Italie au point que l’on puisse considérer un tel document comme relevant de la propagande.

   Dans cette pronostication, l’accent est une fois de plus mis sur l’horizon de 1570 et Michel de Nostredame ne dit encore mot de l’attente des années Quatre Vingt.

   L’Almanach pour 1565 (Lyon, Benoît Odo, Bib. Pérouse) qui s’adresse au Pape incidemment - mais non dans l’Epître - comporte, comme le Pronostico une Epître à Charles IX, cette fois datée du 14 avril 1564, soit dans un laps de temps de quatre mois seulement après la première du 15 décembre 1563. En Avril 1564, le roi est au début de son périple.

   En vérité, l’auteur - est-ce vraiment Nostradamus ? - signale bien qu’il ne s’agit pas de la première Epître : “m’a encores par cette foys donné la hardiesse de vous consacrer les présages de l’année 1565 ensemble l’almanach”. Si nous n’avions pas retrouvé la première Epître à Charles IX, nous comprendrions mal ce passage195 mais il nous semble plus probable que Nostradamus ait dédié un texte plus anciennement au roi, dont l’avènement date de la fin de 1560, peut-être des Présages perdus. En fait, cette excuse devait déjà figurer dans l’Epître française de décembre 1563 et l’Epître qui ouvre l’Almanach pour 1565 est remaniée comme le sera celle vouée à Henri II, ce qui constitue une preuve de plus de ce que cet Almanach et ses quatrains ne doivent pas être attribués à Michel de Nostredame.

   Certes, nous ne disposons pas de l’original français de l’Epître d’origine mais il suffit de traduire le texte italien pour que la comparaison avec l’épître de l’almanach pour 1565 soit concluante :

15 décembre 1565 : “L’immensa bonta di V. M. dono particolare dato da Dio a i Re di Francia ma che nella sua faccia principalmente riluce

14 avril 1564 : “La magnanimité qui donne une splendeur très luysante à vostre Magesté, Sire, qui reluit à tous ceux qui sont al’entour”

   ou encore :

“E quello che gia e stato predetto à suoi padri troiani, certamente sara proprio à V. M.”

“...que pour le temps advenir, vostre Magesté doit surpasser vos antiq. ancestres Troyens.”

   On notera que dans le texte français de l’Epitre à Charles IX, il est fait allusion à l’arrière grand-père de Charles IX, Laurent le Magnifique196, or on ne trouve pas ce passage dans l’édition italienne, ce qui peut sembler étrange dans un ouvrage italien paru justement à Florence, fief des Médicis. On peut supposer en tout cas qu’en cela, le texte français complète le texte italien et nous aide à reconstituer l’épître d’origine disparue.

   Au demeurant, cet Almanach offre, on l’a vu plus haut, certains traits inhabituels197 qui contrastent avec la série des almanachs que nous connaissons de 1557 à 1566.198 Il comporte en outre des anomalies et des différences par rapport à la version donnée par les Présages (cf. infra).199

   Or voilà qu’enfin, pour cette année 1565, Michel de Nostredame, s’il en est l’auteur, se ferait l’écho d’une prophétie pour 1585 introduite d’ailleurs assez étrangement. Qu’on en juge : “Et cecy pour le quadrat de Jupiter à Mars & du Soleil à Saturne, qui résultera l’an 1567 à la 20 du moys de Mars par une maligne configuration de Saturne à Mars & le proche definement du monde l’an 1585 & cent fois pire l’an 1588 (…) A l’an 1584 à la sacro-sainte-eglise Romaine catholique viendra un des plus grands tresbuchements que advinst iamais depuis le siège de sainct Pierre.” On saisit mal, à vrai dire, comment l’on passe de 1567 à 1585 et comment il se fait que dans le même almanach, pour le mois d’Aoust, dédié au Pape, il n’est pas mentionné cette nouvelle ligne de mire ? Nous n’excluons pas pour notre part une interpolation au goût du jour, par les soins du libraire, dans cet almanach d’un Michel de Nostredame finissant, qui allait s’éteindre en 1566.

J. H.

Notes

1 Tout recours à un pseudonyme n’est-il pas une forme de distantiation ? Retour

2 Voir J. Randi, 1993, p. 37, qui semble par ailleurs (pp. 227 - 229) tout ignorer des découvertes de Benazra, parues en 1984, concernant l’édition Macé Bonhomme alors qu’il cite (p. 51) le travail de J. Dupèbe sur les Lettres Inédites. Retour

3 Voir Benazra, 1990, p. 231. Retour

4 L’édition dite de 1557 qui comporte le quatrain 88 de la centurie IV s’en trouve par là plus tardive. P. Brind’amour (1996, p. 544) la déclare “contemporaine de la date indiquée”. Retour

5 Voir E. Mozzani, Le Livre des superstitions, Paris, R. Laffont, 1995, p. 1492. Retour

6 Sur le lien Sicile-Empire chez Jean de Roquetaillade, dans Le Livre Révélateur, voir M. Aurell, “Messianisme royal de la Couronne d’Aragon (14e - 15e siècles) ”, Annales, janvier 1997, p. 143. Retour

7 M. Brion, Frederic II de Hohenstaufen, Paris, Taillandier, 1978, p. 15. P. Brind’amour (1996) ne propose (p. 135) aucune source pour ce quatrain. Frédéric II n’est cependant pas né en Sicile mais il succédera à son père à trois ans, à Palerme, en 1197. Il sera Empereur de 1220 à 1250. Retour

8 Voir Halbronn 1998.1. Retour

9 Voir Halbronn 1998.1. Retour

10 Voir Benazra, 1990. Retour

11 Cette tentation aura été celle de Denis Crouzet (1990) mais aussi, dans une moindre mesure, malgré un bagage en ce domaine plus solide, d’un Pierre Béhar (1996), d’un Pierre Brind’amour (1992, 1996). Crouzet, qui n’a pas lu les bibliographies de Benazra et de Chomarat, et s’appuie sur Buget et Leoni, passe sans transition de Nostradamus à un Mi. de Nostradamus (Tome 1, p. 128), et Béhar de la Préface à César à l’Epître centurique à Henri II. Retour

12 Cf. Denis Crouzet, 1990, t. 1, p. 131. Retour

13 C’est ce que fait également J. Dupèbe, dans son bref article “Nostradamus”, Dictionnaire Universel des Littératures, Dir. B. Didier, Paris, PUF, 1994, p. 2593 : “ces prophéties sont augmentées en 1558 et dédiées à Henri II”. Retour

14 Ouvrage négligé peut-être du fait qu’il parut chez un éditeur non universitaire, Robert Laffont et sa collection noire, “Les énigmes de l’univers”. Retour

15 Nous suivons tout à fait E. Bareste, dans son jugement sur l’édition de 1557, ne serait-ce que parce qu’elle correspond au contenu de celle de 1560 et que celle-ci comporte déjà, à cette date, une “addition de 39 articles pour 1561”. Retour

16 Voir notamment l’édition d’Amsterdam de 1667, les “Observations sur ses Prophéties” : Chyren pour Henri, Norlaris pour Lorrain, Mendosus pour Vendôme, Robin pour Biron, etc. in Vrayes centuries et prophéties, BNF, Ye 7373. Retour

17 Voir J. Halbronn, 1994.3, pp. 74 - 75. Retour

18 Les oeuvres de Pierre d’Ailly n’ont pas été traduites en français - mais il est souvent cité chez des auteurs français tel que Turrel - et les impressions latines de la fin du XVIe siècle n’ont pas été réalisées en France. Voir J.Halbronn, 1994.2. Retour

19 Il va de soi que le quatrain concernant Varennes, qui intéressa un G. Dumézil, est suffisamment attesté pour que l’idée d’une interpolation datant de la fin du XVIIIe siècle soit totalement exclue. Retour

20 A noter que P. Brind’amour, 1993, reste très discret sur le cas des sixains et des éditions les comprenant. Retour

21 Voir H. Torné-Chavigny, Réédition du Livre des Prophéties, op. cit. p.34, “Les éditions les plus anciennes (sic) n’ont que 42 quatrains à la VIIe Centurie. C’est sans doute pour la compléter qu’on a publié 58 sixains”, Benazra, 1990, p. 163. Retour

22 Sur la septième centurie, voir Francis Girault, “Prédictions. Vérifications et explications de quelques prophéties remarquables de Nostradamus” (1) in Gazette de Paris, mars 1839, BNF, parle des contrefaçons : “On (les) reconnaît à ce que la 7e centurie contient 44 quatrains au lieu de 42.” Retour

23 Voir M. E. Rose, 1988, et Benazra 1990, pp. 143 - 149. Le premier volet de l’édition de Cahors de 1590 ne comporte à la centurie VII que 40 quatrains et selon nous est donc antérieure aux éditions à 42 quatrains datées de 1568, supposées parues, à partir de 1599 / 1600, chez les Héritiers de Benoît Rigaud et chez Pierre Rigaud. Une édition de 1594, parue chez Benoît Rigaud ne comporte toujours que 40 quatrains à la centurie VII (Bib. Arsenal). Notons, à titre de comparaison, que le Discours de Claude Duret parut d’abord chez Benoist Rigaud en 1595 (BNF, R 34670) puis, trois ans plus tard chez les Héritiers de Benoist Rigaud (BNF, R 12969). Retour

24 Benazra, 1990, Préface de Jean Céard. Retour

25 Chomarat, 1989. Retour

26 Signalons un texte de 1573 : Responce prophétique d’un gentilhomme françois sur la demande à luy faicte par un quidam, le jour de la feste sainct Barthélémy, 24 d’Aoust dernier passé 1572. (…) par F. M. D. L. C. D. E. B., Lyon, Benoist Rigaud, 1573, BNF, Res. Ye 4701. Autre Ed. Paris, J. Ruelle, 1573, BNF, Res. Ye 1702. Retour

27 Liaroutzos, 1989. Retour

28 Voir J. Halbronn, 1998.1. Retour

29 Voir D. Pallier, Recherches sur l’imprimerie à Paris pendant la Ligue (1585 - 1594), Genève, Droz, 1975, qui ne signale aucune édition parisienne des Centuries. Retour

30 Rose-Roth, 1988. Résumé de sa thèse in Réforme Humanisme Renaissnce, 28, 1989. Retour

31 Crouzet, 1990, t. 1, p. 116, regrette “la grande lacune (…) de la disparition ou de l’inaccessibilité des almanachs rédigés par Nostradamus”. La situation actuelle, avec notamment le Recueil des Présages Prosaïques mais aussi grâce à un bon repérage des exemplaires existants, n’est pas aussi grave qu’il le dit. Retour

32 23e canon in Les canons & documents très amples touchant l’usage & practique des communs Almanachz que l’on nomme Ephémerides, Paris, R. Chaudière, 1551. Retour

33 La Lune fournit quatre nombres : le 7 parce que son parcours mensuel peut être divisé en quartiers, d’où la semaine qui devait initialement s’ajuster sur ceux-ci; le 12 parce que la Lune rencontre en gros 12 fois le soleil au cours des quatre saisons terrestres (365 jours) ; le 28 parce qu’un mois lunaire - une révolution de la Lune autour de la Terre - correspond à peu près à ce nombre de jours (voir l’usage dans les prophéties moultiennes, et enfin 354 parce que c’est la somme de 12 mois lunaires. Notons que la Lune se trouve à environ 354.000 km de notre planète. Retour

34 Ce texte n’est signalé ni par Chomarat ni par Benazra. Retour

35 Si ce n’est que Pasquier confond 1553 et 1555, la date de 1555 figure dans la préface à César dans l’édition rouennaise de Raphael du Petit Val, de 1588. Retour

36 Notons que ce quatrain ne figure pas parmi ceux des Présages. Retour

37 Signalons également une référence à Nostradamus dans la Satyre Ménippée de 1593 : Harangue de Monsieur d’Aubray pour le Tiers Etat (attribuée à Pierre Pithou) “qui ont pronostiqué mieux que Nostradamus“, BNF, Lb35 448. Texte anti-espagnol “de la vertu du catholicon d’Espagne et de la tenue des Etats de Paris”, réunis pour choisir le successeur d’Henri III, voir ce texte in Mémoires de la Ligue sous Henri III et Henri IV, Tome V de 1598, pp. 486 et seq., Maz, 47115. Retour

38 La Pronosticatio est effectivement organisée autour des trois Etats que sont le clergé, la noblesse et le peuple. Retour

39 Livre IV des Commentaires, Ed. par A. de Ruble, tome II, 1872, p. 287. Retour

40 Voir cependant le Recueil des Présages prosaïques, op. cit. Retour

41 Voir le Recueil des Présages prosaïques, de Chavigny, 1589, MS, BM Lyon. Retour

42 Voir Céard, 1987, p. 289. Retour

43 Le rôle accordé à Lodoicus / Loys se retrouve dans l’Androgyn de 1570. Retour

44 Voir Halbronn 1998.1. Retour

45 Une précédente édition dont le titre est tronqué est conservée à la BM de Rouen. Retour

46 “Lettre écrite en réponse à un de mes amis qui me demandait ce que je pensais de Nostradamus”. Retour

47 L’auteur des lettres signale une édition de 1583 comportant les sept premières centuries. Une telle édition n’a pas été recensée. Il a probablement confondu 1583 et 1588. Retour

48 Voir Halbronn 1998.1. Retour

49 BM Lyon Part-Dieu, fonds ancien, MS. P. Brind’amour nous avait communiqué en 1991 la page de titre du manuscrit. Nous avons pu obtenir en 1996 alors que l’ouvrage n’était pas encore restauré et accessible au public, quelques notes présentées par la personne qui avait signalé l’ouvrage à la Bibliothèque de Lyon, ainsi que des reproductions de pages du manuscrit (extraits des Livres VII (1562), VIII (1563) et XI (1566) des Présages Prosaïques) grâce à Pierre Guinard, conservateur en chef à la Bibliothèque Municipale de Lyon La Part-Dieu. En mars 97, nous avons eu enfin accès au manuscrit. A propos de Grenoble, dans l’Epître à A. d’Ornano, l’auteur évoque (p. 283 du Janus Gallicus) une rencontre avec celui ci dans cette ville, quelques années plus tôt. Retour

50 Voir Gautheret Comboulot, 1886, p. 318, qui précise “ces présages en prose ne nous sont point parvenus”. Retour

51 Une telle formulation laisse entendre que Michel de Nostredame n’aurait introduit de quatrains dans son oeuvre qu’au bout de quelques années de pronostications. Retour

52 Quatrième partie de l’Harmonie et accomplissement des prophéties, Cologne, 1688, p. 277, BNF, D2 3823. Retour

53 Sur des publications rouennaises vers 1673, voir R. Benazra, p. 249. Retour

54 Cet emploi du terme “présage” par Chavigny est en fait pour nous révélateur. Il montre que celui-ci n’a pas eu accès directement à la collection des “pronostications” alors qu’il demeurait aux côtés de Michel de Nostredame, comme il le prétend, mais qu’il reprend une expression préférée par la suite par l’auteur du recueil factice mentionné par Massard. Retour

55 Signalé par Papillon, dans sa Bibliothèque, t. 1, op. cit. Retour

56 1993, pp. 501 - 502. Retour

57 Voir Chomarat (1989), vol. 1 op. cit. n° 188 et Benazra, 1990, p.193. Retour

58 Il semble bien qu’au milieu du XVIIe siècle, un certain nombre de manuscrits nostradamiques aient été rendus accessibles, comme le texte complet de la Vie de Nostradamus et non pas simplement son Abrégé (Brief discours), dont s’est probablement servi l’auteur de l’Eclaircissement de 1656. A noter que César de Nostredame meurt en 1629 et que ceci explique peut-être cela. On préfèrera donc la date de 1630 qui est postérieure à cette disparition pouvant avoir “libéré” certains textes. Retour

59 Reproduction in Nostradamus au XVIe siècle, portfolio de 10 fac simile, Verna (38), Eric Visier, 1995, selon l’édition parisienne de 1596 ne portant pas en son titre de référence à Janus. Retour

60 Videl, dans sa Déclaration des Abus, Avignon, 1558, atteste de la parution d’almanachs de Nostradamus avant 1555. Retour

61 Voir Benazra, 1990, p. 59. On notera le cas des quatrains de l’almanach pour 1561 réapparaissant dans les éditions parisiennes des Prophéties, en 1588. Retour

62 Brind’amour, 1993. Retour

63 En 1579, Jean de Chevigny, traduisant J. Dorat, transpose le texte latin en recourant à la formule suivante “celle prophétique voix (...) celle qui avoit laissé mille papiers escris”. Faut-il y voir une allusion à une “miliade” de quatrains (Epître à Henri II) ? Nous ne le pensons pas, d’abord parce que la forme ne figure pas dans l’original latin mais aussi parce qu’il s’agit bien plutôt d’une simple formule. Il pourrait s’agir de mille formules lapidaires constituant, selon notre hypothèse, les Prophéties Perpétuelles de 1556. Retour

64 Le texte de Dorat figurera en 1586 dans l’édition de ses oeuvres mais est-on certain que celui-ci soit paru avant 1570, voire avant 1586, sous la Ligue ? A notre avis, il s’agirait tout au plus d’un projet car en 1570, il est probable qu’on n’ait pas encore publié plus que les trois premières centuries (1557) et une addition de quelques quatrains (1560). Retour

65 Crespin et Michel Nostradamus le jeune seront tous deux accusés d’avoir commis des incendies. Chez le second, on rapporte qu’au lieu dit Le Pouzin, celui-ci aurait mis le feu pour faire s’accomplir un pronostic. Retour

66 E. Leroy, Nostradamus, ses origines, sa vie, son œuvre, Bergerac, 1972, p. 130. Reed., Marseille, J. Laffitte, 1993. Retour

67 Voir Bibl. Nat. de Prague. Nous avions signalé ce texte à P. Brind’amour (1993) qui le mentionne dans son Nostradamus, astrophile. Au XVIIe siècle, G. Minois, 1996, p. 344, signale une traduction en breton : Guir pronosticon an den savant meurbet Michel Nostradamus evit nao bloas, Montroulez (c 1831), BL, 872 f 12. Retour

68 Bernard Chevignard note que ces Epîtres Latines sont copiées de la même main que le Recueil des Présages Prosaïques, manuscrit qui n’accueille guère davantage, on l’aura noté, les Centuries, le terme “prosaïque” s’opposant, a priori, à celui de quatrain. Retour

69 La BPU de Genève possède une belle collection de pronostications du premier tiers du XVIe siècle, comportant une iconographie absentes des publications équivalentes, dans le Royaume. Retour

70 Voir Coyecque, Recueil Anisson (cf. infra). Retour

71 En 1903, H. Douchet publiera les “Présages tirés des almanachs de Michel Nostradamus non cités jusqu’ici par Chavigny ni par l’abbé Torné-Chavigny”, in Les Prophéties de M. Nostradamus etc, Méricourt l’Abbé (Dept. 80), reproduits par Benazra, RCN, pp. 447 - 448., qui précise que cet apport est dû à la collection de l’abbé H. Rigaux. Les quatrains pour 1556, dont aucun n’est commenté dans le Janus Gallicus, ne sont pas fournis. Retour

72 Les quatrains des almanachs sont en revanche traduits en anglais mais on n’y trouve pas d’exégèse particulière les concernant. Retour

73 En fait, au XVIIe siècle, plusieurs états circuleront. Retour

74 Le seul texte qui en ait cure est celui des Pléiades de Chavigny (1603) alimenté par un recueil manuscrit se trouvant à la Bibliothèque Municipale de Lyon intitulé “Recueil de présages prosaïques”, voir P. Brind’amour, 1993. Retour

75 L’étude des différentes éditions des Centuries fait ressortir toutes sortes de variantes qui seront étudiées par un H. Torné Chavigny, sous le Second Empire (cf. infra). Signalons les brèves recensions de G. Tappa, “Annexe aux Vraies Centuries et Prophéties”, Nice, Boumendil, 1982 comparant l’édition Chevillot de 1611 et celle d’Amsterdam de 1668. Voir aussi R. Benazra dans sa Préface aux Prophéties (Lyon, 1555), Lyon, Amis de Michel Nostradamus, 1984, qui compare les exemplaires d’Albi et de Vienne (Autriche), pp 14 et seq de la dite édition de Macé Bonhomme. L’étude de la compilation de Crespin fera également apparaître des variantes entre lesquelles l’on peut trancher que dans quelques cas (cf. infra) pour peu que l’on sache repérer certains éléments structurels, répétitifs. Retour

76 Toutefois, dans les almanachs et pronostications, l’on peut trouver des majuscules (cf. Henripolis). Quant aux initiales chères à Chavigny, qu’il appelle “réticences”, il semblerait, à l’en croire en tout cas, qu’il y en ait eu dans l’almanach pour 1555 (cf. Janus Gallicus) : V.S.C. janvier 1555 et L. V. mars 1555. Retour

77 Antoine Crespin, on le verra, aura été mieux inspiré que son modèle. Retour

78 P. Brind’amour cite des passages du manuscrit (1992, p. 259, par exemple). Il est le seul chercheur à avoir été autorisé à l’examiner avant son long séjour à la restauration. Retour

79 Selon l’expression de Chavigny. Au vrai, le terme “présages” pour désigner les quatrains extraits des almanachs nous parait impropre, cela signifie simplement qu’ils ont été extraits des dits Présages. Retour

80 On notera une similitude entre les privilèges des Prophéties de Nostradamus et celles de Du Pavillon : “Jean Dallier & Anthoine Le Clerc auraient recouvert certaine copiez cy attachée & intitulée Les Prophéties du Seigneur du Pavillon les Lorriz qu’ils feraient volontiers imprimer” et “Macé Bonhomme (...) ha dict avoir recouvert certain livre intitulé Les Prophéties de Michel Nostradamus qu’il ferait volontiers imprimer”. Retour

81 Dans le catalogue des imprimés de la BNF, l’ouvrage est indiqué pour l’entrée “Du Pavillon” et non à “Couillard” comme c’est le cas d’autres publications de cet auteur. Retour

82 Selon Francesco Maiello (thèse à l’Univ. de Pise sur l’histoire des calendriers français), auquel nous avons signalé l’almanach pour 1561, Nostradamus aurait innové par ses commentaires quotidiens du calendrier. Retour

83 Selon nous, il pourrait s’agir de N. Cholières, voir Halbronn 1991.3. Voir R. Benazra, 1990. M. C. Touchard propose Théodore de Bèze, Nostradamus, Paris, CAL, 1972, p. 170. Retour

84 Sur Rigaux, voir R. Normand, “L’abbé Rigaux, curé d’Argoeuves, interprète de Nostradamus”, conférence faite aux Rosati picards, le 3 novembre 1928, Amiens, 1930, BNF, 8° Ln27 68650 Retour

85 E. Deher, Nostradamus, Lyon, LUG, 1996, p. 44, ne s’en réfère pas moins à cet almanach pour 1556. Retour

86 Voir Nostradamus, astrophile. Retour

87 Monumenta pietatis. & Literaria virorum in republica et literaria illustrium selecta, ed. L. C. Mieg & D. Nebel, Francfort 1702, Tome II, p 91. BNF G 6450, Pars secunda continens varia pietatis et eruditionis virorum superioribus duobus seculis celebrium monumenta. Epistola Michaelis Nostradami ad Iohan. Lobetium. “Quod in prognostico nostro anni 1564 notavimus, ubi Gallia cum veniet Lymo comitante duellum etc”. XII décembre 1565. Signé Michael Nostradamus a consiliis medicus & mathematicus Christian. Francorum regis. On retrouve cette lettre dans le recueil manuscrit de la BNF, MS Lat 8592 (fol 131 - 133), Lettres Inédites, Dupèbe, 1983, pp. 163 - 164, lettre LI. Selon Dupèbe, p. 12, la transcription de Francfort de cette lettre serait plus fiable que celle du manuscrit. Voir Benazra, 1990, pp. 282 - 283 et Chomarat, 1989, n° 318, qui ne mentionne pas cette lettre de décembre 1565. Retour

88 Cf. Bib. Nat. Centrale de Florence, 1039.12. Retour

89 Si l’on considère la collection Ruzo, pour ce qui est des almanachs et pronostications, les seuls ouvrages dont elle possède un unicum sont la Pronostication Nouvelle pour 1555 et l’Almanach pour 1560. L’almanach pour 1562 se trouve aux Archives Royales de Belgique à Bruxelles. Retour

90 Dans le RCN, Benazra (1990) ne prend pas la peine de mettre en parallèle, quand cela est possible, les deux séries. Retour

91 Ce recueil est cité dans le Janus Gallicus, article n° 9, “présages prosaïques de nostre auteur par moy colligez”. Retour

92 Signalons le projet de B. Chevignard d’une édition critique du RPP. Retour

93 Il semble en effet que le style de Pâques ne s’appliquait pas aux almanachs. Voir Brind’amour 1992, p. 31. Retour

94 Voir Benazra, RCN, pp. 8 - 9. Nostradamus dans l’épître à Henri II, en tête des Présages Merveilleux pour 1557 fait référence aux “prédictions futures de l’an mil cinq cens cinquante et six”. Retour

95 La Bibliotheca Astrologica en a une copie d’après l’exemplaire de Ruzo, communiquée par P. Brind’amour. Retour

96 Sur les almanachs et les présages avant 1558, voir les citations qu’en donne Laurent Videl, dans sa Déclaration des abus, ignorances et seditions de Michel Nostradamus (…) oeuvre très utile & profitable à un chascun, Avignon, Pierre Roux, 1558, BNF. Retour

97 Mise en ordre par Catherine Amadou. Un exemplaire de cette reconstitution est disponible à la Réserve de la BSG, Qb 4° 3400 (4) Sup. Retour

98 P. Brind’amour note : “1564, aucun exemplaire connu dont l’authenticité soit assurée” (1993, p.30). Retour

99 Or nous contestons l’authenticité des almanachs pour 1565, 1566 et 1567 (cf. infra) correspondant justement à des années sans Pronostication. Retour

100 Reproduit in Cahiers Nostradamus. Retour

101 Voir Benazra, p. 77. Nous avons deux pages de A Prognostication of M. de Nostrodame (...) for this present year 1567, FSL, Washington, signalé par Chomarat, 1989, n° 74. Retour

102 Voir Benazra 1990, p. 51, An almanach for the yere MDLXII, FSL, Washington. Retour

103 La page de titre figure in revue Cahiers Astrologiques n° 97 mars-avril 1962, p. 64. Voir Benazra, p. 5. Retour

104 On ne suivra pas D. Crouzet (Les Guerriers de Dieu, op. cit., p. 102) dans son jugement sur l’accès aux almanachs de Michel de Nostredame : “ses almanachs de la période 1550 - 1562, à quelques exceptions près ont disparu : dès la fin du XVIe siècle, Jean Aimé de Chavigny notait l’extrême difficulté à se les procurer.” Il semble que cet auteur n’ait pas connu la bibliographie comprenant des localisations du Testament de Nostradamus de D. Ruzo, Paris, R. Laffont, 1982 ou de la Bibliographie Nostradamus de M. Chomarat parue en 1989, donc avant la publication de son ouvrage. Il est vrai que ces almanachs - encore faut-il les distinguer des pronostications - sont très peu conservés dans les bibliothèques parisiennes et même françaises. Par ailleurs, il n’est pas exact que chaque almanach comporte 14 quatrains (voir Crouzet, op. cit. p.126), il n’y en a généralement que 13 : “A partir de 1555, écrit-il, Nostradamus se met à insérer quatorze quatrains prophétiques dans ses almanachs (douze relatifs aux mois de l’année, un définissant le commencement de l’année, un en tête d’une épître).” Retour

105 Benazra nous a confirmé ce point. Voir sur le distingo almanach / pronostication notre c.r. du RCN in revue Aries, n°s 12 - 13, Paris, La Table d’Emeraude, novembre 1991, pp. 78 - 79. Retour

106 Marie Eugénie Rose, 1988, signale p. 11 “treize présages” pour 1555 et p.190 “quatorze quatrains”. Retour

107 Voir Benazra, 1990, p. 6. Retour

108 Op. cit. pp. 194 - 195, M. E. Rose, 1988, p. 192, a par ailleurs tenté de distinguer le style des quatrains “présagiques” de celui des quatrains “centuriques”. On peut regretter qu’elle n’ait pas eu accès aux almanachs et pronostications autrement que par le Janus Gallicus de 1594. Retour

109 Nostradamus n’a évidemment pas eu besoin d’attendre la sortie de l’almanach pour 1555 pour remanier ce quatrain. Retour

110 Nous n’avons pu vérifier dans la Pronostication originale pour 1555. Retour

111 M. Marin, Nostradamus, Paris, Granger, 1998, voit (p. 132), en revanche, dans les “razés”, des “religieux catholiques”. Retour

112 Benazra ne décrit pas cet almanach sinon en citant le Janus Gallicus. Il signale certes qu’il est conservé à Pérouse mais visiblement ne l’a pas consulté lors de la rédaction du RCN (p. 65). Retour

113 BNF, Réserve pV 219. Voir Benazra, 1990, pp. 68 - 69. Retour

114 Il semblerait que les Italiens n’aient pas voulu du calendrier de Nostradamus et qu’ils aient donc ignoré les quatrains qui s’y trouvaient à la différence des Anglais qui s’intéressèrent également à reproduire le calendrier. Retour

115 Benazra, 1990, p. 59. Retour

116 Le faussaire fait dire à Nostradamus pour la prédiction d’octobre 1563 “Stulti negligunt & contemnunt Astrologiam”. ou encore, pour septembre, “Astrologia altissima scientiarum est”. Retour

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117 Les correspondances ne coïncident pas toujours avec celle des manuels d’aujourd’hui. Retour

118 La thèse inverse d’un texte en prose mis en vers par Nostradamus semble peu recevable. Retour

119 Voir Benazra, 1990, pp. 74 - 76. Retour

120 Voir aussi le cas du quatrain de septembre. Retour

121 Almanach pour l’an 1561 par Maistre Michel Nostradamus restitué par Catherine Amadou" in L’Astrologie de Nostradamus, op. cit. Retour

122 L’almanach pour 1561 a pour particularité un changement de taille des caractères dans sa dernière partie comme si la place avait manqué sur la fin. Retour

123 Voir Benazra, 1990, p. 42, qui indique “L’Epître est dédicacée à Madame la Duchesse de Savoie”. Retour

124 Nostradamus s’en prend, au cours des “Prédictions pour le mois d’Août”, aux “calomniateurs”, ce qui fait entrer cet almanach dans son corpus polémique. O. Millet (1987), dans son étude sur les adversaires de Nostradamus, ne semble pas avoir pris en compte les réactions de celui-ci. Objections concernant la dimension réformée de cette mise en cause, par D. Crouzet (1990, Tome I, pp. 160 - 161). Retour

125 P. Brind’amour nous a communiqué la copie de cet almanach qu’il avait reçue de Daniel Ruzo juste avant sa mort. Retour

126 Nous remercions P. Guinard, responsable du fonds ancien, de nous avoir autorisé à consulter le manuscrit sur place en mars 1997, lors de l’exposition Nostradamus qui se tint à la BM. Lyon. Retour

127 Il existe une double pagination, par folio et par page, nous utiliserons cette dernière. Retour

128 P. Guinard nous a communiqué une description ne déterminant que 11 livres dont le dernier comporterait les almanachs pour 1566 et 1567. Or à la p. 647 du manuscrit, à vrai dire fort peu lisible, il est bien annoncé un nouveau livre comportant ce qui concerne 1567. La marque des 14 livres initialement prévus a été effacée mais les traces subsistent de l’agencement antérieur. Retour

129 Le recueil de la Bib. Lyon La Part Dieu désormais accessible permet de combler certaines lacunes liées à un corpus incomplet d’almanachs. Retour

130 En 1558, Nostradamus, dans les Significations de l’Eclipse, Paris, Guillaume Le Noir, Bib. Musée Arbaud, écrit : “Après avoir supputé la future prédiction par Almanach & pronostication assez amplement de l’an 1559; par quelques jours après voyant par plus profonde calculation aucunes calamiteuses adventures (...) ay bien voulu par plus ample & manifeste déclaration etc.”. Retour

131 Dans le cas de l’Almanach pour 1566, “avec ses amples significations et explications”, reproduit in Cahiers Michel Nostradamus n° 5 - 6, 1987 - 1988, on a bien affaire à des présages, c’est-à-dire avec des textes fondés sur un thème astral complet, d’ailleurs représenté. Le terme apparaît toutefois uniquement au début de l’Almanach : “Présage sommaire sur l’année 1566”. Retour

132 Buget, in Bulletin du Bibliophile de 1861, note “ces mots” avec les Présages “qui sont pareillement sous le titre de notre almanach ne signifient pas avec les quatrains puisqu’ils faisaient partie du calendrier mais avec les prédictions en prose qui (...) s’intitulent Pronostications.” (p. 676). Retour

133 Brind’amour, 1993, qui relève la présence des quatrains des almanachs, année par année, se contente de noter que les quatrains pour 1556 manquent dans le manuscrit. ce qui ne surprend pas puisque dans ses autres ouvrages, Chavigny n’en cite pas les quatrains mensuels. Retour

134 L’on désigne les maisons par des chiffres romains, de I à XII. Retour

135 Voir Ruzo, 1982, pp. 259 et seq. Retour

136 Ruzo n’a pas remarqué cette différence avec l’autre édition troyenne, alors que, note Ruzo, à une exception près, il ne s’agit pas de quatrains des Centuries mais il semble que le terme de centurie soit devenu alors synonyme de quatrain. Retour

137 Ruzo note que toutes les éditions parisiennes ont la même mise en page. L’addition de 1599 se place dans un espace vide ou comportant un motif. (BM. Angers). Retour

138 Pierre Chevillot est, en 1588, libraire à Paris. Voir sa Responce au Roy etc, Maz. 37836. Retour

139 Voir Halbronn 1998.1. Retour

140 J. Halbronn 1998,1 Retour

141 Béhar 1996, p. 124. Retour

142 Il semble que ce personnage à sa table soit issu de l’iconographie du Kalendrier des Bergers ou de celle présente dans certaines éditions de Virgile. Retour

143 Reproduisant les planches figurant en vis à vis, chez Ruzo, 1982. Retour

144 Remarquons que l’édition lyonnaise pour l’an 1555 porte “prognostication” tandis que les éditions parisiennes pour 1557 et 1559 portent “pronostication”. Retour

145 Que nous avons placé sur la page de couverture du RCN de Benazra. Retour

146 La frise zodiacale figure, avec quelques variantes de détail, sur le Période de P. Turrel (BSG), paru vraisemblablement vers 1550, mais avec un motif intérieur différent, il s’agit d’une main tenant la sphère armillaire, avec au-dessus les luminaires : c’est, en gros, le motif de la fenêtre. On y notera la représentation très sexuée du signe des gémeaux. Le motif intérieur figurant chez Turrel, sans la frise, se retrouve dans les éditions “1568” de Benoist Rigaud. Retour

147 Benazra, RCN, p. 59. Retour

148 Signalons aussi cette même vignette sur la page de titre de l’Almanach et amples prédictions pour l’an de Iesus Christ 1582, composé par maistre Marc Coloni, Paris, Claude Montr’oeil, Cl.; (BL). On y trouve quelques quatrains nostradamiques. Retour

149 Voir Benazra, RCN, pp. 118 et seq. Retour

150 Voir Benazra, RCN, pp. 51-52. Retour

151 On ne dispose pas des éditions des pronostications pour 1559, 1560 et 1561, ce qui permettrait de vérifier ou d’infirmer cette hypothèse. La pronostication pour 1562 joue donc un rôle essentiel dans notre démonstration quant à l’apparition tardive du nouveau motif. Retour

152 On ne sait pas si Nostredame est écrit en un ou deux mots, pour les besoins du blason. Retour

153 Voir reproduction in Chomarat 1990, p. 58 Retour

154 Chomarat, 1989, reproduit pp. 46 et 58 les vignettes de l’almanach pour 1566 et des Prophéties de 1568, elles sont identiques à ceci près que celle de l’almanach est plus réduite. Retour

155 Chavigny signale en marge, dans le Recueil des Présages Prosaïques, “cette interprétation ne fut jamais veue” (p. 165). Les seuls quatrains qui soient suivis d’un commentaire en prose sont ceux des almanachs. Nous avions déjà noté que le terme de la Préface à César “vaticinations perpétuelles” aurait été plus pertinent pour des quatrains marqués par les phénomènes naturels et non truffés de noms de lieux, ce qui est tout à fait atypique du genre. Retour

156 Voir Olivier Millet, 1987, ne cite pas cet ouvrage dans son dossier. On relèvera la formule “Or retournons à noz moutons” qui n’a pas attendu le Topaze de Marcel Pagnol. Retour

157 Prunier a montré (art. in Cahiers Astrologiques, Nice) que les positions planétaires fournies dans l’Epître à Henri II correspondaient aux configurations de l’année 1606 et furent probablement recopiées de l’Ephemeridum de Leovitius. Retour

158 Voir Brind’amour, 1993, p. 211. Retour

159 Quant à la référence signalée par Brind’amour à l’Almanach pour 1558, elle ne nous est connue qu’à travers les Pléiades de Chavigny, on n’a retrouvé que la Pronostication pour 1558 (Bib. Royale de La Haye) qui n’y fait pas référence. Selon nous, la date de 1585 a été interpolée dans ce texte. Retour

160 Cf. Les guerriers de Dieu, op. cit. p. 128. Retour

161 Lettre autographe reproduite au début du reprint des Significations de l’Eclipse qui sera le 16 septembre 1559, texte paru à Paris, Guillaume Le Noir, par Henri Douchet en 1904. Retour

162 Une Epître n’a pas à paraître en tant qu’épître, elle peut fort bien porter un titre plus technique comme c’est le cas avec les Significations. Retour

163 On ne peut vérifier à quelle date ces textes parurent, on en a pas conservé les éditions françaises. Retour

164 On peut raisonnablement penser que l’édition anglaise de la Pronostication pour 1559 de la BL serait fidèle à ce que Nostradamus avançait à la veille de cette année là, quand il rédigeait son texte, selon ses dires, à la fin de mai 1558. Retour

165 M. Marin, Nostradamus, Paris, J. Granger, 1998, p. 81, y voit Paris. Retour

166 Voir S. Bertière, Les reines de France au temps des Valois. 2 Les années sanglantes, Paris, De Fallois, 1994, Paris, p. 39. Retour

167 Sur la réception de Nostradamus en 1559, outre-manche, voir H. Dobin, Merlin’s disciples. Prophets, poetry and power in Renaissance England, Stanford, Stanford Univ. Press, 1990, pp. 124 - 125 ; W. Fulke, Antiprognosticon etc, Londres, H. Sutton, BL, 718 C 6 en latin, et sa trad. anglaise Antiprognosticon, an invective against vague and unprofitable predictions of the astrologers and Nostradamus, trad. W. Painter, Londres, H. Sutton, 1560, BL C 71 a 19 ; F. Coxe, A short treatise declaring the detestable wickedness of magicall sciences etc, Londres, [1561], BL, C 27 a 3 ; voir Benazra, 1990, p. 46. Retour

168 Sur la natura des étoiles fixes dans les publications d’époque, voir I. Pantin, “La place des Ephmerides octavae sphaerae dans la cosmologie de Tyard”, Colloque Pontus de Tyard, poète, philosophe , théologien, Université Paris XII, 1998. A paraître. S. Bokdam nous précise que dans les Ephémérides de Mizauld, cette information figure également. Voir J. Dupèbe, thèse sur Mizauld, Paris X, 1999. Retour

169 L’auteur s’en prend longuement à ses “détracteurs” (voir au titre) tel un Hercules Gallicus qui pourrait être l’Hercule François auteur d’une Première Invective (...) contre Monstradamus. Traduicte du latin (voir Benazra, RCN, 1557 - 1558). Voir Chomarat, 1989, n° 30. Dans la pronostication anglaise, Nostradamus polémiquait également “against those that saye I wryte Deliramenta, it is themselves that dote ...” Retour

170 L’original est au Musée P. Arbaud, Aix, D 2967. Retour

171 Ce texte et la lettre furent reproduits en 1904 par Henry Douchet (cf. BNF). Retour

172 L’Année 1607 succède à 1606 dans ces éditions plus tardives. Retour

173 L’on peut regretter que le catalogue des ouvrages du XVIe siècle de la BSG se soit contenté de parler de “Prédictions mémorables” sans citer le nom des auteurs Retour

174 Qui affirme (1990, p. 60) qu’il n’y a pas de traduction d’un almanach pour 1564 sans prendre en compte l’information présente chez Chomarat (1989) p. 41. Retour

175 Voir Gabriel, Grandes Ephémérides, op. cit. Retour

176 Voir Halbronn 1991.2. Retour

177 Voir fac simile n° 5 in Nostradamus au XVIe siècle. 10 fac-similés, Verna (Dept 38), E. Visier, 1995. Retour

178 Reproduction très fidèle d’un manuscrit inédit de M. de Nostredame. Dédié à SS. le Pape Pie IV, Mariebourg, Fonds Chomarat de la BM de Lyon, 8252. H. Douchet semble ignorer l’existence d’un Almanach pour 1562 comportant une autre version de la lettre. Benazra ignore cette réédition. Le tome II de la Bibliothèque Nostradamus de M. Chomarat n’est pas encore paru mais nous avons pu au moins consulter à la Bibliothèque de Lyon les ouvrages qu’il avait acquis et qui constituent le fonds Chomarat. Nous avions du nous contenter jusque là de quelques pages du manuscrites parues dans un catalogue de vente en 1966 (Bibliothèque d’un Humaniste). Benazra donne une description détaillée de ce manuscrit sans que l’on sache très bien d’où il tient cette information. Retour

179 Dans notre article, nous ne mentionnions pas ce texte de la Valicelliana pas plus d’ailleurs que le fait que le pronostic pour le mois d’août 1565 dans l’Almanach pour cette année (Bib. Aug., Pérouse) est adressé au Pape “Pio IIII Pont. Max.”. “Et pour mieux ce faire, j’ai adressé ce mois à nostre sainct père le Pape, afin que sa saincteté envoye par les Chrestiens la paix universelle comme sa puissance porte de bon”. Voir R. Amadou, qui confondait les deux Epîtres comme il le reconnaît dans Nostradamus et l’Astrologie, op. cit. Retour

180 R. Benazra, 1990, p. 62, signale une édition italienne pour 1563 mais ne comportant en sa page de titre aucune référence à l’année 1570 (B. Marciana, Venise). La BNF possède deux éditions italiennes qui couvrent non pas 1563-1570 mais 1565 - 1570, avec une Epître au Pape différente de la première édition. Retour

181 Nostradamus et l’astrologie, op. cit. p. 413. R. Amadou : “Nous tenons pour apocryphe le texte diffèrent des deux précédents d’une prétendue lettre de Nostradamus à Pie IV qui n’existe plus qu’en traduction italienne.” Retour

182 Voir Halbronn, 1991.3. Retour

183 Il existe une autre lettre restée inédite en date du 20 avril 1561, reproduite in E. Visier, n° 5, Nostradamus au XVIe siècle. 10 fac similés, op. cit. Voir Halbronn 1991.2. Dans le manuscrit analysé par Benazra, 1990, p. 53, et qui semble être un brouillon qui sera remanié par la suite, l’on notera ce passage : “l’année 1564 qui sera l’année que la substance de l’Eglise rendra à une si grande dévalée pour le fait de la temporalité que jamais elle ayt fait”. En 1564, lorsque Michel de Nostredame, après ce qui pourrait avoir été un échec prévisionnel, rédigera son almanach pour 1565, il fixera de nouvelles échéances à plus long terme, sous l’influence de Cyprianus Leovitius, dont le De coniunctionibus est justement paru en 1564 et ouvre l’horizon 1583 - 1588. Retour

184 Sur une autre épître française de Nostradamus au Pape en date du 20 Avril 1561 restée manuscrite, voir Benazra, 1990, pp. 52, et seq. Lettre reproduite in Nostradamus au XVIe siècle, op. cit. En fait, il s’agit d’une autre version de la même Epître du 17 mars 1561, un mois plus tôt. On notera que l’almanach utilise la même formule que le manuscrit non localisé lequel est ainsi intitulé Les Praedictions de l’almanach de l’an 1562, 1563, 1564. On se perd en conjectures sur ce brouillon daté plus tardivement que le texte imprimé. Pour quelle raison Michel de Nostredame aurait-il choisi d’antidater d’un mois son Epître au Pape ? Est ce qu’entre temps, certains événements auraient eu lieu qu’il importait qu’il eût annoncés ? Mais n’en avait-il été de même pour les Epîtres à Henri II, tellement proches l’une de l’autre ? Retour

185 Voir Halbronn, 1991.3. Retour

186 D. Crouzet, 1990, p. 128, souligne l’importance qu’accordait Michel de Nostredame à l’année 1567, rappelant que Lichtenberger avait fait ressortir cette date, voir Bernard Capp, 1979, p. 165. Retour

187 R. Bauckam, 1978, p.163, montre bien que c’est au cours des années Soixante Dix que la sensibilité à l’échéance des années Quatre-Vingt s’est développée : nouvelle étoile de 1572, comète de 1577, tremblement de terre de 1580. Retour

188 BNF, Res V 1194-1195. Retour

189 BM Alençon, Cote catalogue 3921. Retour

190 Barozzi est par ailleurs l’auteur du premier commentaire d’un oracle de Nostradamus, qui ne soit pas un de ses adversaires comme le furent Couillard ou Videl. Retour

191 Cf. Benazra, RCN, pp. 67 - 68. Retour

192 Barozzi publie un Commentarius in locum Platonis obscurissimum, en 1566 à Bologne chez ce Benacci chez qui est sorti, cette année là, le Vero Pronostico dédié au Duc d’Orléans, mais c’est chez “Mercuri” que sort son commentaire de Nostradamus. Retour

193 Voir Alain Gaffet, Précis généalogique des familles d’Orléans, Paris, 1970, Chez l’auteur, BNF, 4° L1 m 258. Notons que le début du règne d’Henri III sera mis en relation avec la Nova de 1572. Voir J. Céard, 1985. Retour

194 P. Brind’amour note : “1564, aucun exemplaire connu dont l’authenticité soit assurée” (1993, p.30). Retour

195 On pourra ainsi comparer les références de Chavigny à cette Pronostication avec ce qui est a priori assez proche de l’original. Rappelons que pour 1567, on ne dispose également que de la traduction italienne de l’Almanach : Almanacho per l’anno DMLXVII (sic) (…) con (...) dichiarationi dell ‘Eclisse del Sole del presente anno 1567, Bib. de l’Université Jagiellonski, Cracovie, cote Matematyka 1397, voir Brind’amour, 1996, p. 558. Dans l’almanach pour 1566, on retrouve un passage consacré à Charles IX en latin pour le mois d’août. Retour

196 “(...) imitant en cela voz progeniteurs maternels, mesmes le feu grand Laurens”. Retour

197 La page de titre où le mot almanach est surmonté d’une formule latine suivie de six initiales décrivant les luminaires. Sol Aeterno ac Luna P.D.O.V.V.S. Retour

198 Texte de l’almanach pour 1558 in RPP de la BM Lyon, MS 6852, fol. 83 et seq. dont les quatrains sont repris in Janus Gallicus. Rappelons que nous n’avons pas pour l’heure d’exemplaire pour 1558. Quant à l’almanach pour 1560, il y en aurait un exemplaire dans la Bib. Ruzo auquel nous n’avons eu accès que très partiellement, voir op. cit. p. 39. Retour

199 Parmi les sollicitations prophétiques adressées à Charles IX, signalons celle parue en 1567 du réformé Grémond, la Prophétie de Saint-Jehan l’Evangéliste, aujourd’hui accomplie par les faux prophètes envoyé à Très Chrestien et Merveilleux pilier de la Sainte-Foy à Charles IX Roy de France, BNF, Ld176 26. Retour



 

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